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No»is nous rcliri'.nu-s sur nos barques, d'où je lis unn petite vue de ce
que du Lord du Nil on apperçoil des mines et de la situation d'Antinoë
{voyez pl. 8G, « " i ) ; toxite la rive droite eoiuinue dëtrc à-peu-prés nulle
p o u r la eulture jn-squ'aux em-lroi.s de Mc=nct. Le coeur me battoit e.i ap^
p r o c h a n t de eette ville où je Cioyois trouver Desaix, lai montrer mes
t r a v a u x , l'en l'aire joui r , en jouir .noi-mème auprès de lui; mais je ne
dcvois plus revoir ce brave et respectable ami : nous apprîmes qu'il poursuivoit
encore cet infatigable Mourat-bey. Caime dans les malheurs, ce Fabius
é g y p t i e n , sachant allier à uu courage patient toutes les ressources d'une
p o l i t i q u e active, avoit calculé ses moyens; il avoit apprécié le résultat de
l'emploi qu'il en pouvoit faire au milieu des événement s d'une guerre désa
s t r e u s e ; (juoiipi'il eût à combat tre à la fois uu ennemi étranger et tontes
les rivalités et les prétent ions dune jalouse égalité, il s'étoit immuablement
conservé le chef de ceux doni il partageoit les privations, la fuite, et les
revers; il étoit resté h-ur seul point de ralliement, jégloit leur sort, leurs
mouvements, les eonnuandoil encore comuie au temps de sa prospérité:
une longue expérience lui avoit appris le grand aiL de temporiser; il avoit
senti cette vérité que heur ter lecueil, c'est se briser contre lui, (|ue le foible
doit user le malheur, et ne le combat t r e qu'avec la fatix d u tcïnps, qu'enfin
l o r s q u ' o n ne peut plus c o n u u a n d e r aux circonstances l'art est de sa-v o i r eéder
à celles qui commandent , et leur dérober encore les moyens d'en attendre
de nouvel les: c'est p a r c e s ressources que >Ioural-bey s e toi l numlré le digne
adversaire de Desaix, et que l'on ne savoit plus ce qu'il falioit admirer
davantage, ou des ingénieuses et itératives attaques de l'un, ou de la calnie
e t circonspecte résistance de l'autre.
•Nous apprîmes que ee dernier avoit ménagé des intelligences dans la
basse Egypte, qu'il avoit fait en conséquence un mouvement avec tout ce
qui lui restolt de Mamelouks et d'Arabes, qu'il avoit traversé le Faïum, et
p é n é t r e jus<(u'an désert des pyramides, pour y opérer une diversion en cas
d ' u n e descent e sur la côte. Différents corps conni iandés par le général Friand,
le général Boyer, cl le général Jayomehck, après lui avoir pris <picl(|ues chameaux,
iné (iucl<pies Mamelouks, l'avoienr force- de remontrr du côté (lc>
Menici, où Desaix l'avoit repris, et le chassoit des positions où il chercho II
a s'établir. On nous pi'évint ([ue nous pourrions rencontrer, à quelques
lieues au-dessous, des barques qu'il avoit armées, el qui suivoienl ses mouv
e m e n t s ; nous attendîmes la nuit pour les éviter, el pas.sàines sans voir
n i èt)-e vus. .V la pointe du jour , nous nous trouvâmes au monastère de la
P o u l i e , qui est un couvent posé à pic sur les rochers du Mokatam: les
r e l i g i e u x viennent demander à la nage l 'aumône aux passants; on dit qu'ils
les dévalisent lorsque cela leur paroît sans danger et plus profitable: ce
q u e j'ai pu remarquer, c'est que ce sont plutôt des amphibies que des nag
e u r s ; ils remontent le courant du fleuve comme des poissons. Alternativ
e m e n t victimes de trois é léments, Us m a n q u e n t absolument du quatrième;
e n effet, séparés de tont e cul tur e par u n immense désert, ils sont dévorés de
l ' a i r qui l'a traversé, et brûlés de l'ardeur du soleil qui frappe sur le rocher
t o u t nu qu'ils habitent; ce n'est que péniblement et à la nage qu'ils obt
i e n n e n t de petites et rares charités. On appelle ce monastere le couvent
de la Poulie, parcequ'ils ne s'approvisionnent de l'eau et des autres besoins
d e la vie que par le secours de cette machine. Il nous parut, à en juger
p a r les groupes des fabriques et par eeux des religieux que nous vîmes
s u r le rocher, que la clôture du monastere est vaste, et que les moines
e n sont nombr eux: ils ressemblent parfaitement aux solitaires qu'ils auront
sans doute remplacés, et l'intérieur de ce couvent doit être le même que
ceux de S. Antoine, du mont Kolzim, et des lacs Natron. Je fis rapidement
d e u x vues de ce lieu sauvage; l'une du sud au nord, l'auU-e du nord au
sud {voyezpl. 86, 2 rt 3 ). A u n e demi-Ileue plus loin, la chaîne s'éloigne
d u NU, et les deux rives du fleuve deviennent basses et cultivées; j e revis
des nuages qui m'annoncerent que je me rapprochois de la mer et d'un
climat plus tempéré,
Nous vînmes coucher près d'Abuseifen, monastere copthe, premiere pos
i t i o n au-delà du Caire, où nos troupes se logèrent , et se fortifièrent après
la bataille des pyramides.
J e repassai de nouveau devant les pyramides de Saccara, devant ce
n o m b r e de monuments qui décoroient le champ de mort , ou la nécropolis
d e Memphis, et bornoit cette ville au sud, comme les pyramides de Gisée
la terminoient au nord. On chercheroit encore le sol de cette cité superbe,
qui avoit succédé à Thebes et en avoit fait oubl ier la magnificence, si ces
f a s t u e u x tombeaux n'attestoient son existence, et ne fixoient irrévocablem
e n t l'étendue de l'emplacement qu'elle occupoit. Toutes les discussions
p u b l i é e s à cet égard, et qui rendent sa situation incertaine, ont été faites
p a r des savants qui ne sont pas venus en Egypte, et qui n'ont pas pu juger
c o m b i e n les descriptions faites par Hérodote et Strahon sont évidemment
exactes: si cette discussion n'est pas encore terminée, c'est que jusqu'à
n o t r e arrivée en Egypte, quelque près du Caire que soient les pyramides,
•Il t-'^..
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