Mais, pour que notre idée soit complète sous ce rapport, il
nous reste à envisager les causes qui peuvent démontrer l’origine
ignée d’un aussi grand nombre de terres séparées par d’immenses
esjiaces et par la plus vaste étendue de mer connue.
L ’ancieime opinion (pii veut qu’elles soient les débris qui surgissent
d’un continent austral brisé n’est point admissible; et
la seule raison satisfaisante qu’on puisse donner de la naissance
de tant d’ilcs éparpillées comme au hasard, mais cependant
assez communément par grands groupes, a sans conti'edit été
émise ]>ar Forster, et généralisée ensuite, trop exclusivement
peut-être, par le savant géographe Buacbe. Forster (Ohserv.)
considérait toutes ces îles comme assises sur les points culminants
des cbaines sous-marines, s’irradiant sous la mer, comme
elles le font sur la surface de la terre. Ainsi s’explicpie sans difficulté
la naissance des îles de corail, dont la base est construite
par les polypiers saxigènes sur ces éminences placées à peu de
profondeur ; et c’est de la conformation des chaînes formant les
bassins sous l’eau que naît celle qu’affectent dans leurs contours
les îles basses.
La surface du Grand-Océan, couverte de terrains volcanisés
anciens ', présente encore une quantité prodigieuse de monts
ignivomes en activité, également nombreux sur les terres ou sur
les continents qui lui servent de limites. La JNouvelle-Zélande
^ Les îles de la Société, au milieu des masses basaltiques (Basalte avec Péridot)
qui constituent la plupart des montagnes de leur portion centrale, ont leur ossuaire
composé d’une belle dolérite. Le mont Oroena est élevé de 3,3a 3 mètres, d’après
Cook ; et des montagnes voisines présentent à leur sommet des lacs qui sont d’anciens
cratères. Il en est de même à Noukahiva. (K rü s e k s t . )
^ L a partie Nord de la Nouvelle-Zélande est entièrement volcanique. J^a cascade
tie K id d i -K id d i est remarquable par la grande nappe d’eau qui se précipite d’une
colonnade basaltique très-élevée. Le lac de R o to u d o u a , qui joue un si grand rôle
dans la mythologie de ces peuples, est un cratère d’où jaillissent des sources d’eau
chaude. Des blocs d’une belle obsidienne,des tuffasrouges,abondent sur plusieurs points.
Tanna, les Nouvclles-Hébrkles, la Nouvelle-Calédonie, les îles
Scliouten, lesMariannes, les Sandwich la Californie, ont encore
des volcans en activité; et sur les bords, il ne faut que citer ceux
des Andes en Amérique, des Gallajiagos, etc., etc. L ’Océan Atlantique
, sous ce rapport, présente une grande analogie avec la
mer du Sud; car les îles distantes et éloignées de la côte d’Afrique
sont volcaniques, telles que Sainte-Hélène, l’Ascension, Madère,
les Açores, les Canaries, les îles du Cap-Vert, Tristan-d’Aeunha :
le même phénomène se manifeste dans les Antilles, dans la mer
des Indes par les iles Maurice et de Bourbon. Mais on remarque
encore autour de ces îles la formation madréporiquc, qu’on ne
retrouve point d’une manière complète dans l’Océan Atlantique.
Des récifs de corail enveloppent, en effet, file Maurice, les iles
Rodrigues, les Mahées, les Seychelles, etc. Plus anciennement
surgies du sein des eaux, les iles volcaniques de la mer du Sud
ont été peuplées les premières; et ce u’est que long-temps a]très
et successivement que l’espèce humaine a été s'établir sur les iles
basses, on son exi.stence est beaucoup plus précaire, et entourée
de privations plus nombreuses. Enfin, si la Zone équatoriale
offre seule le phénomène des formations de roches madréporiques
en grand, les hautes latitudes boréales et australes en
présentent encore des traces légères produites par un polypier
nullipore, qui encroûte les rochers baignés par la mer, et qn'on
retrouve également à Terre-Neuve, comme .aux îles Malouines.
De ces considérations sommaires, il résulte que les ])cuples
qui doivent nous occuper habitent, i° des terrains primitifs,
2° des terrains ignés, et 3° des îles madréporiques à peine élevées
au-dessus du niveau des vagues. Suivons cette idée, en examinant
' Le pic d’Owahie ou Monoroa, haut de 2 ,^54 toises, suivant M. Horner ( v o y .
de K ru s en s t.) , vomit une immense coulée de lave, vers 1801, suivant M. de Ciia-
misso ( K o tzeb u e ’ s V oy . roun d the w o r ld ) , t. I I , p. 3 5 3 .