TEthiopic qui vonoieni aborder à Philée, dcvoient être transportées par
terre a Sycne, où on les embarquoit de nouveau. Tous les blocs que l'on
rencontre sur cette route sont couverts d'hiéroglyphes, et scmbloient être
là pour entretenir les passagers. Je fis des dessins de plusieurs de ces
rochers (voyez les pl. 68, i, (5;, 2); un plus étrange présente
la forme d'un siege
({uc l'on a achc-vt! de façonner en fabriquant dans le
massif un escalier pour arriver i. la foulée du fauteuil; le tout couvert d'hiéroglyphes,
dont la plupart sont fort soignés; j'ai fait le dessin de ce bloc
{voyez planche 72, rf 3 ) , et celui de l'inscription (/;/. 118 6 ).
Une autre particularité de cette route, ce sont les ruines de lignes
construites en briques de terre cuites au soleil, dont la base a quinze à
vingt pieds d'épaisseur: ce retranchement longeoit la vallée en bordant
la route, et aboutissoit à des rochers et à des forts à près de trois lieues de
vSyenc. Quoique ces murailles fussent conslruites de matériaux peu prccieux,
elles ont été d'une dépense de fabrication qui atteste l'importance
qu'on avoit mise à la défense de ce point: seroient-ce les restes de la fameuse
muraille élevée par une reine d'Egypte appelée Zuleikha, fille de Ziba,
l'un des Pharaons, et qui s'étendoit de l'ancienne Syene jusqu'où est à
présent El-Arych, et dont les Arabes appellent les fragments haïf-él-adjou?.,
ou la muraille de la vieille?
Nous trouvâmes les habitants de Philée revenus à leur habitation, mais
bien décidé à ne point nous recevoir; nous attribuâmes encore cette
mauvaise volonté ii la peur que nous leur causions, et nous continuâmes
notre route : au-delà de Philée le fleuve est absolument libre et navigable;
après avoir dépassé un fort arabe et une mosquée du même
temps, le rivage du Nil devient peu-k-peu impraticable; au lieu do cette
profusion de monuments et d'inscriptions, nous ne vîmes plus qu'une
nature pauvre, livrée à elle-même, et sur des rochers quelques habitations
qui rcssembloient à des huttes de sauvages (voyez une des plus fastueuses,
phmriK 69, «"3) ; nous entrâmes dans un désert coupant un angle du
Nil pour raccourcir le chemin; et après avoir gravi descendu pendant plusieurs
heures des vallées aussi creuses que .si nous eussions été dans une
région sujette aux orages et aux torrents, nous débouchâmes sur le Nil
par un ravin qui nous amena à Taudi, mauvais village sur le bord du fleuve;
à notre approche les Mamelouks venoient d'abandonner ce village, lais.sant
leurs plats, leurs marmites, et jusqu'à la soupe qu'ils avoient préparée, et
qu'ils dévoient manger sitôt le .soleil couché; car c'étoit le mois du ramadan.
( i 6 3 )
espece de carême, pendant lequel les Musulmans, les soldats même ne
mangent point tant que le soleil est sur l'horizon,
Nous envoyâmes un espion pendant la nuit; nous sûmes à la pointe
du jour qu'à Démiet, quatre lieues plus haut que Taudi, les Mamelouks
se trouvant encore trop près de nous, après avoir fait rafraîchir leurs chevaux,
étoient repartis à minuit. Notre but de les éloigner étant rcuqili,
nous reprimes la route de Syene. J'avois déjà assez de l'Ethiopie, des
Goublis, et de leurs femmes, dont l'extrême laideur ne peut être comparée
qu'cà l'atroce jalousie de leurs maris: j'en vis quelques unes; comme j'inspirois
aux maris moins de peur que les soldats, ils en mirent un certain
nombre sous ma sauve-garde dans une cabane, devant la porte de laquelle
j e m'étois établi pour passer la nui t . Surprises par notre marche détournée,
à la chute du jour, elles n'avoient pas eu le temps de fuir et de se cacher
dans les rochers, ou de passer le fleuve à la nage; elles avoient absolument
la farouche stupidité des sauvages. Un sol âpre, la fatigue, et une nourriture
insuffisante altèrent sans doute en elles tous les charmes de la nature,
et donnent même à leur jeunesse l'empreinte et la dégi-adation de
la décrépitude. Il semble que les hommes soient d'une auti-e espece,
car leurs traits sont délicats, leur peau fine, leur phy.sionomie animée et
spirituelle, et leurs yeux et leurs dents admirables. Vifs et intelligents, ils
mettent dans leur langage tant de clarté et de concision, qu'une phrase
courte est toujours la réponse complete à la question qu'on leur a faite:
leur caractere de vivacité est plus analogue au nôtre que celui des autres
orientaux.; ils entendent et servent vite, dérobent encore plus lestement,
et sont d'une avidité pour l'argent, qui ne peut être justifiée que par leur
excessive pauvreté, et comparée qu'à leur frugalité. C'est à toutes ces raisons
que doit être atti'ibuée leur maigreur, qui ne tient point à leur mauvaise
santé, car leur couleur, quoique noire, est pleiue de vie et de sang, mais
leurs muscles ne sont que des tendons: je n'en ai pas vu un seul gras,
pas même charnu {vojez pl. 101, «"<))•
Il falloit affamer le pays pour tenir l'ennemi éloigné; nous achetâmes
le bétail, nous payâmes la récolte en herbes, les habitants nous aidèrent
eux-mcnies à arracher ce qu'elle leuj- promettoit de provision, et nous suivirent
avec ce qu'ils avoient d'animaux. Emmenant ainsi toute la population,
nous ne laissâmes derrière nous qu'un désert. En revenant, je fus de nouveau
frappé de la somptuosité des édifices de Philée; je suis persuadé que
c'est pour produire cet effet que les Egyptiens avoient porté à leur fronlicre
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