fouilles de Kertch, l’ancienne Panticapée, et d’autres villes du Pont-Euxin où
fleurirent des colonies grecques, ont enrichi le musée de l’Hermitage d’un trésor
composé d’une' fople de ces ornements antiques d’une fantaisie et d’un, goût
exquis, sans compter leur immense valeur en tant que documents historiques.
C ’est dans le musée de l ’Hermitage qu’on peut voir le fameux vase de Cumes,
qui s’est conservé depuis deux mille ans dans toute la pureté de sa forme et de ses
couleurs merveilleuses, puis les superbes marbres de Hbudon, entre autres le buste
de Voltaire qui a déjà sa légende, et enfin la galerie consacrée à Pierre le Grand.
Pourrais-je jamais détailler tout ce que ce musée contient de précieux et de
nécessaire à connaître pour quiconque veut s’initier à l’histoire de l’art ? En le créant,
Catherine II a réalisé le rêve de Pierre le Gran d,|a r depuis cè jour l’Europe artistique
ne peut pas plus se passer de Saint-Pétersbourg que de Florence ou de Munich.
Si l ’on passe la Néva, on trouve dans l’île Vassili le musée de l ’Académie des
beaux-arts, qui contient une collection de premier ordre de toiles de maîtres
français; il me suffit de citer les noms d’Ingres, de Scheffer, de Delacroix, de Millet,
de Courbet et de Meissonier, Ceux qui s’intéressent à la peinture russe trouveront
dans l’Académie une galerie d ’antiquités russes nécessaire à l ’étude des deux
grandes écoles de 1 art ancien de la Russie, celles de Novgorod et de Moscou.
L ’île Vassili est en quelque sorte le quartier latin de Saint-Pétersbourg, c’est
là que se trouve l’université ; mais comme ces rues tirés au Cordeau et cette jeunèsse,
plutôt grave et soucieuse, généralement pauvre, vêtue d’uniformes, diffèrent ,de la
joyeuse population du « Boul’ Mich’ »! A la place des brasseries et des cafés qui
envahissent gaiement le trottoir et la fontaine de l ’archange terrassant le dragon,
les étudiants de l’île Vassili peuvent contempler deux immenses sphinx de granit, ’
apportés d’Égypte sous le règne de Catherine, puis le pont Nicolas qui relie l ’île à
la ville, ainsi que la chapelle du saint du même nom, représenté en mosaïque sur
le mur du fond, chapelle dans le genre de celle du Gostini-dvor, et qui serait à
sa place à Moscou, mais qui détonne placée dans le coeur même de la cité toute
moderne de Pierre le Grand.
Si l’étudiant ne passe pas jÿ pont, mais regarde en amont du fleuve, il voit la
forteresse de Pierre et Paul, qui sert aussi de prison politique surtout préventive.
Mais voici, tout auprès, un gage de vie, de force et d e développement, c’est la
petite maison de bois qu’habita Pierre le Grand et que Catherine II eut l ’heureuse
idée de conserver dans une sorte d’écrin de pierre, comme un joyau précieux ;
une partie de la maisonnette est restée dans l’état où elle se trouvait, lorsque le
grand tsar y élaborait ses projets d’une renaissance russe ; car Pierre croyait fermement
que, lorsque la Russie serait mise en contact direct avec l’Europe, , c’est à
elle qu’incomberait la mission de reporter la civilisation dans son antique foyer
la Grèce.
Dans cette maison, où tout respire le génie du grand réformateur, le jeune
Russe d’aujourd’hui peut puiser le courage et l’orgueil. Quand une nation, en
moins de deux siècles, a pu si victorieusement sortir de la torpeur asiatique, montrant
sans cesse son désir de se perfectionner, elle a le droit de regarder l’avenir
avec confiance : rien ne saurait entraver son évolution.
Outre les. îles dont j’ai déjà parlé, la villégiature de Saint-Pétersbourg s’étend,
en été,îîfùsqu’à Oranienbaqni|'- Péterhoff, Gatchina, Pavlovsk et Tsarskoé-Sélo,
fondées, les unes par Pierre le Grand, les autres par ses successeurs ; elles forment
aujourd’hui des villes, pour la plupart des imitations de Versailles, de Marly, de
A P é t e r h o f f . — La Fontaine de Neptune au Jardin supérieur.
Trianon, mais d’un Versailles vivant, où l’on ne va pas uniquement chercher des
souvenirs lointains, mais où l’on péut entrer dans le palais d’un empereur régnant.
Alexandre III avait une prédilection pour Gatchina, sans doute parce que
déjà les Novgorodiens, compatriotes de Sadko, avaient en cet endroit un comptoir
khotchivo, qui fut. conquis par les Suédois et repris beaucoup plus tard par
Pierre le Grand. Le palais de Gatchina, construit par Rinaldi, passa de main en
main et fut, pendant quelque temps, le séjour du célèbre Grégoire Orloff, qui y
éleva un obélisque. Le tsar Paul Ier Voulut ressusciter à Gatchina l’ordre des
chevaliers de Malte, qu’il réunissait en assemblée dans un couvent élevé sur une
des îles des lacs. C ’est le site le moins pittoresque des environs de la capitale.
Tsarskoé-Sélo, qu’affectionne l’empereur Nicolas II, est plus varié et plus beau.
Le palais, élevé par Rastrelli, malgré sa façade basse et étendue, ne manque pas