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 humaines  dans la béatitude  du  sacrifice accompli.: 
 L ’oeuvre  maîtresse  de  la  cathédrale  Saint-Vladimir  est  un  vaste  tableau  
 de  la  sainte  Vierge,  de  quinze mètres de hauteur,  peint  sur  la  partie  supérieure du  
 mur,  derrière  l’autel. 
 Sur  la  tête  de  la  Vierge  s’étend  un  ciel  froid  d’hiver  russe,  qu’éclaire  une  
 lueur  d’aube  voilée  à  travers  laquelle  les  étoiles  ont  des  scintillements  de  neige;  
 de  courts  et  denses  nuages noirs  supportent  la  madone  debout,  vêtue  de sombres  
 draperies  flottantes;  le  mouchoir  qui  recouvre  ses  cheveux  et  une  partie  de  son  
 front  encadre  un  visage  régulier  de  paysanne  russe,  un  nez  fin,  une  bouche  douloureuse  
 d’un pli  noble  et pur,  et  de grands  yeux  sombres pleins d’une tristesse à la  
 fois  résignée  et  consciente  de  la grandeur sublime de  son  sacrifice.  Elle  tient  entre  
 ses  bras  un  enfant  robuste,  qui,  dans  une  extase  sereine  et  grave,  tend  les  bras  
 devant lui,  comme s’il  voulait embrasser le monde.  C ’est  le Christ qui va  s’immoler  
 pour  le  salut  des  hommes  et  dont  le  geste  large  semble  vouloir  étreindre  tout  
 l’univers  dans  un  élan  d’amour;  c’est  la  sainte Vierge  qui  porte  au  calvaire  son  
 fils  et son  amour  de mère. 
 Non  loin de  là,  sur un  des murs  de  l’autel,  sont  peints lès  saints de  là Russie,  
 de  grands  vieillards  à  barbe  blanche,  majestueux,  sévères,  et  qui  pourtant  
 attirent,  comme  le  grand-père  vers  qui  le petit  enfant  court  avec  confiance.  Le  
 regard  est  grave,  mais  bon,  leurs  visages  sont  maigres  et  ridés,  mais  purs,  leurs ,  
 corps  sont  vigoureux,  leur charpente  puissante,  leurs  bras  forts ;  pourtant  on  sent  
 qu’on  est  en  présence  d’êtres  d’élite. 
 D’après M.  Diedloff, personne  n’a encore atteint dans l’expression de  la  sainteté  
 le même degré  de perfection que Wassnetzoff. 
 « Jusqu’ici, dit-il, On  a  cherché  à rendre  la sainteté parla beauté du visage, par  
 la  délicatesse du corps et du teint, par la  douceur  du  regard.  Wassnetzoff a procédé  
 autrement;  ses  saints ont des  têtes  de  vieillards  comme  on  en  voit  tous  les jours,  
 des yeux affaiblis, des mains desséchées; mais ils  sont éclairés  par une  lumière  intérieure  
 si  intense qu’on  s’incline  devant  eux  comme  devant  des  êtres  supérieurs.  » 
 Sur  les  colonnes  qui  séparent  la  nef principale  des: nefs  latérales,  sont  représentés  
 douze  saints  russes,  une galerie  de  types  nationaux  fort  bien.compris  et  
 pathétiquement  rendus.  C’est  d’abord  Procope  l’Innocent,  tout  nu,  en  haillons,  
 les  yeux chassieux et malades ;  il  pleure amèrement.  Cette  figure  évoque  toute'une  
 époque  de  la  vie  russe;  on  revoit  les  cruautés  d’Ivan; le  Terrible,  l’invasion  des  
 Tatars,  les  violences  qui  ont  accompagné  les  réformes  de  Pierre  le Grand  ;  enfin,  
 les  chaînes  du  -servage.  Le  même panneau  offre aux  regards  le  portrait  de  deux  
 saintes,  les  princesses  Éphrosine  et  Eudoxie ;  comme  dans  toutes  les  peintures  
 religieuses  de Wassnetzoff,  ces femmes,  bien  que  leur  corps  soit nettement  dessiné  
 semblent incorporelles;  ce corps  est muet,  l’esprit  seul parle;  -