C r i m é e . — La fontaine Rachel à Goùrsouff.
formément grise et presque toujours
houleuse.
Les douze kilomètres qui séparent
Yalta de Goursouff offrent les plus
beaux sites de la rive méridionale ;
si Goursouff n’est pas le plus joli coin
de la Grimée, il est certainement le
plus chaud et offre la plus confortable
station d’hiver. Le paysage n’y est pas
aussi fini, aussi complet que celui de
Yalta et d’Aloupka.
De la fenêtre d’un très bel hôtel
d’étrangers, élevé par un richissime
roi des chemins de fer, M. Goubo-
nine, on découvre la vaste mer, avec
le mouvement des bateaux qui passent
au loin, et les oiseaux marins
qui .volent en longues bandes, rasant
l’eau de leurs ailes. Plus près, les
jardins et les forêts, ce qui donne à tout
ce tableau quelque chose d’achevé et de
fini. Ce point de vue est surtout beau
par une claire journée, quand sur le
fond bleu du ciel les montagnes se dessinent
dans leurs moindres détails avec
leurs reflets changeants aux vives couleurs.
La vieille ville de Yalta est tout à
fait asiatique et ne présente rien de beau
ni d’original. La nouvelle ville est très
coquette, semée de villas d’architecture
variée, et domine une baie gracieusement
arrondie. En été, les teintes de la
mer sont admirables, passant du bleu
saphir à des tons d’or et de nacre rosée,
parcourant toute la gamme des nuances.
En automne et en hiver, elle reste uni-
"ontuine de la Nymphe à Goursouff.
montagnes descendent en pentes douces, couvertes de verdure et de vignes
pourpres, dorées ou bronzées. Sur ce fond diapré se profilent sévèrement des
cyprès et s’étalent des platanes.
Ces parcs abondent en allées de lauriers-roses, de myrtes, de bosquets d’oliviers,
de magnoliers, de chênes d’Italie éternellement verts, de palmiers espagnols,
de marronniers, de grenadiers, d’acacias blancs ou jaunes et d’agaves. Quant aux
C r i m é e . — La fontaine « la Nuit » à Goursouff.
roses, dont on compte plus de cent Cinquante variétés à Goursouff, elles se
sentent chez elles.
Parmi les arbres, on en remarque encore plusieurs que Pouchkine a admirés
en 1820, entre autres un cyprès dont le poète a dit : « A deux pas de ma maison
se trouve un jeune cyprès, chaque matin je lui rends visite et je me suis attaché
à lui par un sentiment voisin de l’amitié. » Maintenant le jeune cyprès est devenu
un arbre énorme ; il a l’âge qu’aurait aujourd’hui le poète, et il vivra encore
bien des siècles pour rappeler aux générations futures qu’il a été aimé par le
chantre dOnéguine*