citadelle, était un palais appelé le Pavillon du bonheur. Ce pavillon était décoré
de riches tentures, de tapis magnifiques e t de divans splendides.
Dans tous les palais, une salle était réservée pour les cérémonies pompeuse
s; elle p o rta it ordinairement u n nom distinctif, par exemple El-Achrafieh3
c onstruite à la citadelle par le soultan Melek-el-Àchraf, e t appelée ainsi du nom
de ce prince.
Quoique ces palais ne puissent e n tre r en comparaison avec les nôtres, il
faut cependant avouer qu’ici le luxe et la richesse l’emportent, sous certains
rapports, su r ce qu’on voit chez n o u s ; l’ameublement se borne, il e st vrai, ii
quelques tapis ou à des tentures e t des étoffes qui recouvrent des divans ou des
sophas brochés d ’or et de soie, e t à de grands vases du Japon et de la Chine,
mais ils donnent une haute idée du bien-être que l’on y goûte, quoique nos
autre s meubles d ’Europe le u r soient étrangers.
Le p alais ou château appelé Qasr-el-Fawalim, ou palais des fatimites, s’élevait
à l ’endroit où l ’on voyait naguère le Mahlcemeh3 ou la place du Jugement. L’ancienne
demeure du qâdy, ayant été démolie par Méhémet-Aly, en 1829, mit â
découvert une partie des ruines du palais. Sur la porte méridionale d’une lourde1
construction, dont le qâdy avait fait sa cuisine e t ses écuries, on voyait Une.
inscription koufique portant le nom d’El-Moez-ebn-Abd-el-Selam-el-Achraf-el-
Kerym-el-Aly, qui, vers 361 (972), fonda la ville du Kaire. Les murailles de cet
édifice, en p a rtie enterrées, avaient, en certains endroits, deux ou trois mètres
d ’épaisseur e t les étages é taient séparés p a r des voûtes solides.
Un peu plus à l ’est, on rem a rq u a it une grande pièce où le qâdy avait établi
son moulin à farine. Quoique fort dégradée, elle était encore dans un éta t do
conservation pe rm e ttan t d’en reconnaître le plan e t de distinguer les principaux
ornements, lesquels se composaient d ’une longue frise et de voûtes ornées d’une
série de niches en pendentifs. Le plan et la décoration présentaient une analogie
frappante avec la grande salle du palais de Ziza, près de Palerme 1 ; malheureusement
les toiles d’araignée et l’obscurité du lieu empêchaient de lire les
légendes. Par sa décoration, cette salle ne pouvait remonter à l’époque des
fatimites, e t nous p a ra ît avoir fait partie du palais construit par Moham-
med-ben-Qalaoûn El-Melek-el Nâcer, palais de justice connu sous le nom de
Dâr-el-Adel.
Le palais des fatimites avait cinq grandes portes. La premiè re , au nord,
4. Voyez : Girault cle Prangey, Essai sur ^architecture des Arabes et des Mores, en Espagne» en
S icile et en Barbarie, p. 9.
appelée Bab-el-Fawatim-,la porte des fatimites, servait d ’entrée p rin c ip a le ; elle
était si tuée parallèlement à l’ancienné porte de Bab-el-Nasr, dont on voyait encore
une p a rtie il y a quelques années dans le q u a rtie r appelé Darb-el-Kinniz ; elle
conduisait à Yhoân-el-Kébir3 ou grand p o rtiq u e , bâti p a r le khalife Aziz, l’an 369.
La seconde, à l’ouest, se nommait Bab-cl-Ghouzah e t servait d ’entrée à la p a rtie du
palais où sê tra ita ien t les affaires militaires; cette entré e é ta it près dés rues
désignées aujourd’hui par les noms d’El-Karafeh et de Soukaryeh. La troisième,
au sud, appelée Bab-el-Sùlehieh, conduisait au tribunal de justice e t au q u a rtie r
de l’administration. La quatrième, à l’est, se nommait Bab-el-Zoubbah3 ou porte
des officiers; elle se trouvait su r l ’impasse actuelle Atfit-el-Hacaneyn. Enfin la
cinquième, au sud, que l ’on appelait Bab-el-KhulafaK ou la porte de khalifes,
conduisait à le u r cimetière; elle s’élevait à l’endroit où se trouve aujourd’hui
la porte du vekialé El-Nahas, dans le Khan-el-Khalily, construit en 690 (1294),
probablement p a r Khalil-el-Achraf, qui s’empara des fondations annexées aux
tombeaux des khalifes, bâtis su r cet emplacement.
La seule tombe qui a it été épargnée est celle de Melek-eï-Saleh, prince de la
dynastie de Salah-el-Din, 646 (1548), organisateur de cette milice des mam-
louks, d ’où so rtiren t le soultan Khalil e t tan t d’autres qui envahirent le trône
d’Égyple; les tombeaux des fatimites étant négligés disparurent peu à peu, et
quelques débris, rappelés dans les traditions, atte stent seuls au jo u rd ’hui les
souvenirs; historiques de cette époque.
En trois siècles, les monuments que l’orgueil et l’affection avaient élevés
su r les restes des fatimites é taient détruits, et les os de leurs ancêtres, qu ’ils
avaient apportés d ’un pays lointain pour les placer près d ’eux, se trouvaient
disséminés dans le charnie r public.
Une rue , appelée Beyn-el-Qasrein3 séparait la demeure des khalifes d ’un au tre
palais situé su r la partie occidentale de la rue , palais qui servait de résidence au
vizir et à la garnison. C’était p eut-être le palais appelé Dâr-el-Wizdreh, co n stru it
p a r l’émir El-Gyouch Bedz-el-Gemaly, qui a donné son nom à une pa rtie de ce
q uartier.
D’après l’étendue de ces constructions, que les écrivains arabes disent avoir
été très-grandes, il est probable que la ru e voisine du Khalig e t appelée Beyn-el-
Soureym était ainsi nommée parce q u ’elle séparait la circonvallation occidentale
du palais de la muraille de la ville, près du canal.
Le terrain que couvraient ces vastes résidences fut bientôt, ap rè s la chute
des fatimites et la construction de la citadelle au pied du Moqaltam, couvert
d’habitations séparées p a rle s rues actuelles.