J’eus l’occasion de faire aussi une autre remarque, intéressant
la jonction de ces glaciers latéraux avec le principal :
leur langue terminale, formée de glace assez pure et peu
recouverte de pierres, ne se confond pas avec celle du Bal-
toro, grisâtre, souillée de débris morainiques de toute
dimension ; le glacier latéral refoule et fait dévier d’une
façon notable la direction générale de la masse principale,
laissant entre deux une vallécule de plus de 20 mètres de
profondeur, marquée sur une longue étendue et qui ne disparaît
jamais complètement.
C’est à partir de cet endroit qu’on aperçoit le Gusher-
( i 32.) Vue panoramique au N. E. de Rhobutse.
brum en compagnie du Broad Peak, dominant de leurs
26.000 pieds (8.000 mètres environ) le fond d’un cirque glaciaire
qui n’a probablement pas son pareil au monde.
Une fois traversés les trois glaciers latéraux, et sans
nom, nous contournons un éperon rocheux formé d’une
plaque à peu près verticale de plus de 200 mètres, et parfaitement
lisse, et débouchons sur un cône d’avalanches, où
des traces de chutes récentes sont encore très visibles. Ces
avalanches proviennent d’un glacier surplombant, qui s’émiette
constamment en formant, non un glacier remanié,
mais un simple cône, divisé en bas en deux moitiés inégales
par un éperon rocheux. On traverse la seconde de ces moitiés
pour gagner un joli site herbeux, qui est le parao de
Rdokass ; il est 10 j/î heures.
A peine arrivés, nous nous mettons à partager le reste
de la farine entre notre personnel ; chaque homme reçoit
huit rations, et doit la transformer ici en pain ; car, d’après
les messages qui viennent de nous arriver, c’est le dernier
endroit où l’on trouve encore du combustible.
( i33.) Camp III. Rdokass. Les Baltis préparant leur pain.
Comme c’est un joli emplacement pour établir une base
de ravitaillement, nous écrivons à Eckenstein de venir
installer ici son campement ; un vrai pâturage, le plus vert
et le plus touffu que nous ayons rencontré dans toute la vallée,
fera longtemps le régal de nos chèvres et de nos moutons
; des buissons de saules et de vernes fourniraient du,
bois pendant de nombreuses semaines à des troupes plus
considérables encore que la nôtre; enfin d’énormes blocs