passer sur un pont de cordes cette malencontreuse rivière
de Punmah, affluent du Braldoh ; mais nos chicaris
affirment qu’en partant de bonne heure, avant que l’eau de
fonte ait grossi la rivière, tous nos coolies et le bétail pourront
passer à gué et gagner ainsi une journée de marche.
Quatre hommes sont envoyés le soir même pour reconnaître
le passage, avec mission de venir, aussi tôt que possible
le lendemain, nous renseigner. Leur rapport est favotons,
rabie et, pour décider nos porteurs, nous leur offrons de
leur payer la journée que nous gagnerons ainsi.
Pendant une heure environ, nous remontons la rivière,
en escaladant la paroi au pied de laquelle elle coule, puis on
arrive au bord du Pwvnicth. Le vieux chicari Salama, qui a
eu l’idée de ce gué et qui l’a expérimenté il y a huit jours,
traverse le premier en compagnie d’Abdulla, le plus beau de
nos coolies. C’est un spectacle vraiment grandiose que la
lutte de ces deux géants contre ces forces aveugles et inconscientes
; ils finissent par trouver les endroits les moins propour
fonds et nous nous lançons bravement à leur suite. Nos domestiques
et notre petit wazir grimpent sur le dos de quelque
coolie complaisant; mais ce mode de traverser nous répugne,
et nous préférons de beaucoup avoir à nous sécher pendant
une demi-heure plutôt qu’à nous débarrasser pendant une
journée entière de la vermine gagnée au contact de ces
braves gens ! Les premiers coolies qui ont traversé déposent
leurs charges et viennent chercher les chèvres et les mou-
(108.) Notre petit wazir n’aime pas se mouiller les pieds.
qu’ils transportent sur leurs épaules ; mais, lorsqu un
tiers du troupeau environ a ainsi passé, les autres moutons
se mettent à bêler d’une façon lamentable ; ce qu’entendant,
un de ceux qui sont déjà sur l’autre rive se met à courir, jusqu’au
moment où il se trouve dans un endroit où l’eau, dans
un des bras de la rivière, n’a pas plus d’un pied de profondeur
; il gagne ainsi un ilot en découvrant un gué bien moins
profond que le nôtre ; aussitôt tous les autres se précipitent
à sa suite et font mine de se lancer dans le bras principal, au
risque d’être entraînés et noyés; on put les rattraper à