Un des dangers sérieux de l’expédition était passé; aussi
l’arrivée, deux heures plus tard, aux ponts de cordes, ne fut
qu’un divertissement; toutefois, ce fut l’occasion d’une nouvelle
perte de temps. En outre, à partir de là, le sentier
n’existe plus que par intermittences ; on suit d’abord le lit
de la rivière, où le sable et les galets de toute grosseur, incrustés
de nombreux grenats, alternent avec les flaques
d’eau saumâtre.
On remonte ensuite dans des pierriers, et l’on passe au-
près d’une demi-douzaine de sources chaudes et sulfureuses
qui jaillissent de là montagne, à quelques centaines de mètres
au-dessus du fond de la vallée; le trajet que suit cette eau
chaude est marqué par une couche assez épaisse de dépôts
calcaires et par un carex1) très vigoureux qui, en grandes
touffes, jette une note gaie de verdure au milieu de la teinte
uniformément ocreuse du paysage.
*) Les carex, ou laiches, sont des plantes voisines des graminées, mais
les feuilles, longues, étroites et minces aussi, en sont ordinairement
dures et rugueuses; elles croissent surtout dans les endroits marécageux.
Pakora est un hameau sur la rive gauche du Braldoh, la
seule halte que nous fassions sur cette rive jusqu’au glacier;
il faut donc traverser deux ponts de cordes, dont le second
demain. Dans ce village, un vieillard vint trouver Eckenstein,
qui se souvenait très bien de lui ; ayant fait partie jusqu’au
bout de l’expédition de Conway, il put nous donner quelques
détails inédits très intéressants sur la dernière partie du
voyage, dont la description quelque peu écourtée, spécialement
dans l’édition française, peut prêter à confusion.
Le septième jour
enfin après le départ
de Skardu, nous arrivons
à Askoley entre
une et deux heures
de l’après-midi. Je me
permets de transcrire
ici les notes ■ de mon
journal qui ont trait
à cette journée.
«Dimanche 25 mai.
— Temps couvert ;
pluie à midi et le
(92.) Pont de cordes, entre Pakora et Askoley.
soir, neige fraîche à
500 mètres au-dessus de nous ; nuit très fraîche, mais pas
encore de gel.
« Levés à 5 heures et quart. Déjeuné copieusement, et
partis à 6 heures et quart. Peu après Pakora, retraversé la
rivière sur un pont de cordes, moins long que le premier (60
mètres environ), mais plus détendu, partant plus mal commode
aux extrémités. — Traversé le village de Ghongo (prononcez
Tschongo) où se trouvent des moulins dénotant un
sens assez développé de la mécanique pratique ; ils sont
mus par une roue à axe vertical, sur lequel les palettes sont
insérées à 45 degrés ; l’eau arrive par un chenal formé d’un
gros tronc d’arbre creux, et incliné à 45 degrés également,