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massacrant ios chrétiens ot les Copthes, et les cnim<-nani, afin de Icnr faire
payer une rançon. Nous sortîmes do Kmé dans le silence et les téncliiTS de
la imit pour tâcher de les surprendre: nous marchâmes le long du désert
pour tromper leurs »Tant-postes. Lorsque nous arrivâmes au village oe'i
ctoit leur camp, nous ne les trouvâmes plus; ils en etoicnl partis à la uicme
heure que nous nous étions mis en marche de Ké.né ; ils avoient j)ris le
désert avec les Mamelouks, et s'étoient i-cndns à la Rittah.
Prendre Ir dAirrl, en terme militaire, dans la haute Egypte, n'est pas
seulement sortir des terres cultivées pour passer sur les sahles qui tes bordent
de droite et de gauche, mais s'cnfoneer dans les gorges qni traversent
les deux chaînes, et qui ont des enihoueîiures, qui deviennent des positions,
des especes de postes, qu'il est impoi'tant d'occuper et de défendre.
Les Mamelouks avoient .sin- nous l'avantage de les coiinoître tous, de sa\oir
le nombre de fontaines qu'on pouvoit y rencontrer. Dans la vallée qui
conduit de Cosséir au Nil il y a quatre de ces fontaines; une à denii-journéo
de Cosséir (l'eau de celle-ci n'est bonne que pour les chameaux); la seconde
à une journée et demie de la preiiiieie; puis celle de la Kittah , à
une autre journée et demie: cette dernicrc est très importante lorscjuon
veut occuper le déserf, parcequ'ellc se trouve placée à un point de diiimation
de trois chemins; dont "l'un, se dirigeant au sud-ouest, débouche
sur llédisi; im autre, portant plus k l'ouesl, aboutit à Nagadi; et le Iroisieme,
au nord-ouest, amene à Birambar, où il y a une quatrième fontaine;
et de Birambar on ai rive par trois routes d'égale longueur à Kous, à Kefth
ou Coptos, et à Kéné,
Desaix résolut de bloquer les Mamelouks dans le désert, ou du uioins de
leur barrer lu Nil, de gêner leurs mouvements, de les empêcher de pouvoir
se séparer sans risquer d'être détrnils, et enfin de les réduire par la faitii:
il a voit laissé trois cents hommes et du canon à Ré n é ; il alia se poster à
Birambar avec de l'infanterie, de la cavalerie, et de rartiUerie; et nous,
avec la vingt-uniemc légere, nous allâmes occuper le passage de Nagadi:
on eut rimpnulencc de négliger llédisi, ou bien l'on craignit de trop se.
disséminer. Si la gorge de llédisi avoit pu cire occupée, tous les beys de
la rive droite étoient obligés de se reiidr<>; il ne restoit plus que Mouratbey
à poursuivre, et plus de diversion à eraindir.
T.'cspérance de voi rThebcs en Tnarebant de ce còl è me tit encorci avec joi e
tourner le dos au Caire; mon destin étoit de marchcr avec ceux qui rcniontoient
le plus haut: je sui\is donc le géné^ral lielliard; je devois lejoiitdrc
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bientôt Desaix; nous avions fait la veille mille projets pour l'avenir: nos adieux
furent cependant mélaneoliqaes; cette fois, notre séparation me ¡.arut plus
douloureuse; devois-je penser que, si jeune, ce seroit lui <(ui me laisseroil
dans la earriere, que ce seroit moi qui le rcgretterois;' nous nous séparâmes,
et je ne l'ai plus revu. J'étois déjà à une lieuc, lorsque j e fus rcjoiiil au
galop par le brave T.atouriierie; il étoit revenu pour me dire adieu: nous
nous aiuùons beaucoup; louché de ce témoignage de tendresse, je fus
cependant frappé de son émotion: nous versâmes quelques lai-mes en
nous embrassant. Le métier de Ja guerre peut endurcir les êtres froids,
mais ses horreurs ne flétrissent point la sensibilité des ames lendns; les
liaisons formées au milieu des jM-iues et des dangers d'une expédition de
la nature de celle d'Egypte deviennent inaltérables; c'est une e.spcce de
c o n f r a t e r n i t é ; et lorsque des rapports de caractere viciuient encore resserrer
ces liens, le sort ne peut les briser sans troubler le reste de la vie.
E n traversant Rous, dans lequel j e n'étois pas entré lorsque j'avois dc.sceudu
le Nil, je trouvai au milieu de la place le couronnement d'une porte
de belle et grande proportion enfouie jusqu'à la simaise; ce seul vesiio-c,
qui n'avoit pu appartenir qu'à un grand édifice, atteste ((u<> Kous a été bàii
sur l'emplacement d'Apollinopolis parva ( voj cz pl. 80, /f 3 ). La gravité de
cette ruine offre un contraste avec tout ce qui l'environne qui.en dit plus
sur l'architecture égyptienne que vingt pages d'éloge et de dis.-icrtation ; ce
fraguicnt paroit à lui seul plus gi-and que tout le reste de la \ ine: à une
demi-licuc de K.ous dans le village de Elmécié j e trouvai le soubassement
de quelques édifices en grès avec des hiéroglyphes. Etoit-cc une petite ville
dont on ignore l'exi.stence? étoit-ce un temple isolé!' la dégradation de ce
monument étoit trop entière pour que j e pu.sse en donner une idée par un
dessin, et il étoit impo.ssible de faire le plan d'aucune de ses parties. une
autre dcmi-lieue de là, sur une petite érainencc, on voit plus distinctement le
souba.ssement d'un tejnple absolument isolé de toute autre espcce de ruines;
ou disiiuguc encore trois a.ssises de grosses pierres de grès qui servoient de
stylobalc, et acrivoient au sol du temple, devant Icfuel étoit ini poi tique de
six colonnes engagées dans le bas de leur fût. Ce m o n ume n t comcrvant enconquelque
forme dans la saillie, j 'en fis un petit de.ssin ( ¡¡i 55, i),Nous
marchâmes encore une heure et nous ari ivâmesà Nagadi, gros et triste village
a.ssis sur le désert 78, «"2); un parti de Mamelouks l'avoit dépouillé
il y avoil douze heures. A\ant d'enti'cr dans le désert, nous envoyâmes
des recoiuioi.ssanees en avant, qui prirent (¡uelques chameaux, et tuèrent
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