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Nous viniiK's vouchor à Elgausanicr, oii nous Aunes assez bien logés
d a n s un tombeau <lo santon.
l . e 4, nous inairhions sur Mont-Falul , lorsqu'on vint nous dire qiu- les
Miiiiu'louks étoicnl à B<'>n<'adi, on nous courûmes les chercher. Electrise
pai' tout ce qui m'entouroi t , le coeu r me hattoit de joi e toutes les fois qu'il
(•toit question de Mamelouks, sans réfléchir que j'étois là sans animosité
ni rancune contre eux; que, puisqu'ils n'avoient jamais dégradé les anti-
( | u i t é s , je n'avois rien à leur repiocher; que, .si la terre que nous foulions
l e u r éloiL mal acquise, ce n'étoit pas à nous à le troxiver mauvais; et qu'au
m o i n s plusieurs siecles de po.ssession établissoicnl leurs droits : mais les
a p p r ê t s d'une bataille prcsculent tant de mouvements, forment l'ensemble
d ' u n si ^-raiid tableau, les résultats en sont d'une telle importance pour
c e u x qui s'y engagent, qu'ils laissent peu de place au\. réflexions morales;
il n'est plus alors quest ion que de succès; c'est un j e u d'un si grand intérêt,
q u ' o n veut gagner (piand on joue.
Nous arrivâmes à Bénéadi, et notre espérance fut encore déçue cette
f o i s ; nous n'y trouvâmes que des Arabes, que notre cavalerie ehassa dans
le désert. Bénéadi est u n rielie village d'une demi-heue de long, avantageus
e m e n t situé i)Our le commerce des caravanes de Darfour; possédant un
t e n i t o i r e abondant , sa population a toujour s été assez nombreus e pour se
t r o u v e r en mesure de composer avec les "Mamelouks, et ne pas se laisser
r a n ç o n n e r par eux. Il nous parut qu'il falloit tempor iser aussi pour le mom
e n t , d'autant que les avances amic;des qu'on nous y faisoit avoient je ne
sais quoi qui resscmbloit à des condi t ions: nous jugeâmes qu'il falloit dissim
u l e r l'insolence de ces p rocédés sous les dehors de la cordialité. Entourés
d ' A r a b e s dont ils n e craignent rien, aux besoins desquels ils fournissent,
e t dont ils peuvent par conséquent disposer, les habi tant s de BétU'adi ont
u n e influence dans la province qui les rendoi t embarrassants pour un gouv
e r n e m e n t que l conque ; ils v i n r e n t au-devant de n o u s , ils n o u s rcconduisii ent
a u - d e l à de leur territoire, sans ([ue nous fussions tentés ni les uns ni les
a u t r e s de pas.ser la nuit ensemble. Nous vînmes coucher à Benisanet.
L e 5, avant d'arriver à Siouth, nous trouvâmes un grand pont, une
é c l u s e , et une levée pour retenir les eaux du Nil après l'inondation; ces
t r a v a u x arabes, faits sans doute d'apiès les errements antiques, sont aussi
u t i l e s que bien entendus; en tout il nie paroissoit (jue la distribution des
e a u x dans la haute Egypte étoit faite avec plus d'intelligence que dans
la basse, et par des moyens plus simples.
S i o u t h est une grande ville bien peuplée, sur l'emplacement, suivant
l o u t e apparence, de Licopol i ou la ville du Loup. P o u r q u o i la ville d u Loup
d a n s un pays où il n'y a pas de loups, puisque c'est u n animal du nord?
é t o i t - c c un culte emprunt e des Grecs? et les Lat ins, qui nous ont transmis
c e t t e dénomination dans des siecles où l'on s'oceupoit peu de l'histoire
n a t u r e l l e , n'ont-ils fait aucune différence entre le chakal et le loup? On
n e trouve point d'antiquités dans la ville; mais la chaîne libyquc, .au pied
d e laquelle elle est bâtie, oiîre une si grande quantité de tombeaux, qu'il
n ' e s t pas possible de douter qu'elle n'occupe le territoire d'une ancienne
g r a n d e ville. Nous étions arrivés à une h eur e après midi; il y eut des vivres
à p r endr e pour l'armée, des malades à envoyer à l 'ambulance, des barques
e t des provisions, que les Mamcdot iks n'avoient pu emmener , dont il falloit
p r e n d r e possession: on résolut de coucher . Je c omme n ç a i par faire u n dessin
d e la Siouth moderne, à un e demi-lieue de la chaîne libyque {voyez pl. 3o,
J e courus bien vite la visiter; j'étois si envieux de toucher à une mont
a g n e égyptienne! J'en voyois deux chaînes depuis le Caire sans avoir pu
r i s q u e r de gravir aucune d'elles: j e trouvai celle-ci telle que j e l'avois press
e n t i e , une ruine de la nature, formée de couches horizontales, et régulières
d e pierres calcaires, plus ou moins tendres, plus ou moins blanches, ent
r e c o u p é e s de gros cai l loux mamelonnés et c o n c e n t r i q u e s , qui semblent être
les noyaux ou les ossement s de cette longue chaîne, souteni r scm existence,
e t en suspendre la destruction totale: cette dissolution s'opere journellem
e n t par l'impression de l'air salin qui pénèt r e chaqUe partie de la surface
d e la pierre calcaire, la décompose, et la fait, pour ainsi dire, couler en
r u i s s e a u x de sables, qui .s'amoncellent d'abord auprès du rocher, puis sont
r o u l é s p a r les vent s , e t d e p roche e n p r o c h e changent les vi l lages e l les champs
f e r t i l e s en de tristes déserts. Les rochers sont à près d'un quart de lieue
d e Siouth; dans cet espace est une jolie maison du kiachef qui géroit pour
S o l i m a n - b e y. Les rochers sont creusés pai' d'innombrables tombeaux, plus
o u moins grands, décorés avec plus ou moins de inagniiicence; cette mag
n i i i c e n c c ne peut laisser aucun dout e sur l 'ant ique proximi t é d'une grande
v i l l e : j e dessinai un des principaux de ces monument s ( voyvz [ilanchc 33,
. « " a ) , et le plan intérieur {mrmc plaiwhc). Tous les parvis intérieurs de
ces grottes sont couverts d'hiéroglyphes; il faudroit des mois pour les
l i r e , si on en sa v o i t la langue; il faudroit des années pour les copier: ce
q u e j'ai pu voir avec le peu de jour qui entre par la premiere porte, c'est