OURS DES MALAIS.
C ette espèce d’Ours est celle dont il a été question à la fin de notre article sur l’Ours
du Thibet, sous le nom d’Ours de Malaca. Depuis long-temps les voyageurs en
avaient parlé, mais sans en décrire les caractères. Marsden, qui l’avait vu à Sumatra,
nous apprend qu’il se nomme Brourong, nom que M. Raffles écrit Bruang. Ce-
lui-ci, le premier, a donné quelques détails intéressans sur cette espèce ( Trans.
Linn., . t. xiii); mais c’est M. Horsfield qui l’a fait connaître, par une figure, dans
ses recherches sur les animaux de Java, où il paraît que cet animal se trouve aussi.
C’est, c'omme l’observe M. Duvaucel, à qui nous devons la figure que nous publions,
ainsi que les notes dont nous allons donner l’extrait, la seule espèce d’Ours
qui ait passé du continent dans les îles; car elle existe au Pégu, et, sans doute, dans
les contrées environnantes. Mon frère a aussi parlé de cette espèce dans le quatrième
volume, page 3a3, de la seconde édition de ses Recherches sur les Ossemens fossiles.
Cet Ours des Malais est le plus petit des trois qui se trouvent aux Indes; il est
d’un sixième moins grand que l’Ours-Jongleur. Sa tête est ronde, son front large et
son museau plus court proportionnellement que celui des autres. Le cartilage des
narijies est semblable à celui de l’Ours commun, c’est-à-dire qu’il n’a ni la largeur,
ni la mobilité de celui du Jongleur. Le pelage est ras, luisant et serré sur le corps,
ainsi que sur la tête. On remarque, au-dessus des yeux, une tache fauve pâle, que
lâge lait disparaître. Le museau est d’un roux plus ou moins foncé, et la tache
pectorale, également roussâtre, présente la figure imparfaite d’un large coeur.
Cette espèce, la plus rare partout où sont aussi les autres, est néanmoins là plus
répandue. C’est aussi la plus délicate et la plus modifiée. Sa taille surtout varie notablement.
Les plus petits individus viennent du Pégu, et les plus grands de l’île de
Sumatra, où ils sont communs et où ils causent de grands ravages, en grimpant au
sommet des cocotiers pour en boire le lait après avoir dévoré leur cime.
Il paraît, d’après ce que rapporte M. Railles, que cet Ours, comme tous les autres,
est susceptible de s’apprivoiser lorsqu’on le prend et qu’on l’élève jeune. Il en posséda
un pendant deux ans, qui jouissait d’une entière liberté, et qui s’était habitué
à boire du vin de Champagne, sans que pour cela il perdît rien de sa douceur et
de sa familiarité. Il vivait amicalement avec un chien, un chat et un lory bleu,
mangeait avec eux au même plat, et se plaisait à jouer avec le chien, dont la gaîté
s accordait avec la sienne. Cette douceur extrême n’était cependant point due à la faiblesse
: après deux ans, il était devenu très-grand, et si musculeux, qu’il arrachait
facilement de terre des plantins dont il pouvait à peine embrasser la tige.
MM. Railles et Horsfield ont donné à cette espèce le nom latin de Malayunus,
qui, sans doute, sera adopté dans tous les catalogues méthodiques.
Février i8a5.