Tout auprès de ces travaux cyclopéens on admire des ornements de toute
sorte, de fines dentelles en fer et de menus objets, comme des chaînes mignonnes,
fermées par des cadenas microscopiques et des breloques.
Celui qui désire se faire une idée des services que le fer rend à l’homme fera
bien d’aller à la foire de Nijni, il comprendra l’importance du rôle que ce métal
joue dans la civilisation.
Chaque riad offre de l’intérêt parce qu'il a sa physionomie particulière, bien
distincte de ce que nous voyons en Europe.
Rien de plus original, par exemple, que le riad des chevaux: où toutes les
espèces chevalines de l’Asie sont représentées. Les petits chevaux des Kirghiz sont
remarquables par leur sensibilité et le sentiment fraternel qui les unit. Quand on
vend un cheval kirghiz, il faut user de ruse et de brutalité pour l’arracher à ses
compagnons, qui courent à sa défense et poussent des lamentations douloureuses
à entendre. On admire à Nijni les agiles petits chevaux cosaques, au regard si doux,
à côté des fougueux coursiers des Turcomans et du pur sang arabe.
Il ne faut pas que le voyageur flâne trop longtemps dans un de ces riads s’il
tient à parcourir toutes les « villes.» foraines de Nijni.
Un mois est bien vite passé, et quand les derniers jours de septembre seront
venus, toute cette foule hétérogène, arrivée de toutes les contrées du monde, se dispersera
aussi subitement qu’elle a surgi. Bientôt, à la poussière étouffante qui enve-"
loppe la ville foraine, à tout ce bruit et à ce mouvement qui la font vivre pendant
quelques semaines d’une existence fiévreuse, vont succéder le silence, ,1’imm obi 1 ité.
Pendant onze mois, là nouvelle Nijni est une ville morte.; et le touriste qui
traversera le pont désert de l’Oka n’entendra dans la plaine morne que les voix
plaintives de la rivière et du fleuve, qui semblent pleurer les beaux jours où elles
disparaissent sous une écharpe diaprée de banderoles, et où leur confluent devient
la jonction de deux mondes, l’Orient et l'Occident.
Bien que la foire ait un caractère nettement oriental qui lui prête une grande
originalité, elle ne rappelle plus en rien les grands bazars et caravansérails du Caire,
de Damas, ou même de Constantinople; le lien avec l ’Asie est rompu pour toujours.
La physionomie de l’ancienne Nijni ne se retrouve plus que dans les ports.de.
la foire. Là la Volga et l’Oka coulent aussi librement qu’à la création du monde;
personne ne tente même de lutter contre les caprices du fleuve, soit qu’il charrie
du sable ou qu’il emporte une partie de la rive; les quais sont un raffinement inconnu;
des centaines d'embarcations, vaisseaux, vapeurs et barques, chargent et déchargent
paisiblement sur le sable ou sur les rives argileüses.
Il est très rare de voir sur les quais de Nijni une grue pour décharger les
marchandises; les dos solides des krioutchniki (hommes-crochets). y suppléent
largement. Un édifice de pierre ou de fer est exceptionnel dans ces ports où l’on
ne voit rien que des isbas ou d 'es baraques de bois. Ici s’est conservée la vieille.
A l a f o i r e d e N i jn i - N o v g o rod. — L e Pavillon central.