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faut parcourir au Caire. Cette maniere daller me paroissoit si agréable
que je passois ma vie sur les ânes: peu Av temps après mon arrivée, jVtois
connu de tous ceux qui les louent; ils étoient au fait do mes habitudes,
portoient mon porte-feuille et ma chaise à dessiner, et me servoient d'éciiyers
tout le join-: en leur payant courses doubles, ils montoient d'autres
ânes; et j'allois ainsi aussi vite qu'avec les meilleurs chevaux, et beaucoup
plus long-temps. C'est de cette maniere que, dans mes promenades, j'ai
fait les dessins du canal qui amene l'eau du Nil au Caire à Icpoque de
l'inondation ( voj i-z pl. 21, n" 2 ).
Chargé par l'institut d'un rapport sur des colonnes qui sont prés du
vieux Caire, je lis,
i " L e dessin de l'aqueduc {voyez nirme jjfam/ic, 11"'h);
2' Les tombeaux des califes à l'est du Caire, hors des murs ( 7>.p/. 21, nU);
3" Une vue du vieux Caire {mcoie planche, ii" ').)•,
Une autre vue <lu vieux Caire ( même planche, );
5° Une vue de Boulac ( n" planche );
6° Une autre vue des tombeaux des califes {planche x)-,
1° Une attaque d'Arabes {même planche, «"2);
8° Une vue du jardin de l'institut {pl. '25, n' voyez aussi l'explication
fie toutes ees planches ).
J'étois fort bien au Caire: mais ce n'étoit pas pour cire bien au Caire
que j'étois sorti de Paris. 11 arriva une caravane arabe; elle venoit du Mont-
Sinaï; elle en apportoit du charbon, de la gomme, et des amandes; elle
étoit composée de cinq cents hommes, et sept cents chameaux; c'étoit une
maniere bien dispendieuse d'apporter des marchandises qui devoient produire
si peu d'arg<'nt: mais ils avoient besoin de choses qu'ils ne pouvoicnt
trouver ailleurs, et ils n'avoient que du charbon à donner en échange:
(p)el<(ues uns des leurs avoient essayé d'escorter des Grecs, un mois auparavant,
pour savoir si les Français, maîtres du Caire, ne mangcoient pas les
Aral)es; on les avoit bien traités, ils arrivèrent en caravanes. Le général
en chef desiroit tiue quelqu'un profitât de leur retour pour prendre eonnoissanee
de la route de Tor: je fus tenté de faire celle des Israélites; j'offris
au général d'entreprendre ce voyage pourvu qu'il assurât mon retour: il
me diî qu'il garderoit le ch( •f de la caravane en otage : il rioil à mon
iiiiagination de penser que de là à douze jours je coniuiitrois et j'aurois
dessiné les sites de la partie merveilleuse de l'expédition de Moïse depuis
son depart de Memphis jusqu'à son arrivée dans le désert de Pbaran; que.
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sans y rester quarante ans, j'aurois vu en peu de jours le Mont-Sinaï, traversé
un des points de la terre dont les annales remontent le plus haut, le
berceau de trois religions, la patrie de trois législateurs qui ont gouverné
l'opinion du monde, sortis tous trois de la famille d'Abraham.
A la premiere proposition que je fis au chef des Arabes, il me dit que
pour tout l'or du monde il ne se cbargeroit pas de moi; que ce scroit
risquer ma vie, celle des moines du Mont-Sinaï, et celle de tous les individus
de la caravane, parceque deux tribus puissantes, les Ovatis et les
Ayaidis, avoient des vengeances à tirer des Français. Comme je venois
rendre compte de ma mission au général en chef, il donnoit des ordres
pour envoyer un convoi à Desaix : je vouh)is partir pour l'orient; je lui
demandai un passe-port pour le sud, et quelques heures après j'étois déjà
en chemin.
Le lendemain, à la pointe du jour, nous nous trouvâmes à une lieue
de Ssakharah, n'ayant fait, faute de vent, que quatre lieues dans la nuit.
Je fis un dessin de ce que je voyois des pyramides de Ssakharah, qui paroissent
occuper l'espace de deux lieues {voyezpl. n'/,). Quoiqu'éJoigné
du Oeuve, je p„s distinguer que la plus proche, de grandeur moyenne,
est a gradins élevés; viennent ensuite d'autres petites pyramides presque
détruites: à une demi-licue de celles-ci, il y en a une qui paroît avoir
autam de base que la plus grande de celles de Cizeh, mais moins d'élévation;
elle est très bien conservée: à une autre demi.lieue de cette derniere
il y en a une qui est la plus grande de toutes celles de Ssakharah; sa forme
est irréguliere, c'est-à-dire que la ligne de son arrête a la courbure d'une
console renversée, comme on peut le voir, même planche, même mtmèny.
tout près de celle-ci, il y en a une petite; et plus proche du Nil une autre
absolument en ruine, et qui n'a plus la foime que d'un rocher gris-brun;
sa couleur est produite par les matériaux, qui me parurent être de brique
non cuite: j e crois que le rivage du fleuve nous en cacboit encore d'autres
plus petites. Cette multitude de pyramides, la plaine des moines, les caves
des ibis, tout pi'ouve que le territoire de Ssakharah étoit la Nécropolis au
sud de Memphis, et le faubourg opposé à celui-ci, ou sont les pyramides
de Gizeh, une autre ville des morts, cjui lerminoit Memphis au nord, et
qui donne encore aujourd'hui la mesure de son étendue.
L'après-midi, vis-à-vis Missenda, nous vîmes encore une pyramide fort
grande, mais si fruste que dans tout autre pays que l'Egypte, à la grande
distiince d'où rm hi voit du Nil, on la prendroit pour un monticule:
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