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au mamelon par Je côté, et, dans les premiers jours, il aurait beaucoup de peine
à y atteindre ; si la mère ne se baissait un peu.
« Dans les hardes les petits tètent indistinctement toutes les Femelles qui ont du
lait ; on a été témoin de ce fait lorsqu’on a pris à la fois des hardes entières: On
a aussi remarqué que si on enlève un petit à sa mère, et qu’on l’en tienne séparé
pendant deux jours, elle ne le reconnaît plus, quoiqu’il la cherche et lui demande
la mamelle avep des cris.
«. Le jeune Éléphant tète pendant deux ans, et atteint près de quatre pieds la pre-
mière année; il en a quatre et demi la s e c o n d e , et cinq la troisième ; il continue à
croître, mais de quantités moins grandes chaque année, jusqu’à vingt ou vinglxleux
ans. Les Éléphans actuels des Indes sont moins grands, selon M. Corse, que ceux dont
les voyageurs précédens ont parlé. Les femelles ont ordinairement de sept à huië
pieds ; les mâles de huit à dix. Le plus grand dont cet observateur ait entendu
parler avait douze pieds deux pouces ( anglais ) -depuis le sommet de la tête jusqu’à
terre ; sa hauteur au garrot était de dix pieds cinq pouces, et sa longueur de quinze
pieds. Sur cent cinquante-Éléphans employés daiis la première guerre eontre Tipoo,
il n’y en avait pas un seul de dix pieds. Mais on en trouve de décrits dans les
anciennes relations, qui avaient quatorze et jusqu’à seize pieds de hauteur. Le
cabinet de Pétersbourg en possède un squelette de quatorze pieds. L ’individu dont
il provient avait été donné à Pierre-le-Grand par un roi de Perse. Le Grand-Turc
en avait donné un au roi de Naples, vers 1 . qui avait treize pieds et demi.
« La femelle est prête à recevoir le mâle dès l’âge de seize ans, et peut-être plus
tôt. On n’a rien d’assuré sur l’âge auquel TÉléphânt peut pousser la vie ; mais on
e n a-conservé en domesticité jusqu’à cent vingt on cent trente ans.; et d’après la
lenteur de son accroissement, il est probable qu’il peut vivre, dans l’état de sauvage,
jusqu’à près de deux ÿècles. .
«Les défenses de lait tombent le douzième ou le treizième'mois; celles qui leur
succèdent ne tombent plus et croissent toute la vie dans l’Éléphant des Indes; mais
nons n’osons affirmer que l’opinion déjà avancée par Élien et soutenue depuis par
quelques modernes*,que les Éléphans en changent à diverses reprises, comme les
Cerfs dé bois, soit fausse par rapport à l’espèce d’Afrique.
« Les plus grandes défenses qu’on ait vues aii Bengale pesaient soixante-douze
livres : dans la province de Tinera elles ne vont point au delà de cinquante livres.
On en montre cependant à Londres, qu’on dit venir du royaume de Pégu, et qui
pèsent un quintal et demi. _
« Les molaires de lait paraissent huit ou dix jours après la naissance : elles ne sont
bien formées qu’au bout de six semaines, et ce n’est qu’à trois mois qu’elles sont complètement
sorties. Les secondes molaires sont complètement sorties à deux ans; les
troisièmes commencent alors à se développer. Elles font tomber les secondes à six
ans et sont à leur tour poussées par les quatrièmes qui les font tomber à neuf ans.
Il y a encore, d’autres successions Semblables, mais on n’en connaît pas bien- les
époques. On croit que chaque dent a besoin d’un an de plus que la précédente pour
être parfaite, Les premières sont composées de quatre lames ou dents partielles,
les secondes de huit ou neuf, les troisièmes de treize ou quatorze, les quatrièmes
de quinze, et ainsi de-suite jusqu’à la sept ou huitième qui en a vingt-deux ou vingt-
trois , ce qjii est le plus grand nombre que l’on ait encore observé.
