— Grand merci, répondit le voyageur; mais quelle est l’origine de cette coutume
? Il y a ici au moins huit cents traîneaux; si l’on,en renvoie sept cents, cela
fera une dépense de soixante-dix roubles, c’est une somme?
C ’est l’habitude de temps immémorial; puis il faut bien que ces gens-là
puissent manger aussi?
Pendant cette conversation, ,oii discutait dans la foule combien il fallait laisser
d’acheteurs pour les dix atamans sortis. Ces gens connaissaient très bien le degré
d’habileté des pêcheurs et savaient approximativement combien il y aurait de
poissons; ils décidèrent que quatre-vingts acheteurs, seraient suffisants. On les
nomma en tirant au sort ; tous les traîneaux occupés, fût-ce par une fillette de
quatre ans, reçurent dix copecks, les traîneaux vides perdaient seuls leur droit à
un dédommagement.
- - r Je voudrais aussi acheter du poisson, dit M. Yakouchkine à son guide.
I l l l l C ’est trop tard, il fallait y penser avant qu'on ait tiré au sort; maintenant
les pêcheurs ne t’en vendront pas pour n’importe quelle somme ;
ils n’ont plus le droit de le laisser acheter par d’autres que ceux qui ont été
désignés.
¡ K l l Mais si ces acheteurs ne donnent pas la somme fixée par l’ataman ?
- . — C’est égal, pendant quarante-huit heures le poisson restera-sur place ; ce
n’est que le troisième jour qù’on peut le transporter ailleurs pour le vendre, mais
il n’a plus la même valeur.
:;v Pourtant, ces acheteurs, qui sont au nombre de quatre-vingts, ne sefont-ils:
pas concurrence ?
— Oh ! non, ce n’est pas permis, chacun prend une part égale de la pêche et
c’est pourquoi ils ont tous tiré au sort.
M. Yakouchkine et son guide durent parcourir encore deux kilomètres sur la
glace pour rejoindre les pêcheurs qui avaient déjà donné leur premier coup de filet
et se préparaient pour le second.
Tous les pêcheurs firent ensemble deux kilomètres, puis subitement le premier
ataman tira à droite, et le second à gauche, tous les deux suivis par leurs hommes.
Lorsqu’ils furent à un demi-kilomètre l’un de l’autre, le premier ataman frappant
là glacé de son slivalo, sorte de pelle avec un filet au bout, dit- : V
gMgil Stop, c’est ici-!
Immédiatement les pekhars, au moyen de barres de fer, pratiquèrent une
ouverture d’un mètre carré; mais l’atamanTla jugea insuffisante et donna l’ordre de
l’agrandir de deux mètres .de longueur et d’un quart de mètre de large, afin que le
trou prît la forme d’une pelle. Aussitôt l ’ataman enfonça dans l’ouverture sa relie,
un long bâton auquel est attachée une corde , grosse comme le pouce ; en même
temps les rellchiks enfoncèrent leurs bâtons et, l’un à droite, les autres à gauche,
plongèrent le filet sous la glace. Le second ataman accomplit avec ses hommes les
MOYEN IN GÉNIEUX DE SO U F F L E R LE FEU DU SAMOVAR.