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],hniàLre de la mer. Pas un arbre, pas ime habita l i o n ; ce n'étoit pas sc-iih
' m e n t la n a lur e auns léc , mais la «Icstruclion de la n a tur e , mais le silence
e t U mort. La gaieté cic uos soldat, n'en fut pas altérée; u n d'eux dit à
s o n camara. l e .'ii lui u i o n t r a n t le déser t : Tiens, regarde, voilà les si x a rpent s
< [ u o n fa déerétés. Le rire général que iit éclater cette plaisanterie peut
s o - v i r de preuve que le courage est désintéressé, ou du moins qu'il a sa
s o u r c e <lans de plus nobles sentiments.
Ces parages sont périlleux dans les teuq)S d'orage et dans les l^rumes
<le I W r , purcequalors la côte basse disparoit, et q u o n ne l'appereoit
q u e lors.iuil n'est plus temps de l•é^iter. Mais le bonheur qui nous acco.np
a g n o i t nous laissa maîtres de manoeuvrer sur le cap Durazzo, <iue nous
c h e r c h i o n s en tirant à l'est .¡uart de sud.
A d i x lieues d u cap, ii c i n q d'Alexandr ie, nous viuies une ruine que Ion
a p p e l l e la Tour-des-Arabes ; à raidi j'en lis u n dessin /V- 0 , i )• Cette
r u i n e me parut un carré bas t ionné, à quelque distance il y a une tour.
T ' a u r o i s bieu désiré pomoi r mieux en distinguer les détails, ju^er si c'est
u n e fabri(pie a rabe, ou si sa cons t ruct ion est aiiti<iue, et à ciucile antiquité
e l l e appart ient ; si c'est la Taposiri s des anciens, que l'rocope nous donne
c o n n u e le t omb e a u d'Osiris, o u le C h e r s o n e s u s de-St rabou, o u b i c n Plinlhine,
d o n t le golfe tiroit sou nom. I.a garnison d'Alexaudrie a pous s é depuis <les
r e c o n u o i s s a n c e s jus<[u'à ee poste; uiais les rapport s purement militaires de
CCS reconuoi s sances n'ont i>u porter aucuue lumiere sur l'origine de ces
r u i n e s , et n'ont fait qu'augmentee la curiosité (¡n'inspirent leur masse et
l e u r étendue. Kn général toute cette còte de l'ouest, contenant la petite
e t la grande Syrte de la Cyrenaicjue, autrefois très habi tée, qui a eu des
r é p u b l i q u e s , des gouverneuumt s particuliers, est à p r é s eni une des conirces
l e s plus oubliées de l'.uiivers, et n'est plus rappelée à notre uu'.moire (jiie
p a r les superbes médailles qui nous en restent.
D e droi te et de gauche not r e terre p romi s e nous parut plus aride encore
, , u e cellc des Juifs. Il est vrai que jus<iu'aloJ'S elle n e n<ms avoit pas coûté
s i c h e r ; (pie, s'il ne nous avoit pas pl u des cailles toutes rôt ies, m)lre manne
n e s'étoit pas cor rompue, que nous n'avions pas eu <le col iques ardentes,
e t <iuc nous avions encore conservé tout ee .[ui étoit tombé aux Israélites;
„ m i s au reste les Arabes Bédouins, qui er.xmt sur ces côtes, aun.i.mt |.u
é q u i v a l o i r à ces fléaux, et n o u s devenir aussi fu.iestes. O u assure cepe.ulant
<iue depui s vingt ans ils ont fait u n accord avec la factoreri.- d'Alcxamlrie,
p a r lequel, après plus ou moins d'avaries, ils rendent les naufragés poui'
v i n g t piastres par tète, au lieu de les tuer comme ils faisoient plus anc
i e n n e m e n t .
L e lieutenant, que l'on dépêcha à terre, partit à «ne heure apiés-midi;
il n'avoit pas le pied dans le canot que nous attendions son retour, et
c o m p t i o n s les instants.
J e fis, de trois lieues de distance, une vue d'Alexandrie ( vojvz 3 ).
N o u s voyions avec la lunet t e le drapeau tricolor sur la maison de notre
c o n s u l : j e me flgurois la surprise qu'il alloit éprouver, et celle que nous
m é n a g i o n s au schérif d'Alexandrie pour le lendcjuain.
Q u a n d les omb r e s d u soir dessinèrent les contour s de la vi l le, (|ue j e pus
d i s t i n g u e r ces deux por ts, ces grandes murailles flanquées de nombreuses
t o i n ' S , qui n'enferment plus que des mornes de sables, et quelques jard
i n s on le verd pâle des palmiers tempere à peine l'ardente blancheur
d u sol, ce chiiteau ture, ces mosquées, leurs minarets, cette célébré col
o n n e de Pomjjée, mon imagination se reporta sur le passé; je vis l'art
t r i o m p h e r de la nature, le génie d'Alexandre employer la mai n active du
c o m m e r c e pour planter sur une còte aride les fondements d'une vilh; suj
i e r b e , cl la choisi r p o u r y d épos e r les t rophées des conquêtes du mo n d e ; h^s
P l o l o m é e s y appelei- les sciences et les arts, et y ra.sseinbler celte bibliotlicq
u c à la d e s t ruc t ion de laquel l e la bai l .ari e a cm] ) Ioyé des ai ïucW: c'est là, nie
d i s o i s - j e , peiisant ;i Cl éopâ t r e , à Cé s a r , à A n t o i n e , que l 'empire de la gloire
a cédé à l'empire de la volupté : je voyois ensuite l'ignorance farouche
s ' é t a b l i r sur les ruines des chefs-d'ceuvrc des arts, achevant de les co7is
u m c r , et n'ayani cependant p u défigurer encore les b e aux développements
q u i lenoient aux grands principes de leurs premiers plans. Je fus tiré de
c e l t e préoccupat ion, de ee bonheur de rêver devant de grands objets, j)ar
u n coup de canon tiré de notre bord, pour appeler à l 'ordre un bàliment
q u i avoit mis lout au vent pour entrer malgré nous à Alexandrie, et
y porter sans doute l'avis de notre marche : la nuit le déroba bientôt à
u o s recherches. Notre inquiétude sur le canot augraentoit à chaque mom
e n t , et se changeoil en terreur. A minuit, uous entendîmes appeler
a v e c des voix effrayées; et bientôt nous vhnes entrer notre consul et son
d r o g m a n , échajîpant au sabre vengeur et à l'effroi répandu dans le pays,
l i s nous apprirent qu'une flotte de quatorze vaisseaux de guerre anglais
n ' a v o i t quitté que la veille au soir le mouillage d'Alexandrie; que les Ang
l a i s avoient déclaré qu'ils TIOUS cherehoient pour nous conil)attre ; ils
a v o i e n t été pris pour des Français ; et tout le pays, déjà averti de nos