Kohala est un joli village en étages, dont toutes les maisons
se touchent, et dont les toits plats servent de terrasses
aux habitations situées au-dessus. Un bon dak-bungalow
permet d’y passer une nuit assez confortable.
Dans tout le Cachemire, on construit en murs de pierres
brutes (des galets le plus souvent) reliées par de la terre
humide et rougeâtre qui sèche rapidement; l’habitation est
surmontée d’une terrasse, prolongée en un avant-toit supporté
par quelques colonnes en bois : durant la chaleur du
jour, la famille se tient sous cette véranda; on y prépare les
repas, on y sommeille, on y fume. Dans la partie supérieure
des vallées, les terrasses sont parfois remplacées par des
toits à deux pans très
inclinés pour permettre
l’écoulement de l’eau et
leglissementdelaneige.
Kohala est la dernière
localité du Pendjab
sur la route du
Cachemire ; on traverse
le Jehlum sur un nouveau
pont en fer, qui
en a remplacé un ancien
suspendu, dont les piliers
subsistent encore. De l’autre côté, la douane nous retient
assez longtemps.
Une fois débarrassés de cette corvée, nous nous abandonnons
au charme de cette très belle vallée. La route court
au fond d’une gorge très profonde et étroite, dominée par
des montagnes de 2500 à 3500 mètres, où la neige descend
encore jusqu’à la limite des forêts (3000 m. environ).
De temps à autre, la vallée,s’élargit un peu, et de nombreux
champs en terrasses, soigneusement entretenus et
irrigués, occupent alors tous les espaces où l’eau est susceptible
d’être arrêtée.
A Domel, la vallée tourne brusquement à l’est, et se
maintient dans cette direction jusqu’à Srinagar. En même
temps elle s'ouvre davantage ; les champs en terrasses se
multiplient sur un terrain d’alluvions souvent de plusieurs
centaines de mètres d’épaisseur, que ronge la rivière. Parfois
on traverse une ancienne moraine, rongée également par le
courant, et recouvertë de végétation depuis des siècles.
(i6.) Vallée du Jehlum, entre Uri et Rampur.
Les forêts deviennent plus touffues à mesure qu’on remonte
la vallée ; des vols de perroquets de toutes grosseurs
s’enfuient au passage des ekkas, remplissant l’air de leurs
cris discordants; des merles et des geais, aux couleurs plus
éclatantes que ceux de nos pays, cherchent leur vie dans les
champs, et retournent les pierres d’un coup de bec décidé,
pour surprendre les insectes.
Les pentes des montagnes sont couvertes d’innombrables
troupeaux de chèvres aux longs poils soyeux; plus haut, des