les longs poils grossiers sont mis à part pour des tissus
ordinaires, tandis que ce qui reste, trié encore à son tour,
donnera, une fois filé, un pashmina plus ou moins fin avec
lequel sont faits les tissus les plus précieux du Cachemire :
foulards, turbans, châles, tapis, dont le prix ne paraît plus
exagéré à qui est au courant de la somme de manipulations
et de travail inouïe qu’ils représentent.
La confection d’un châle de Cachemire, de dimensions
modestes, demande au moins six mois de travail à une famille
de huit ou dix personnes; un tapis exige trois ans et
plus d’un labeur assidu. Il est vrai que ces travaux d’art et
de patience, hors de prix, sont remplacés avantageusement
par des produits en laine moins fine, quelquefois même à
trame de coton, dont l’usage, sinon la: valeur, est pour le
moins le même ; le tout est de ne pas se laisser surfaire
par des marchands peu scrupuleux !
Les mosquées de Srinagar peuvent être visitées par les
Européens; il suffit d’enlever ses souliers. Quelques-unes,
malheureusement mal conservées, sont remarquables par
leurs colonnes en cèdre déodar et leur revêtement intérieur
en bois sculpté, dé-
licatementajouré en
fine dentelle, noirci
par le temps.
Les pagodes, par
contre, ne s’ouvrent
pas si aisément ;
quelques-unes sont
même soigneusement
et jalousement
closes aux non initiés.
(29.) 2°* pont, à Srinagar. L e S pO n tS SO n t
une des curiosités
spéciales au Cachemire : les piliers consistent en une espèce
— 5o —
de cage formée de troncs de pin entrecroisés et remplie de
grosses pierres qui servent à donner un poids suffisant
pour résister aux crues subites du Jehlum; ils sont réunis
par des poutres à peine équarries, superposées et de plus
en plus longues à mesure qu’on s’élève ; elles se rencontrent
avec celles du pilier suivant, pour former le tablier
du pont.
Il me reste encore à signaler les jardins flottants qui
(3o.) Jardins flottants aux environs de Srinagar;
abondent sur les lacs du Cachemire. Ces lacs, très peu profonds,
produisent en grande quantité une plante aquatique,
le « typha », dont les indigènes tirent parti de la manière
suivante : quand ils ont reconnu un endroit où le typha est
suffisamment dense, ils en découpent, à l’aide de longues
faucilles, une bande de deux à quatre mètres de large et
aussi longue que possible; puis ils la détachent en coupant
ou arrachant les tiges et les racines, et vont la juxtaposer à
un jardin flottant, la fixant au fond du lac par de longues perches;
le typha, quoique arraché, continue à croître, et forme