( 2 4 6 )
le s e cond por t ique, que la cathol ici té s'y étoit rubriqué une église dont il ne
reste plus que le soubassement de la niche du choeur et les colonnes de
la ne f ; mais j e découvris, par nombr e de petites portes décorées de croix
fleuries, que le corps-de-Iogis, de deux cents pieds, avoit, suivant toute appar
enc e , servi de couvent à quelque ordre de moines des premier s sieeles.
Dans le portique où ctoit l'église ( / r t /«' Z) j'eus le temps d'observer que les
sculptures du mur intér ieur Vi ) re prés en toi en t les exploits et le
triomphe d'un héros qui avoit por té hi gi.erre dans des conti-ées lointaines ,
de Sésostris pexit-être, et ses victoires dans l ' Inde, comme tous ces bas-reliefs
semblent l'indiquer. On y remarque un vainqueur poursuivant seul une
armée qui fuit devant lui , et se j e t t e , pour échapper à ses coups , dans
un fleuve, qui est peut-être l ' ïndus : ce hé ros , monté sur un pet i t char iot
oi» il n'y a place que pour lui , condui t deux chevaux dont les renes aboul
i s s ent i i s a c e intur e : des carquoi s , des masses d'armes, sont attachés à son
char et tout autour de lui ; sa taille est gigantesque ; il tient un arc immens e ,
dont il décoche des traits sin- des ennemi s barbus et à cheveux longs , qui
ne t i ennent ' en rien du earactere connu des tètes égypùormcs. Plus loin, il
est représenté assis au revers de son cha r , dont les chevaux sont rcteiius
par des pages : on compte devant lui les mains des vaincus mor i s au combat;
un autre personnage les inscr i t ; un t roisième paroit en proc lamer
le nombre. Quelques voyageurs ont vu un second tas d'une autre espece
de nuitilation, qui annonceroi t qiu-, ce n'étoit pas cont re des amazones que
le béros auroit combat tu; mais les formes de ces mut ilat ions ne m'ont
pas f rappé, et j e ne les ai pas distinguées; des pr isonniers sont amenés
attaches de diverses manieres ; ils sont vêtus de robes longues et rayées; leurs
cheveux sont longs et nat tés; des panneaux d'hiéroglyphes, de c inquante
pieds de diamètre, suivent , et expl iquent sans doute ces premier s tableaux.
Reprenant à gauche sur une autre face de ces galeries, on trouve >in long
bas - rel ief représentant sur deux lignes une mar che t r iomphale; c'est le
même héros revenant sans doute de ses conquêtes ; quelques soldats couverts
de leurs armes attestent que le t r iomphe est mi l i tai re, car bientôt
on ne voit plus que des prêtres ou des personnages de la caste des ini t iés,
sans armes , avec des habits longs et des tuniques t ransparentes; les armes
dn héros en sont recouvertes; il est por té sur les épaules et sur un palanquin
avec tous les attributs de la divini té; devant et der r ière lui marchent
des prêtres portant des palmes et des calumet s ; on lui présente l 'eneens;
il arrive ainsi au temple de la grande divinité de Thebe s , que j 'ai déjà
( «47 )
décr i te; il lui offre un sacrifice dont il est le sacrificateur: la marebcr sui t ,
et le héros devient cor tege; c'est le dieu qui est porté par vingtxpiatre
pr êt r es ; le boeuf Apis avec les attributs de la divinité mar che devant le
hé ros ; une longue suite de personnages t iennent chacun une enseigne, sur
la plupart desqiielles sont les images des dieux. Arrivés à un autel , un
enfant , les bras attachés derrière le dos, va être sacrifié devant le triomphateur
, ar rêté pour assister à cet horrible sacrifice, ou recevoir cet exécrable
holocaus te; un prêt re qui brise la tige d'une fleur, des oiseaux qui
s'envoient , sont les emblèmes de la mor t et de l'aine qui se sépare du
corps : ce que Longus et Apulée nous ont dit des sacrifices humains chez
les Egyptiens dans leurs romans de Théagenes et de l'Ane d'or est donc une
v e n t é ; les hommes poUcés ressemblent donc par - tout aux hommes barbares.
Ensui te le héros fait lui-même au boeuf Apis le sacrifice d'une gerbe
de bled; un génie protec teur l'accompagne .sans cesse; il change d'habits,
de coiffures dans la c é r émoni e , ce qui peut être la marque de ses différentes
dignités ou degrés d' ini t iat ion, mais la même physionomie est toujours
con-scrvée, ce qui prouve qu'elle est por t rai t ; son air est noble, auguste, et
doux. Dans un tableau il tient neuf personnages enobainés du même lacs ;
sont-ce les passions personnifiées? sont-ce neuf différentes nations vaincues
I)ar lui-'' on lui offre l'encens en l 'honneur de l'une ou l'autre de ces victoi
res ; tin prêt re écrit ses fastes, et en consacre le souvenir. C'ctoit la
premiere fois que j'eusse vu des figures dans l'acte d'écrire : les Egypt iens
avoient donc des livres; le fameux toth étoit donc un livre, et non des
panneaux d'inscriptions sculptées sur des murai l les , comme il étoi t resté
en doute. J e ne pouvois me défendre d'être flatté en songeant que j 'étois
le premier qui eût fait une découverte si impor tante; mais j e le fus bien
davantage lor.sque, quelques heures après, j e fus nant i de )a preuve de ma
découverte par la posse.s.sion d'un manuscr i t même que j e trouvai dans la
mahi d'une superbe momie qu'on m'apporta ; il faut êt re cur ieux, amateur ,
et voyageur, pour apprécier toute l'étendue d'une telle jouis.sance. J e sentis
que j ' en palissois; j e voulois querel ler ceux qui , malgré mes instantes
pr ieres , avoient violé l'intégrité de cette momi e , lor.sque j'appereus dans sa
main droite et sous son bras gauche le manuscr i t de papyrus en rouleau,
qiu- j e n'aurois peut-être jamai s vu sans cette violat ion: la voix me manqua;
j e bénis l'avarice des Ai ahes, et sur-tout h- hasard qui m'avoit ménagé cette
bonne for tune; j e ne .savois que faire de mon t résor , tant j'avois peur de
le dét rui re; j e n'osois toucher à ce l ivre, le plus ancien des livres connus