natures turbulentes. Ils font peu de cas du commerce et de l’industrie, mais ils
sont passionnés pour le plaisir et montrent beaucoup de violence dès que leurs
passions sont éveillées. Dans leurs danses, 'en chantant à table, dans leurs discussions,
ils s’abandonnent toujours à dès excès. Ils sont braves, généreux et
hospitaliers. »
A mesure que la Russie entrait dans le courant de la civilisation européenne,
l’existence des Cosaques se voyait menacée. Ils luttèrent courageusement pour
défendre leurs anciennes libertés. Les Cosaques du Jaik et du Don, les Zaporogues
du Dniéper résistèrent avec une intrépide énergie.
Sous Catherine II la Grande, un Cosaque du Jaik, Emilian Pougatchew,
s’insurgea et réussit à se faire passer pour Pierre III et à grouper autour de lui
plus de 10,000 hommes. Les troupes que le gouvernement envoyait pour le combattre
passaient aussitôt à l’ennemi, en lui livrant leurs chefs. Pougatchew faisait
pendre les officiers et enrôlait les soldats. Il recrutait à chaque pas des adhérents
dans le peuple et donnait satisfaction à ses ressentiments contre ses maîtres en
faisant pendre les seigneurs. Il réussit à s’emparer de plusieurs villes importantes
sur la Volga, et ses rangs s’augmentaient sans cesse de nouvelles recrues.
Le général Alexandre Bibikoif, envoyé contre lui à Kazan, s’écria :
— Ce n’est pas Pougatchew qui est important, c’est le mécontentement général.
Pougatchew n’est qu’un épouvantail que font mouvoir les Cosaques.
Bibikoif craignait à chaque instant une défection de ses troupes ; il attaqua
pourtant le rebelle et le battit dans deux rencontres à Tatitchéra et à Kargoula. Il
mourut avant d’avoir pu s’emparer de Pougatchew. Les lieutenants Michelson et
Collonges poursuivirent le faux Pierre III et l’acculèrent sur la Volga, mais celui-ci
trouva moyen de leur échapper en remontant le fleuve ; il se jeta sur Kazan qu’il
livra aux flammes et au pillage; après une défaite devant le kremlin de cette ville,
il ne se tint pas pour définitivement vaincu et battit en retraite vers le Sud, suivi
de très près par ses ennemis. Il trouva moyen de s’arrêter à Saransk, à SamaTa
et à Tsaritsyne, d’y pendre les impérialistes qui s’y trouvaient et de changer les
municipalités.
Au moment où il allait passer la frontière de la Perse, il fut cerné entre le Jaik
et la Volga par Michelson et Souvaroif. Les complices de Pougatchew le trahirent.
Il fut ramené à Moscou qui était sur le point de se soulever. Pougatchew fut roué
v if en présence du peuple ; la terreur calma un peu l’effervescence de la capitale
moscovite, sans étouffer l’esprit de rébellion qui s’était emparé d’elle.
Le supplice de Pougatchew ne calma pas le ressentiment de Catherine II ; elle
voulut effacer jusqu’au souvenir de cette révolte, en supprimant la république des
Zaporogues et en les obligeant à changer le nom de leur rivière, le Jaik. Cette
tribu, refoulée toujours plus vers l’Asie, fut dès lors désignée sous le nom de
Cosaques de la mer Noire.
Ce n’ était pas la première fois que les Zaporogues se voyaient expulsés de
leur territoire. Déjà sous Pierre le Grand' ils en avaient été bannis et ne purent
y rentrer que sous le règne de l’impératrice Anna Ivanovna. Ils furent très mécpn-
tents, à leur retour d’exil, de trouver leurs steppes sauvages transformés en champs
cultivés, et ils s’appliquèrent à susciter toute sorte de désagréments aux nouveaux
colons.
Ils demandaient qu’on leur rendît leurs vastes prairies en friche. Potemkin,
fatigué de leurs réclamations et indigné de les voir s’opposer à toute tentative de
civilisation, envahit un beau jour leurs villes*
et leurs campements et contraignit les plus turbulents
à chercher un refuge sur les terres du
sultan. -
Les autres reçurent, en 1792, l ’ordre d’habiter
l’île de Phanagorie et la rive orientale de
la mer d’Azoff.
La révolte de Pougatchew fut le dernier acte
de protestation des Cosaques contre la souveraineté
de la Russie. Le gouvernement du tsar
eut l’idée de tourner au profit des armes russes
les qualités belliqueuses des Cosaques et leur
adresse incomparable à monter à cheval.
Ils fournissent aujourd’hui à l’armée russe
une cavalerie qui est sans rivale en Europe.
Les Cosaques ne forment pas une armée
Pougatchew.
régulière et conservent dans leur vie sociale
beaucoup de coutumes qui rappellent leurs
anciens* privilèges. Ils ne payent pas les mêmes impôts que les autres sujets du
tsar; ils ont leurs juges et leurs Conseils généraux; ils ne tirent pas au sort comme
tous , lès Russes, mais s’engagent à fournir, chaque année, un nombre déterminé
d’hommes et de chevaux, soit pour le service des frontières russes, soit pour celui
de [’intérieur. A l’exception du colonel qui est nommé par le ministre de la
guerre, les Cosaques ont le droit d’élire eux-mêmes leurs chefs.
Depuis la soumission de ces rudes enfants du steppe, il est de règle que
l’héritier du trône, à sa majorité, prenne le nom de leur ancien chef, hetmán de
tous les Cosaques du Don, et ailie recevoir les' insignes de sa nouvelle charge
parmi eux.
Le Cosaque est tenu de fournir lui-même son cheval et ses armes ; en revanche,
il reçoit du gouvernement une concession de terrain qui est augmentée à la naisr-
sance de chaque fils.
Les moeurs, les goûts et les habitudes de ces nomades aventureux n’ont guère