'j, LE CARCAJOU.
point encore les analogies font présumer qu’elles ne différeront d’aucune manière.
La description la plus exacte qu’on ait du Carcajou, est celle que l’on trouve dans
le voyage du capitaine Franklin aux bords de la mer Polaire. La comparaison qu’il
fait de cet animal avec le Blaireau , est de la plus parfaite justesse. Il le nomme
avec Pennant Mêles Labradoria.
Tout ce qu’on a rapporté des moeurs de ce Blaireau d’Amérique, annonce qu’à
cet égard il ressemble encore à celui d’Europe. C’est un animal très—solitaire et très—
circonspect, qui vit dans des terriers d’où il ne s’éloigne qü’avec prudence, dont
la force égale la timidité, qui, dans le danger, devient furieux et déchire les chiens
contre lesquels il se défend. Ses mouvemens sont lourds ; il n’attaque point les
animaux légers qui lui échapperaient sans peine, mais il s’attache au Castor qui est
aussi pesant que lui et qui cependant lui échappe encore toutes les fois qu’il peut
fuir sous la glace ; car le Carcajou le cherche jusque dans ses habitations qü il détruit
avec ses ongles.
Je ne rappellerai point ce que j ’ai dit des caractères génériques des Blaireaux, en
donnant la description du Blaireau commun ; et je me bornerai à faire connaître
les caractères spécifiques du Carcajou.,
La première différence que présente cet animal, comparé dans son ensemble au
Blaireau, consiste dans sa teinte générale, qui est brune au lieu d’être grise; c’est-
à-dire, que ce qui est noir chez l’un est brun chez l’autre. La nature du pelage
paraît être plus fine chez le Carcajou, mais c’ est la même distribution de couleurs.
Les seuls caractères notables qu’on remarque en ce dernier point chez le Blaireau
Américain, c’est que les grandes taches latérales sur le fond blanc de la tete, au lieu de
naître, comme chez le Blaireau, de la base de chaque oreille, d’embrasser l’oeil dans
leur milieu et de venir se terminer sans se mêler en arrière du groin,' naissent du
dessus du cou, où elles se fondent avec le pelage de cette partie, passent sur l’oeil, et
ne l’embrassent qu’en détachant autour de lui une ligne circulaire, et viennent se
confondre au-dessus du groin, avec la couleur duquel elles se mélangent. On voit
de plus sur chaque joue, une forte tache isolée qui ne se trouve point chez le Blaireau,
et le dessous de la gorge que celui-ci a noir est blanc chez le Carcajou. La ligne
blanche qui sépare, sur la partie moyenne de la tete, les deux grandes taches où sont
les yeux, s’arrête chéz le Blaireau vers l’occiput, et elle s’étend chez le Carcajou
jusqu’au dessus des épaules; et la partie blanche des côtés des joues qui, chez le
premier, s’abaisse au-dessous des oreilles, embrasse chez ce dernier celles-ci qui
sont entièrement blanches. Le ventre est blanc, et l’on sait qu’il est noir chez le
Blaireau. Ce sont là, autant que je puis en juger par l’individu que j ’ai sous les yeux,
les seuls traits distinctifs de ces deux animaux, qui paraissent se ressembler encore
par la taille. Sarazin donnait au Carcajou deux pieds du bout du museau à l’origine
de la queue ; ce sont ces dimensions que Buffon a trouvées à l’individu qu il a décrit ;
c’est la mesure de celui qui m’occupe aujourd’hui, et c’est celle que m’a présentée le
Blaireau dont j ’ai parlé. M. Say, dans le voyage de Franklin, donne 5 pouces de plus
de longueur à son Carcajou. La queue de cet animal a 4 pouces.
Les auteurs systématiques qui avaient admis le Carcajou, lui donnaient le nom
latin de Luscus. C’est sous ce nom qu’il est dans Erxleben, Gmelin, etc#, etc. ; et
c’est sans doute celui qu’il conservera.
Novembre 18 2 4 .