seigle, avoine, froment, venant de tous les gouvernements qu’arrose la Volga; en
outre, Samara, Perm, Tamboff envoient à Rybinsk du lard en immenses quantités.
Viatka, Kazan et Perm lui expédient du bois de construction pour vaisseaux ;.
Pensa, Tamboff et Nijni-Novgorod lui fournissent de l’eau-de-vie de blé. Enfin, il
reçoit aussi d’Orenbourg le fer, le cuivre et de la quincaillerie. Rybinsk possède
une des plus grandes fabriques de cordes de la Russie.
Aucun pays ne produit autant de chanvre, ni de si bonne qualité que la
Russie; c’est surtout l’Angleterre qui l’achète et fabrique elle-même les cordes dont
elle approvisionne le marché du monde. Les négociants de Rybinsk aiment encore
à traiter les affaires à l’ancienne mode asiatique, sur la place publique, au milieu
des ouvriers, dans les traktirs, en sirotant le thé ou en mangeant le balik, le dos
d’esturgeon essoré, arrosé d’eau-de-vie.
Aussi la Bourse de Rybinsk, superbe édifice d’où l’on a une vue admirable
sur la Volga et son afflüent la Cheksna, est-elle le plus souvent déserte, à moins
qu’elle ne serve de théâtre pour dés troupes de passage, pendant que les commerçants
débattent ailleurs leurs affaires.
Bien que Rybinsk soit une ville très riche, elle présente des rues malpropres
et ignore le confort. En été, les quais sont remplis de mendiants attirés là par
l’habitude qu’ont les marchands russes de faire libéralement l’aumône les jours de
fête. L ’agglomération passagère d’un si grand nombre d’ouvriers et d’employés
amène l’encombrement, la saleté et des odeurs nauséabondes dans la ville; les
pavés n’y sont guère en honneur, les bonnes auberges manquent, et il est évident
que les habitants de Rybinsk sont encore indifférents aux progrès qu’une ville
européenne de cette importance aurait déjà réalisés depuis des années.
Pourtant cette ville, qui n’était au siècle passé qu’un ^village de pêcheurs,
occupe depuis qu’elle est devenue le centre du commerce de la Volga une place
égale à celle de Nijni-Novgorod ou d’Astrakan. Au moyen du canal Alexandre
de Wurtemberg, Rybinsk unit là "région de la Volga à Arkhangel et à la Dwina du
Nord, et l’on peut dire que toutes les richesses de la Russie passent par cette ville
pour aller se répandre dans tous les coins du vaste empire ; c’est la dernière station
commerciale de la Volga et la plus'importante des routes de Moscou et de Saint-
Pétersbourg.
Après Rybinsk, le plus grand centre est Nijni-Novgorod, très pittoresquement
située sur la rive droite du grand fleuve, à la jonction de l’Oka. C ’est dans l’estuaire
formé par la rive gauche de l’Oka et la rive droite de la Volga qu’a lieu la fameuse
foire qui forme comme une ville à part, avec ses églises et ses temples pour les
différents cultes, son grand Gostini-dvor, sorte de Bourse russe, la maison du
gouverneur, le théâtre ët les nombreux édifices de pierre et de bois. Un peu plus
loin, en remontant l’Oka, on arrive à Kounavino, un faubourg où les innombrables
visiteurs de la foire trouvent l’hospitalité.
La fondation de Nijni-Novgorod remonte à la fin du xne siècle; au temps de
la Russie féodale, c’était une capitale rivale de Moscou. Longtemps après que
celle-ci l’eut détrônée, elle conserva encore une grande importance politique et
commerciale; son kremlin, élevé dès i 3o8, faisait de Nijni-Novgorod une des plus
importantes forteresses de la Russie; la citadelle regardant le Nord et la Volga était
formidablement fortifiée, car c’est de ce côté que venaient toujours les attaques des
Tatars. A la fin du xvne siècle, Nijni-Novgorod occupait, si l’on se base sur les
revenus des villes, le sixième rang en Russie et exerçait une influence prépondérante
sur les régions de l’Est et du Sud-Est, qui devaient se soumettre à elle pour
entrer en relations avec Moscou et Saint-Pétersbourg.
Enfin, en temps de troubles, avant l’avènement des Romanoff, lorsque Moscou
était entre les mains des Polonais, les habitants de Nijni-Novgorod, obéissant à
l’appel d’un simple citoyen, Minine, et sous le commandement du prince Pojarski,