« Un vieux chateau se dresse sur le rocher; en bas la petite rivière roule ses eaux.
“ b ans *e vieux château, la jeune et belle Domnitza pleure et se lamente. Son
mari est allé à .la guerre avec' ses troupes. II y a longtemps qu’il est parti, et eiie|
n’a pas reçu de ses nouvelles, elle pleure toujours et ses yeux brillent comme le
« ne m’oubliez pas » sous la rosée.
«■Une autre Domnitza la contemple, la caresse et la console. Minuit.sonne. On
frappe à la porte du château et une voix crie : — C’est moi, ma mère, ton (iis,
Stephan, jè reviens blessé de la bataille ; le bonheur nous a trahis cette fois; notre
armée battue est dispersée. Ouvrez plus vite la porté, car les Turcs sont sur nos
talons.
« La jeune Domnitza court vers la fenêtre.
* — Pourquoi vas-tu là ? demande la vieille femme.
« Elle s’approche elle-même de la croisée et crié ces paroles aux vaincus :
« — Mon Stephan est. loin d’ici ! Il porte mille coups dé mort à sçs ennemis.
Je suis sa mère et il est l’orgueil de ma vie ! Si tu étais vraiment mon fils, mon
grand Stephan, tu ne serais pas revenu ici dans ce-château, témoin de tant d’actes
héroïques, sans lauriers et sans gloire. Cours te battre pour ta patrie, ^courll
mourir pour elle, que je puisse au moins semer ta tombe de (leurs.
" Le voyageur rebrousse-chemin. Il sonne le cor et l ’armée dispersée se rallie
autour de lui.
“ 11 fond avec fureur sur les Turcs et les étend comme lafaux en été couche
les épis.- »
La légende ajoute qu’après la victoire, Stephan courut porter la nouvelle à sa
mère, mais qu’il la trouva morte de douleur.
Sur le Dniester.
La Gare d’Odessa.
O D E S S A
XI
La baie d’Odessa. — Origine du nom de cette ville. — Richelieu et Längerem. — Worontzofl.
Pouchkine à Odessa. — Le port d’Odessa.
Od e s s a est à quarante kilomètres d’Akkerman, etquélle différence !
Odessa est sur les bords d’une vaste baie formée par la mer N oire et qui décrit
une courbe semi-circulaire. Cette baie empiète sur le rivage de trois kilomètres et
demi et s’étale sur une étendue de huit kilomètres.
Il y a trois ans, Odessa a célébré son centenaire et la reine de la mer Noire,
la Palmyre russe, a pu affirmer avec éclat la toute-puissance de la paix faisant,
dans l’espace d’un siècle, d’un désert aride un des centres du commerce et de
l’industrie de l’univers.
Après la célèbre paix de Kaïnardji, en 1714, les vaisseaux marchands russes
obtinrent le droit de libre passage dans les eaux de la mer Noire et des Dardanelles.
La Russie ne possédait pas de port sur la mer Noire. Catherine II ordonna
en 1778 de fonder la ville de Kherson sur la rive droite du Dniéper, à soixante-dix
kilomètres de son embouchure. Grâce aux privilèges que l’impératrice octroya à cette
ville, de nombreux étrangers y affluèrent et établirent des relations commerciales
avec Constantinople, l ’Archipel, Marseille, Livourne et Trieste. Au bout de peu de
temps ce port parut défectueux ; beaucoup de vaisseaux ne pouvaient remonter
le fleuve jusqu’à Kherson et devaient, jeter l’ancre à trente kilomètres de la ville.