m i f
( • 7 4 )
T i n t y r a jusqu'à Ombos, ei que le lieu oil ils sont le plus aboiulauts,
c'est prés d'IIermontis. Nous en vîmes U-ois ici , dont un, beaucoup plus gros
que les deux autres, avoit au moins vingt-cinq pieds de long; ils .'•toienL
tous trois endormis: nous en approchâmes jusqu'à vingt pas; nous eùuics
tout le temps de distinguer leur triste allure; ils rosscmbloient à des canons
sur leurs affûts. Je tirai sur le plus gros avec une charge et un fusil de
m u n i t i o n ; la balle frappa et glissa sur les écailles; il fit un saut de dix
pieds de longueur, et se perdit dans le Nil.
A quatre lieues avant Esnc je vis un qïiai revêtu, sur le bord du Nil; à
cent toises de là, une porte pyramidale fort détrui te, et six colonnes du port
i q u e et de la galerie d'un temple, qui doit être celui de Chnubis. Nous avions
bon vent: demander une demi-lieurc eût été un crinie de Icse-serviee uiilit
a i r e ; il fal lut p r endr e on passant une petite vue pittoresque, que j 'ai recommencée
depuis d'une maniéré u n peu moins ineoiuuiode ( w / c ^ /V. 7J, «"3).
A une demi-lieue plus bas, nous trouvâmes quatre autres crocodiles.
A la pointe du jour, nous arrivâmes à Esnè. En abordant, nous entendîmes
battre un rassemblement: j'avois déjà bien assez de la marine;
j e me sauvai plutôt que je ne descendis du bateau, et dix minutes après
avoir mis pied à terre j'étois déjà à cheval tournant le dos à Apollinopolis
et à Latopolis, auxquelles j'avois bien encore quelques questions à faire:
mais tel étoit le sort de la guerre; et je devois me compter bien heureux
que l'opiniâtreté de ilourat-bey m'eût fait voir Syene. Il avoit fallu pour
cela que, sans autre plan qu'une constante obstination, il eût suivi chaque
j o u r l'impulsion du moment et de la circonstance.
La coalition des bcys étoit déjà rompue; Soliman étoit resté à Dcir;
Assan, avec quarante Mamelouks, s'ctoit séparé de Mourat à la hauteur
d'Esnè, et étoit remonté à Etfu; tous les cheikhs de gauche devoient se
s é p a r e r plus bas; et Mourat, seul avec ses trois cents Mamelouks, devoii
descendre jusqu'au-delà de Sioulh; mais rencontré à Souhama, au-dessous
de Girgé, par le général Friand, qui avoit détruit tous les rassemblements
qu'il avoit formés, il prit la rotite d'Elouah, l'une des oasis, 011 il alla
a t t e n d r e ce que le sort ordonneroit de lui et de nous, 11 y avoit eu deux
affaires entre les Mekkains et la division du général Friand, sur la rive
gauche entre Thebes et Kous; six cents de ces aventuriers y avoient péri:
o n attendoit, disoit-on, le sehérif de la Mekke lui-même, qui, avec six
m i l l e des siens, devoit se joindr e aux huit à neuf cents qui restoient de la
p r e m i e r e croisade.
( 1 7 5 )
Le ventôse, au matin, nous arrivâmes à TTermontis; nous nous y arrêtâmes
pour attendre des nouvelles des Mamelouks, des Mekkains, et du
reste de notre armée, disséminée dans ce moment sur nombre de points.
Réduit au temple dont j'avois déjà fait la vue (VOJAZPL 5r, 3), j'allai
de nouveau en questionner les hiéroglyphes, et dessiner tout ce qui me
paroissoit plus utile à présenter aux obsei-vations des curieux et d(îs savants
{vojpz pL 126, n° 4 ci 5; pl. 122, n° 3, 4, 5, 6, 8 et 17 ) ; j e fis aussi
le plan et la vue {pl. 5i, n° i r-i 2; voyez /ci e.rplieations).
- Je fus dans le cas de mieux observer remplacement de la ville antique,
qui avoit eu une circonvallation et possédé plusieurs t(!mples. Mais toujours
des temples! pas un édifice publ ic, pas une maison qui eût en assez de consistance
pour résister a u temps, pas u n palais de roi! qu'étoi t donc la nation?
q u ' é t o i e n t donc les souverains? Il me semble que la premiere étoit composée
d'esclaves; les seconds, de pieux capitaines; et les prêtres, d'humbles
e t hypocrites despotes, cachant leur tyranni e à l 'ombre d'un vain monarque,
possédant toutes les sciences et les enveloppant de l'emblème et du myst
è r e , pour mettre ainsi une barriere entre eux et le peuple. Le roi éfoit
ser\'i par des prêtres, conseillé par des prêtres, nouri'i par eux, prêché
par eux; chaque matin, après l'avoir habillé, ils lui lisoient les devoirs du
souverain envers son peuple, envers sa religion; ils le menoient au temple;
le reste du jour , comme le doge de Venise, il n'étoit jamais sans six
r o n s e i l l e r s , qui étoient encore six prêtres. Avec de telles précautions il
n e pouvoit peut-être pas y avoir de mauvais rois; mais qu'y gagnoit le
p e u p l e , si les prêtres les remplaooient? T-es doux seuls souverains qui,
selon l'histoire, aient osé secouer le joug, qui fermèrent les temples pendant
trente ans, Chéphrenes et Chêops, furent regardés et consignés
dans les annales que les prêtres écrivoient, comme des princes rebelles et
impies.
l . e palais des cent chambres, le seul palais cité dans l'histoire de l'Egy-pte,
f u t l'ouvrage d'imc nouvelle forme d(- gouvernement où les prêtr(;s ne pouv
o i e n t avoir la même innuence. Ces fameux canaux, dont l'histoiie nous
p a r l e si fastueuscinent, n 'ont conservé aucune magnificence, aucune digue,
aucxine écluse, aucun empèlement: ce que j'ai rencontré d'épaulement et
d e quais sur le bord du Nil sont de petits ouvrages en comparaison de ces
templos colossales et immortels dont les cire o n va H â t i o n s occupoient une
grande partie de l'emplacement des villes. Les jésuites du Paraguay aur
o i e n t peut-être pu nous donner le secret ou l'exemple du système de cette
M