certain nombre de cordes d’osier ou de branches de bouleau
d’un diamètre de 5 à 7 centimètres, tressées et réunies en trois
câbles ; l’un, d’une épaisseur de 15 à 20 centimètres, est le tablier
du pont ; les deux autres, plus minces, servent de mains
courantes : trop épaisses pour l’étreinte, et hérissées d’un
bout à l’autre par des bouts de branches taillés en biseau,
auxquels les mains s’écorchent et où les manches s’accrochent
aux moments critiques,
elles ne sont pas commodes à
tenir.
Les câbles sont joints tous
les deux mètres par des liens
en forme de V, également en
osier tressé, et attachés de
chaque côté à la main courante
en passant
sous le tablier,
qu’ils
contribuent
à supporter.
Tous
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WfgK,
les 25 pas
ou à peu
près, il y
a, ou il est
censé y
avoir une
pièce de bois ou une grosse branche horizontale, pour écarter
et maintenir rigides les deux mains courantes, ou lés empêcher
de s’écarter trop ; ces « traverses » sont à la hauteur
de 1 mètre, et on les enjambe-non sans un certain frisson !
Un djhoula est ainsi un'pont suspendu et très ingénieusement
construit au-déssus d’une gorge ou d’un rétrécissement
de la rivière; à ses extrémités les câbles passent par-dessus
de hauts pilliers pour aller se perdre sous des monceaux de
pierres. Plus il est tendu, plus aussi il est agréable à traverser;
mais, si haut que soient ses extrémités, le milieu est toujours
assez près de la rivière ; souvent même, au gros de
l’été, pour peu qu’il soit un peu relâché, il baigne dans l’eau,
toujours furieuse à ces endroits resserrés. En outre, ces ponts
sont presque constamment animés par le vent, d’un balance-
ment pendulaire plus ou moins prononcé.
Enfin, les indigènes les laissent à peu près pourrir avant
de les réparer. On comprendra donc qu’un djhoula branlant,
vertigineux, ayant un ou deux câbles rompus et les autres
pourris, sans pièces de bois transversales et sans V, donne
à penser à un novice.'
Le pont de Karmang est en même temps un des plus
longs, des plus tendus et des mieux entretenus que l’on rencontre.
Aussi, quoique nous ne soyons pas obligés de le
passer, en profitons-nous pour nous entraîner et nous aguerrir
à ce jeu d’acrobates. Et je dois avouer que toutes les difficultés
que nous avions prévues sont surpassées encore par
les effets d’une singulière illusion d’optique : une fois arrivés
au milieu du pont, au-dessus de la partie la plus rapide du
courant, nous avons l’impression que l’eau est immobile et
que le pont remonte furieusement la rivière : d’où une
tendance presque invincible à se pencher en amont pour
résister à la poussée, et une très pénible sensation de
vertige !
Dans la soirée, j’eus une foule de malades à examiner, et
entre autres un enfant avec un bec-de-lièvre, que ses parents
tenaient absolument à faire opérer; bien qu’âgé de 4 ans à
peine, il ne poussa pas un gémissement; lorsqu’il faisait
mine de se débattre, son père le reprenait sévèrement ; aussitôt
il redevenait tranquille et, en moins d’un quart d’heure,
l’opération était terminée. Aussi, le lendemain et les jours
suivants, dans les nombreux villages, que nous traversons,
on me présente à plusieurs reprises d’autres enfants, et même
des adultes, atteints de la même infirmité. Chose curieuse;