« Les Éléphans des Indes présentent diverses variétés relatives à là taille, à la couleur
et à la grandeur proportionnelle des défenses. Leur couleur naturelle- est un
ÉLÉPHANT D ’ASIE. ^
brun noirâtre, qui se change d’ordinaire en gris sale, parce qu’ils sont presque
toujours couverts de poussière : on en a rencontré quelquefois dans les-bois qui
avaient unê teinte .rougeâtre, due, -selon un voyageur très-moderne, à une sorte
de terre glaise dont ils s’énduisent. Les Éléphans blancs sont tels par une maladie
semblahle-à celle qui produit les Albinos-. Ils sont singulièrement révérés par les
Indiens qui croient à la métempsycose ■: ces Éléphans sont animés* selon eux
par les âmes de leurs anciens rois. Les rois de Siam, de Pégu.et dhmtres Contrée^
de la presqu’île.au delà du Gange, plaçaient dans leurs titrés celui de possesseurs
de Eléphant blanc ; ils le logeaient et le faisaient servir avec magnificence, -
•* Nous.avons déjà, vu que les femelles dés Indes n’ont jamais que de très-courtes
defenses : il y a des mâles qui n’en ont pas de plus longues, sans qu’on en sache la
raison.-On les appelle Afoofom. Ceux qui les ont longues se-nomment Dauntelhh,'
du mot daunt qui est le même que notre mot dent. Cette différence n’en apporte
pas dans le prix. Lorsqu’on ne connaît pas le caractère d’un Éléphant, les-.Européens
aiment mieux l’acheter sans grandes défenses, parce qu’il aura moins de moyens
de nuire s’il se trouve méchant : mais les Indiens préfèrent assez les individus à
ongues défenses, pour s’exposer à ' tous les risques. Lorsque le bon naturel de
1 animal estmnnu, les deux nations l’aiment mieux avec de grandes défenses, 1
« Il y a une infinité de variété?parmi les Dauntelahs, par rapport à la direction et
à la courbure 'de leurs défenses. Les plus estimés; sont ceux où elfes approchent Je
plus de la: direction horizontale. Les princes indiens ont aussi un respect superstitieux
pour les■Dauntelâhs qui n’ont qu’une défense, comme cela arrive quelquefois.
«c Une différence plus importante par rapport au prix et à l’utilité, c’est celle qu’on
fait entre \és Komdréah et les Merghée. Les premiers sont des Éléphans à corps
épais,^ long, à jambes.courtes;, ils sont plus robustes, résistent plus long-temps à
la fatigue et sont bien plus estimés. Les seconds ont le corps - plus haut, plus
court, et les jambes plus longues : il y a entre les uns et les autres plusieurs degrés
intermédiaires. Toutes ces variétés se rencontrent indifféremment dans les mêmes
hardes.
« Les Éléphans domestiques ne produisent point jusqu’à présent; ceux qui sont
dans cet état ont tous été sauvages, à moins qu’ils ne soient nés de mères prises
pleines. On les prend aux Indes de deux manières, en troupes1 et isolés : -une troupe
entière se prend en l’entourant d’un grand nombre dlhomme^ armés, placés sur
deux cercles, qui l'effraient par lé bruit des tam-tams, dès armes à feu, et par l’éelat
de la flamme, et qui sé prêtent un secours mutuel pour empêcher des Éléphans de
s’échapper de tout autre côté que celui où ils veulent les conduire'. On les force ainsi
d’entrer dans une enceinte pratiquée à cet .effet.,c et fermée de larges fossés et de
palissades composées d’arbres plantés profondément et soutenu! par des barres transverses
et par des arcs-boutans ; l ’entrée de cette enceinte est garnie de feuillages,
et ressemble autant qu’il est possible à un sentier ordinaire de forêt;¿cependant la
conductrice de la harde hésite long-temps avant de s’y engager : une-ibis qu’elle y
entre, tous les autres Éléphans la suivent sans difficulté. Alors la porte de l’enceinte
sé referme par des pieux et des feux allumés; des cris, des flambeaux, le bruit des
instrumens arrêtent les Éléphans dans tous -les efforts qu’ils tentent pour passer le
fossé et renverser la palissade. On leur donne leur nourriture d’un échafaud placé
près de 1 entrée d’un long couloir, dans lequel on les attire de cette manière un à
un, et qui est assez étroit pour qu’ils ne puissent s’y tourner; sitôtfqu’un d’eux
est entré dans ce couloir, on en ferme la porte; 011 l’arrête devant et derrière par