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M.r PatrickNeil nous conduit à la jolie ferme
qu’habite M.r Y***, un de ses amis, par qui
nous sommes accueillis de la manière la plus
aimable ; il voulut bien nous engager à
prendre sa maison pour notre quartier général
, d’où nous pourrions faire successivement
les courses que nous projetions.
Nous visitâmes d’abord les grandes plaines
de sable qui bordent la mer entre Aberladiô
et Dirletôn. Ces sables forment des dunes
peu élevées , rangées en lignes parallèles ,
qui commencent à quelques centaines de
pas de la mer, et s’étendent du côté de la
terre à une distance d’un mille environ du
rivage. Un très-grand nombre de lapins sauvages
habitent ces dunes, dont la surface est
couverte d’arundo arenaria. L ’Eider 4nas
mollissima) , oiseau dont le duvet si précieux
est connu sous le nom d’édredon, y éleve
ses petits ; son nid établi au milieu des roseaux
sur le sable nu, est composé de duvet
grisâtre mélangé de paille et de petits morceaux
de bois. La femelle y dépose cinq
oeufs, d’un vert d’olive et de la grosseur d'un
oeuf d’oie. Pendant qu’elle couve , elle pa-
roîl peu sauvage, et se tient sur son nid sans
presque faire attention à ce qui se passe autour
d’elle ; ce n’est que lorsqu’on en est
tout-à-faiî près qu’elle se résout à quitter ses
oeufs. J’en vis une qui avoit placé son nid à
l’entrée du terrier d’un lapin de telle manière
que, pour entrer dans son trou , le
lapin étoit obligé de passer sous le nid de
l ’eider. Ces deux animaux vivoient dans la
meilleure intelligence. A mon approche,
le lapin effrayé courut avec précipitation
se cacher sous terre ; ni le bruit qu’il fit
en se sauvant, ni mon approche, ne parurent
causer d’effroi à l’Eider qui ne fit
aucun mouvement. Je restai long-temps
à contempler cet oiseau, sans que ma
présence , quoique je n’en fusse éloigné que
de quatre ou cinq pas, lui donnât la moindre
inquiétude.
Les habitans de ces côtes n’ont point songe
à tirer parti, d’un duvet que les Islandais exploitent
avec tant d’avantage. Il existe cependant
sur ces rivages, un nombre d’Ei-
ders assez grand pour que l’on pût trouver
quelque profit à une telle entreprise ; on
pourroit même, avec les soins et les précautions
nécessaires,, y attirer une plus