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5.^6 V O Y A G E A U TO U R DU M O ND E.
parages sont infestés, et pour taire connaître notre position au troisième détachement,
dont le capitaine faisait partie. Mais en abordant ù la còte, il ne crut pas devoir s’exposer
à débarquer, et prit le parti de passer la nuit dans le canot pour gagner le fond de la
baie de Saint-Sébastien, éloignée de 6 à 7 lieues, et nous y donna rendez-vous pour le
lendemain.
Après une nuit froide et humide, qui ne nous permit pas de goûter un instant de
sommeil, à la pointe du jour, le 16 juillet, nous nous mettons en route Pour ne pas
nous égarer, nous suivons le bord de la côte; mais les plus grandes difficultés se présentent
ù nous : des ravins profonds, que nous ne pouvons franchir qu’à l'aide de nos
mains, arrêtent notre marche à chaque instant; la faim, et surtout la soif, se font
bientôt sentir. Nous découvrons les restes d'un feu éteint, et des débris de chaussure,
qui nous font conjecturer que d’autres naufragés avaient passé la nuit dans cet endroit:
nous y cherchons en vain à étancher notre soif; nous ne trouvons dans le creux des
rochers qu’une eau saumâtre qu’il est impossible de boire. Nous avançons accablés de
fatigue : nous apercevons les débris d’une haliitation, près de laquelle une source limpide,
qu’ombragent des géraniums sauvages et des arums, offre à nos gosiers altères une
eau excellente. Parvenus au pied de cette maison, bâtie sur un point très-élevé, nous
découvrons dans la baie un navire, que nous reconnaissons être le Georges IV . A cet
aspect, la joie renaît parmi nous : nous pensons que le capitaine était retourné à bord
pendant la nuit, et que, trouvant le vent favorable, il en a profité pour conduire là
notre bâtiment. Nous apprîmes plus tard que les courants et la marée avaient seuls dirigé
le navire, et l'avaient porté sur une ligne de récifs au Nord de l’embouchure de la
Breede, à peu de distance du rivage. Si effectivement le capitaine fût retourné à bord,
en voyant le navire entrer dans la baie, il eût eu peut-être le bonheur de le sauver.
Nous espérions trouver le capitaine et des vivres au bord de la baie, et nous faisions
les plus grands efforts pour y parvenir : notre attente fut trompée. Un grand nombre
voulaient s’arrêter pour passer la nuit dans ce lieu, qui ne nous offrait aucune ressource ;
mais nous parvenons à les décider à gagner les bords de la rivière la Breede ( infanta ),
qui se jette dans la baie, où nous pourrions au moins nous désaltérer. Je prends l’avance
sur la troupe, et ne tarde pas à apercevoir une maison sur l’une des rives : je reviens
faire part de ma découverte à mes compagnons d’infortune. Quoique la maison nous
parût encore très-éloignée, nous résolûmes de faire un dernier effort pour l’atteindre et
nous procurer des vivres et nn abri pour la nuit. Le capitaine en second du navire,
quelques instants avant que nous eussions aperçu cette habitation, ayant envoyé deux
marins chercher des moules sur le bord du rivage, nous restons lui et moi en arrière
pour les attemÎfç: nous gravissons un rocher élevé, afin de nous en faire apercevoir.
Après une assez longue attente, ne les voyant pas revenir, nous nous décidons à rejoindre
notre troupe, que nous n'atteignons qu’à l'entrée de 1a rivière. A peine sommes-nous
réunis à elle, nous apercevons une charrette attelée de douze boeufs, conduite par un
Hottentot, que le capitaine avait envoyé au-devant de nous. Nous montons tous suy
I Li tronpe se composait d'u e ct de deux cufants.
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celte voiture; deux heures s’écoulent, et, harassés de fatigue, nous mettons pied à terre
à la ferme de M. Lost, qui nous procura les moyens de réparer nos forces abattues,
n ayant mangé depuis au moins 24 heures qu’un misérable petit lapin que je tuai, et
que nous divisâmes en une quinzaine de parts.
Le lendemain, nous traversons la Breede dans un b.ac, pour nous rendre à l’ .ac-House,
magasin d’approvisionnement de l'arrondissement, où le capitaine s’était déjà établi avec
deux autres passagers, dont une jeune demoiselle de douze ans. C’cst cette maison que
nous .avions aperçue la veille et que nous avions supposé être une caserne, présumant
que. SI le pays était habité, il ne pouvait y avoir qu’un détachement de troupes.
Cette partie du pays porte le nom de Port-Beaufort, et l’autre côté de la rivière conserve
celui de Sèhastimi-Baj. M. Pureu. Français, commis de l’établissement de Pac-
House, s’empressa de venir nous offrir ses services. Il était accompagué de M Van-
Reaneu, propriétaire du voisinage, qui nous engagea, avec les plus grandes instances,
a nous rendre dans son h.ibitation, éloignée d’environ deux lieues du rivage. M. le
docteur Carter et moi. nous acceptons ses offres obligeantes pour le lendemain; nous
nous faisons conduire le jour même, en charrette, au bord delà mer, pour voir si nous
poumons aller au bâtiment; mais la rn.lt déjà obscure, quand nous arrivâmes au rivage,
uous obligea à renoncer, pour le moment, à ce projet. Nous passâmes la nuit sur uotrE
charrette; le jour nous démontra l'impossibilité d’exécuter notre entreprise, parce que la
mer brise avec une telle violence sur ies rochers qui bordent la côte, que, malgré nos
offres, nous ne pûmes nous procurer un canot, personne n’osant s’exposer au milieu
des récifs; même avec un radeau, on n’eût pu s’engager sans les plus grands dangers,
SI les ressources du pays eussent permis d’en construire un. Nous reprîmes la route de
Pac-House, d’où, après avoir passé quelque» moments avec M. Puren, nous allâmes,
en chassant, â l’Iiahitation de-M. Van-Reanen. Nous nous proposions d’y passer quelques
jours, dans l’espérance que la mer pourrait porter à terre quelques objets du bord.
Effectivement, peu de jours après, en retournant au rivage nous vîmes cà et là divers
debns du bâtiment, parmi lesquels je trouvai un grand nombre de mes’ pièces d’histoire
naturelle, que je' ramassai à l’aide de Lebaillon. que j ’avais laissé en observation
sur les bords de la mer, avec quelques hommes de l’équipage que le c,ipitaiue avait
places la pour recueillir ies débris du naufrage.
Les différentes pièces que je pus rencontrer me firent connaître que toutes mes caisses
avaient etc brisées. Due seule de mes malles, presque pleine d’objets d’I.istoire naturelle,
au détriment de mes propres effets. parvint entière au rivage ; mais l’eau de mer l’ayant
pénétrée de toutes parts, tout ce qu’elle renfermait a été très-endommaeé
La mer ayant dissous le sucre qui faisait la plus grande partie de'’la cargaison, le
b,«.ment ainsi allégé fut porté par la lame un peu plus près de terre; el environ t.ne
dizaine de jours après le naufrage, à la marée basse (la lime était alors dans son plein),
01. put s y rendre, quoique avec beaucoup de danger. Mais le navire était incliné par
sou liane droit du côté oû était ma chambre, et celle-ci ayant été submergée, 11 était
devenu mutile pour moi de faire ce trajet. Le docteur Carter, don, la chambre étal,
sur le flanc gauche, pu, sauver ses effets que l’eau n’.avai, pas atteints. Je fis transporter
lo y a g c de la Coquille. — Z. Tom. l , Partie / /. „