Le jour fixé pour le départ du palais Petrovski pour le Kremlin, des salves de
canon annoncent l’ouverture de la fête ; les cloches de l’église de l’Assomption sonnent
à toute volée et toutes les personnes qui doivent participer aux cérémonies du
couronnement se réunissent dans ce palais.
Lorsque tous les assistants ont pris dans la procession le rang qui leur est
assigné, le tsar monte à cheval, la tsarine et les altesses prennent place dans des
voitures de gala, et le cortège, sur un signe donné par le ministre de la cour Impériale,
s’ébranle.
Le carrosse qui transporte la tsarine pendant les fêtes du couronnement est
celui que Frédéric le Grand offrit à l’impératrice Elisabeth Petrovna. Ce carrosse
est remarquable non seulement parce qu’il a coûté un million de roublès, mais par
le fini artistique de certains détails. La décoration en est très élégante ; le dessus est
couvert de velours.cramoisi, orné de broderies d’or et d’une couronne qui repose
sur un coussin de velours orné d’énormes perles précieuses et agrémenté d’or; dans
les coins, quatre aigles d’or aux ailes déployées.- Le dos est couvert de velours de
même couleur et de broderies d’or. Les côtés sont dorés et ornés de fleurs d’or.
Les portières sont surmontées d’aigles. Les roues et les ressorts sont dorés et ornés
de ciselures et de figures d’or.,
La voiture est énorme, mais .les grandes fénêtres qui la rendent transparente
lui donnent beaucoup de légèreté et font illusion sur ses proportions. L ’attelage se
compose de quatre paires de pur sang tout blancs,- dont les longues guides’sont
réunies dans les mains du cocher.
Des valets de pied tiennent chaque cheval par des brides d’or. A côté de la
voiture, à droite, se tient le grand écuyer à cheval; des deux côtés, des cosaques de
la cour en grand uniforme et, derrière la voiture|,^ix pages de la cour.
Soixante et onze coups de canon saluent la tête du-cortège, et le général gouverneur
de Moscou, entouré d’adjudants en brillants uniformes, vient s’incliner
devant l’empereur et prendre place dans le cortège.
Arrivés à la porte Voskressenski, le tsar et les grands-ducs mettent pied à terre
et la tsarine et les altesses descendent de voiture. Tous, conduits par le premier
vicaire moscovite; un archevêque, pénètrent dans la chapelle de la Viergé1 de
Saint-Yver.
Nous avons déjà dit quelle est la multitude des églises à Moscou ; on comprendra
que le cortège impérial, qui fait une pause devant toutes les chapelles qui se
trouvent sur son itinéraire, mette un temps considérable à franchir la distance qui
sépare le palais Petrovski de l’église de l’Assomption.
Quand le tsar entre dans la cathédrale de l ’Assomption, on tire encore quatre-
vingts coups de canon, et pendant ce temps toute la famille impériale reste en prière,
prosternée devant les icônes.
De la cathédrale de l ’Assomption le cortège se rend à la cathédrale d’Arkhangelsk,
:0Ù de nouveau la famille impériale rend hommage aux reliques et aux
sépultures de ses aïeux.
G’est après cette cérémonie que le tsar, avec tout son cortège, pénètre dans
l ’enceinte du Kremlin, pendant que des salves de cent un coups de canon signalent
son entrée.
D’ailleurs, toute la journée, à partir de ce moment jusque tard dans la nuit, les
cloches de Moscou carillonnent sans trêve. Le soir, toute la ville est illuminée, à
l’exception du Kremlin. A dater de ce jour, jusqu’à celui désigné pour le couron-
Moscou .' — L'église et la place Saint-Basile.
nement, on fait annoncer aux habitants de la ville l’heureux événement qui se
prépare.
Les hérauts et les maîtres de cérémonie ont à la main des sceptres. Les chevaux
sont pur sang et recouverts de riches caparaçons.
La première proclamation a lieu dans la Cour du Kremlin ; les trompettes
sonnent au champ, et un secrétaire du Sénat la lit à haute voix au peuple
rassemblé.
Par cette proclamation, le tsar annonce à ses sujets qu’étant monté sur le trône
de Russie par la mort de son père, il se fera, couronner tel jour avec son épouse
dans la cathédrale de l’Assomption. Dès que le secrétaire a terminé sa lecture, les