presque aussi long qne tout le reste <le la route. J'en fis le dessin (/2° 2,
pldiichc i5). Nous Irouvàines à l'itutre rive les jjremiers travaux d'une batterie
que nous elevions pour protéger ce moyen de communication, ([ue
la présence de l'ennemi rendoit mal assurée sans cette précaution. A peine
fûmes-nous passés que nous en eûmes la preuve; car un bi'ick et u n aviso
anglais, venant pour troubler notre marche, nous tirèrent sept ¿1 hui t coups
do canon; notre silence leur fit croire que nous n'avions rien à leur rép
o n d r e ; en conséquence, quelques heures après nous vîmes se détacher de
l'escadre anglaise douze embarcations, et les deux bâtiments du matin qui
venoient à toutes voiles sur nos travaux. Nous crûmes qu'ils alloient tenter
une descente; mais ils se contentèrent de jeter l'ancre près de la batterie,
e t , lorsque la nuit fut venue, de nous canonuer: nous attendîmes la lune;
et dès qu'elle nous eut assurés de leur position, nous commençâmes à leur
r é p o n d r e d'inie maniéré apparemment si avantageuse, qu'au quatrième coup
de canon ils couperent les cables, laissèrent leur ancre, et disparurent.
Après avoir traversé la bouche du lac en suivant deux sinus l)ordés
de monticules sablonneux , j'arrivai enlin au i'auboiirg <l'A])oukir , qui
ressemble beaucoup à la ville, dont il est séparé par un espace de cent
cinquante pas: les deux ensemble peuvent être composés de quarante à
c i n q u a n t e mauvaises baraques en ruines, qui coupent en deux parties la
p r e s q u ' i s l e , au bout de laquelle est bâti le château : cette forteresse a
([uelque apparence de loin ( voyez-en ¡a imo n" pl. i)); mais les bastions
s ' en écrouleroient au troisième coup de coulevrines qui s<ml sur les remp
a r t s , où elles semblent moins braquées qu'ouljliées; il y en a une en bronze
de quinze pieds, portant boulet de cinquante livres. Il a fallu jeter bas
une partie des batteries pour former avec les décombres une plate-forme
assez solide pour y placer quatre de nos canons de 36 : cette précaution
n e me parut pas d'une grande utilité, les bâtiments et embarcations susceptibles
de porter du canon à battre des nuirailles ne pouvant s'approcher
de ce promontoire à cause des ressifs et des rochers qui le couronnent.
Une descente hostile 11e se feroit pas là; et, une fois effectuée, le château
ne pourroit tenir, et ne pourroit même servir de logement ou de magasin
(jue dans le cas où l'on construiroit en avant des lignes pour en défendre
l'approche ; mais en tout il me parut qu'il seroit préférabh' de détruire
le château, de combler les fontaines, d'épargner ainsi une garnison, inutile
quand il n'y a point d'ennemi, et (|ui doit être toujours blo(|uée ou prisonnière
de guerre dès l'instant qu'il aura pu effectuer une descente.
( 5 5 )
J e fis le dessin à vol d'oiseati de la presqu'isle («" !\, planchi- i.^).
J e trouvai dans l'embrasure de la porte du château qiiaire grandes
pierres de poiphyre d'un verd foncé, et deux pierres longues de granit
statuainî le plus compacte; à la seconde porte, je trouvai, avec quatre
autres pierres, un membre d'entablemenl dorique, portant des triglypbes
d'une grande proportion et d'une belle exécutioTi : ces fragments, avec
quelques traces de substructions à la pointe du rocher, sont les seules
antiquités que j'aie pu découvrir à Aboukir, dont l'emplacement n'a jamais
pu changer, puisque le sol est une plate-forme calcaire qui s'élève au-dessus
de la mer, et n'est attachée à la terre que par un isthme trop étroit pour
qu'une ville considérable y ait été bâtie : ce n'a donc jamais pu être que
le fort ou le château en mer de Canope ou d'HéracIée, que vStrabon place
là ou près de là. J'avois passé devant des tbntaines une demi-li(^ue avant
d ' a n i v e r à Aboukir; on me vanta leur construction: j'y retournai; je ne
trouvai que trois puits quarrés de fabri<fu<- aiabe ; ils sont entourés de
hauteurs qui contiennent certainement <les ruines contre l(;squelles est
amoncelée inie quantité immense de tessons de pots de terre cuite, mêlés
aux sables du désert apportés par le vent. Sont-ce des tours arabes enfouies?
êtoient-ce des fabriques de po.ts? sont-ce les ruines d'IIêraclée? quelques
morceaux de granit sur la plate-forme, de la plus grande éminence, me
feroient préférer cette derniere opinion.
Le lendemain, je longeai, avec un détachement, la côte de l'ouest, interrogeant
toutes les sinuosités et les plus petites eminences; car, dans la
basse Egypte, elles recelent toutes les antiquités, lesquelles en sont presque
toujours le noyau. Après trois quarts-d'heure de marche, je trouvai
dans le fond de la seconde anse une petite jetée formée de débris eolossals:
quel plaisir j'éprouvai en appercevant d'abord un fragment d'une main,
dont la premiere phalange, de quatorze pouces, appartenoit à une figure
de trente-six pieds de proportion! le granit, le travail, et le style de ce
morceau, ne me laissèrent nul doute qu'il ne remontât aux aucieiuies époques
égyptiennes; au mouvement de cette main, à (fuelque autre d<d)ris
qui l'avoisine, et d'après la seule habitude de voir des figures égyptiennes,
dont la pose offre si peu de variété, on peut reconnoitre dans ce fragment
une Tsis tenant un nilometre: il seroit facile d'emporter ce morceau; mais
déplacé il perdroit presque tout son prix. Près de là plusieurs membres
d'architecture attestent par leur dimension qu'ils ont appartenu à un grand
et bel édifice d'ordre dorique: les vagues couvrent et frappent depuis bien