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Nous nous hâtâmes d’entrer dans la maison,
mais l’intérieur étoit loin de répondre à ce
que promettoient les dehors, tout étoit sâle
et dans le plus grand désordre. La chambre
où l’on nous introduisit, étoit à la fois une
chambre à lit et la salle des buveurs; le plancher
étoit percé de larges ouvertures, la
moitié des vitres de la fenêtre étoit brisée,
et des courants d’un air glacial pénétroient
de toutes parts. C’est là pourtant que nous
trouvâmes M.r Cowie, notre hôte, occupé
à vider une bouteille de whisky avec le Docteur
de l’île qui faisoit la tournée de ses malades.
Ce dernier que nous avions déjà vu
à Brodick, avoit prévenu Cowie de notre arrivée
; aussi dès qu’il nous vit, il se leva et
vint d’un air rayonnant de joie nous demander
à voir nos minéraux, et sans songer
à nous faire préparer du feu et des ali-
mens, il commençoit déjà une dissertation
géologique.
Il n’y avoit rien dans la maison, il fallut
envoyer bien loin chercher de la tourbe.
Une vieille femme qui désiroit nous traiter
avec distinction, se donnoit un mouvement
incroyable, montoit et descendoit l’esca-.
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lier, parloit sans cesse, et n’apportoitrien.
C’étoit un bruit affreux, et malgré tant
d ’empressement nous ne pouvions point obtenir
ce que nous demandions. Enfin fatigues
de tout ce vacarme, nous sortîmes de
1 auberge, en priant M.r Cowie de nous
montrer ce que les environs offroient de plus
intéressant pour la géologie. Mais ce grand
homme qui ne permetloil point à ses goûts
philosophiques d’empiéter sur ses devoirs
rustiques, nous demanda de le laisser raccommoder
une charrue avant que de se livrer
à la minéralogie. Ce ne fût pas long,
il nous fît faire une promenade aussi intéressante
par les phénomènes d’histoire naturelle
que par la beauté des points de vue.
Le petit lac Ranza que nous cotoyons est
formé par la mer à l ’embouchüre de la rivière
de ce nom , il est séparé en partie des eaux
de l’Océan par une étroite langue de terre,
au-dessus de laquelle s élève une tour quar—
rée en ruine, qui fît une fois partie d’un
chateau des Rois d Ecosse. Ce lac forme un
port naturel où de petites embarcations peuvent
mouiller en toute sûreté. Arrivés sur le
bord de la mer, nous nous trouvâmes dans
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