de glace recouverte d’une neige aussi mauvaise; ils s’y seraient
d’ailleurs probablement refusés, malgré la bonne
volonté dont ils étaient animés.
En attendant, voulant profiter des beaux jours, Pfannl et
Wessely s’offrent à remonter le glacier qui sort parlabrèche,
décidés que nous sommes à explorer complètement toutes
les voies d’accès au sommet avant d’abandonner le versant
au pied duquel nous sommes depuis un mois.
Knowles et Eckenstein, qui ont rejoint noire camp XI,
approuvent cette manière de faire, et, le 12 juillet, nos deux
camarades autrichiens
partent avec
cinq coolies dans la
direction du nord-
est , en pénétrant
dans le vaste cirque
susnommé. Ils
emportent de quoi
vivre pendant une
semaine et ont pour
mission de rechercher
un passage
assez peu incliné
(179.) Camp XII, le plus élevé connu, jusqu’à présent. pOUl’ permettre UUX
porteurs de gagner
le même replat à 7000 mètres dont l’accès serait si risqué
du côté du camp XI.
Le fond du cirque n’est distant de notre camp que de cinq
ou six kilomètres ; mais la neige, bien tassée au début, se
transforme en une farine sans consistance, où les hommes
chargés enfoncent parfois jusqu’aux genoux. Au bout de
cinq heures ils s’arrêtent au pied d’une série de couloirs
très rapides, séparés par de petites arêtes rocheuses. Nous
voilà donc en face de nouvelles difficultés : la varappe va
remplacer la neige à brasser et les marches à tailler. Nos
hommes seront-ils capables de transporter nos bagages en
escaladant des rochers? se comporteront-ils enfin de façon
à nous seconder et non à nous entraver?
Hélas! les questions que nos deux camarades se posent,
nous n’aurons pas même à les envisager. A peine Pfannl et
Wessely sont-ils partis, que le ciel s’est couvert de nouveau ;
dans la soirée, le vent d’ouest, qui avait fait trêve pendant
trois jours, se remet à souffler, en sourdine d’abord, puis de
plus en plus violent, prélude de la plus lamentable série
d’ouragans, de tempêtes, d’anarchie météorologique, que
Pandore ait jamais trouvée au fond de sa boîte. Du 13 juillet
au 19 août, date de notre retour à Askoley, nous n ’aurons
jamais trois jours consécutifs de beau temps, le vent du
nord ne soufflera pas un seul jour entier... Et ce n’est pas
ce qui nous attend de pire encore.
Nous recevons le 15 une lettre de Wessely demandant en
grande hâte le médecin pour Pfannl, gravement malade.
On décide de faire monter tous les coolies pour aider au
besoin à un transport, et le 16, à 6 heures, je prends les
devants, m’aidant des skvs qui, pour la première fois de tout
le voyage, rendent un signalé service. En moins de deux
heures, je parviens au camp XII et trouve Pfannl dans un
piteux état ; il n’a pas de fièvre, mais une expectoration rosée
de mauvais augure; le poumon droit est infiltré, mat à la
base et la respiration sous crépitante assez fine ; le poumon
gauche ne tardera pas à être pris aussi ; bref, bel oedème
pulmonaire, bien conditionné.
La hauteur du camp XII a été évaluée approximativement
à 21,000 pieds, soit à 6400 mètres. Avant tout, il s’agit de
quitter cette altitude incompatible avec une guérison rapide;
mais Pfannl est si abattu qu’il faut user de toute la persuasion
possible pour le décider à faire un effort et à se laisser
reconduire au camp XI. Avec les précautions voulues, on
parvient à l’habiller d’abord, à le faire lever ensuite; et,
pendant que les coolies empaquettent la tente et les bagages,