Les abricots forment avec le blé la base de l'alimentation
indigène. On les sèche de la façon suivante : on coupe le
fruit en deux et on agglomère un certain nombre de ces
moitiés de manière à en faire des boules de la grosseur d’un
poing d’enfant, qui se conservent très bien, grâce à leur
grande quantité de sucre et probablement aussi à l’extrême
sécheresse de l’air. — Quant aux noyaux, on les casse pour
en extraire les amandes, qui entrent aussi dans l’alimentation.
11 y a à Skardu une petite garnison indigène, qui occupe
deux anciennes forteresses,
assez imposantes
d’aspect, mais plus
guère en rapport avec
les notions de stratégie
moderne. L’une d’èlles
est située à mi-hauteür
d’une colline que nous
avons choisie comme
but de nos excursions ;
elle domine la plaine
s r. ■ ^ WKÊÊ , ' de 400 mètres et la vue (80.) Environs de Skardu.
en est des.plus grandioses
: les montagnes se groupent en tableaux aussi variés
que nombreux ; l’Indus et le Shigar roulent majestueusement
sur un lit de sable leurs eaux ralenties, imprimant au
paysage un cachet de tranquillité et de silence auquel nous
ne sommes plus habitués depuis longtemps.
Nous avions espéré atteindre Askoley en passant le
Skoro-la, col de 5,400 mètres environ, et gagner ainsi'deux
ou trois jours sur le trajet ordinaire, qui consiste à remonter
la vallée de Shigar jusqu’à Yuno, puis celle du Braldoh par
Gomboro, Dasso et Pakora. Ce dernier itinéraire exige sept
jours de marche et, bon gré mal gré, nous fûmes obligés de
l’adopter, eu égard aux coolies, auxquels nous ne pouvions
demander en conscience d’aller affronter la neige et les difficultés
d’un tel passage, à une époque de l’année aussi peu
avancée.*
Dans la soirée, le tahsildar nous fait savoir par un de ses
subordonnés, jeune Indou qui pàrle très bien l’anglais, que
notre départ pourrait s’effectuer le 19, lundi de Pentecôte,
les ordres ayant été donnés dans les vallées que nous allons
remonter.
En attendant, je trouve de la besogne: un jeune indigène
ayant été enseveli dans une carrière, toute la partie charnue
du mollet pendait, lamentablement arrachée ; la plaie était
remplie de sable et de terre, et j’eus pour plus d’une heure
à la nettoyer et à la désinfecter ; une fois l’hémorrhagie arrêtée
et les muscles, puis la peau, remis en place, et tout
cela supporté avec un stoïcisme incroyable pour un si jeune
homme, je l’envoyai à l’hôpital de l’endroit, rudimentaire
dispensaire tenu par un médecin indigène qui supplée par
beaucoup de zèle et de dévouement à des connaissances par
trop sommaires pour un directeur d’hôpital. — J’eus l’occasion
de revoir ce jeune homme à notre retour, parfaitement
guéri et ne boitant même pas ; seule une énorme cicatrice,
très bien soudée, attestait l’effroyable plaie et les souffrances
qu’il avait dû endurer.
Le lendemain, en guise de passe-temps, nous allons essayer
de pêcher quelques truites dans l’Indus : mais la
patience nous fait bientôt défaut, et nous préférons en acheter
à 20 centimes la livre aux pêcheurs, peu habitués à
pareille aubaine.
Dans la soirée, nous eûmes une tempête de sable, phénomène
assez curieux et dont nous pûmes nous rendre un
compte exact pour la première fois : toute la plaine, en dehors
des endroits irrigués et cultivés, est recouverte exclusivement
d’un sable fin, que le moindre vent met en
mouvement ; après une chaudejournée, l’air plus frais descend
rapidement des hautes montagnes et se précipite avec