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«UK combattants un m£-me p endant vers retraite; ce moment do relSchemcnt
saisi par rbommc supérieur qui sait prolîtcr de cette A,spos>tion
morale, pour employer les moyoïus qu'il a su réserver détermine toujoars
la vicloin- en sa faveur. Le corps de réserve commandé par Lanes cut ordre
de charger.
Au moment où les troupes turques étoient sorties pour couper les teles
de ceux qui étoient restés sur le ehau.p de bataille, le brillant Murât, ranimant
le courage des siens, effectue une nouvelle ebarge; il traverse avec
autant de vélocité que d'intrépidité tous les ouvrages de l'ennemi, le prend
à dos, et lui coupe tonte retraite. Ce mouvement téméraire ranime l'action,
qu i devient générale : ou attaque sur tous les points ; ils sont tous emportés ;
la déroute e.st entiere; tout ce qui n'a pas été tué est fait prisonnier:
la cavalerie charge les favards jus.pve dans la mer, on ils s'étoicnt jetés
pour regagner leur flotte à lu nage. 11 y avoit vingt mille Tures; six mille
furent faits prisonniers, quatre mille périrent sur le champ de bataille;
tout le reste fut noyé. De ce moment, plus d'ennemis : jamais bataille ne
fut plus nécessaire, plus absolue, jamais victoire plus complete; c'étoit celle
que Bonaparte avoit promise à ses braves en le.s ramenant de Syrie; ce fut
la demiere qu'il remporta en Egj-pte. Ce fut sans doute ou sou bon génie
ou le notre qui lui fit penser que la France et l'Europe entiere l'appeloient
à de.s opérations aussi glorieuses et plus utiles encore. Kléber, en l'embrassant,
lui dit dans un moment d'enthousiasme : Général , vous êtes grand
comme le monde, et il n'est pas assez grand pour vous.
Bonaparte m'ordonna de dessiner la bataille; et je me trouvai heureux
de pouvoir donner une image vraie' du théâtre de sa gloire : je choisis pour
le moment de la scene celui oii le pacha prisonnier fut amené au général
{voyez planche yo, le plan de ta bataVle 89, et C explication de ces planc/
ies ). , , •
De retour au Caire Bonaparte examina attentivement tous les dessins
que j'avois rapportés; il jugea que ma mission étoit achevée, me proposa
de partir, et de porter les trophées d'Aboiikir à Alexandrie. Le général
Berihier, dont j'avois éprouvé l'obligeance dans toutes les occasions, me
rendit mon neveu pour mon r(!tour aussi gracieusement (jue Dufalga me
r a \ o i t donné pcmr mon voyage. 11 n'y avoit (jue quel<[ues jours que j'avois
quitté Thebes, il me sembloit déjà voir Taris; mon départ qw. je n'entrevoyois
que dans l'avenir fut arrêté pour le lendi'main; un rêve se réalisoit
pour moi; poussé dans le sens de mes désirs j e m'y senlois précipité:
C.G.)
j e ne sais si j'en étois épouvanté: mais uu sentiment dont je ne saurois me
rendre compte me faisoit regretter le Caire; je ne l'avois presque jamais
habité, et cependant je l'avois toujours quitté avec peine. Je connus alors
combien, tout naturellement et sans qu'on s'en apperçoive, on est sensible
à la jouissance douce et égale que donne une température délicieuse, qui,
•sans besoin d'autres plaisirs, fait sentir à chaque instant le bonheur de
l'existence; sensation quotidienne à laquelle il faut attribuer ce qui est arrivé
souvent dans ce pays, c'est que des Européens, venus pour quelques mois
au Caire, y ont vieilli, sans imaginer la possibilité.d'en sortir.
Enfin dans cet étrange voyage, le projet, le dépai't, le retour, tout fut
une suite de surprises et de circonstances précipitées qui, soit pour aller,
soit pour revenir, me placèrent toujours à l'a va ni-garde. Je me trouvai en
deux jours embarqué dans un petit bâtiment armé qui nous attendoit à
Boulac ; je fis dans le chemin le dessin où le Nil se partage et forme le
Delta, et celui de Chebreis, où s'étoit donné le pi'emier combat contre
les Mamelouks ( voj-ezplanche 87, r, 2 rt 3 ) : le troisième jour de notre
départ, nous arrivâmes à Rahmanié; nous en repartîmes le lendemain
accompagnés d'un détachement de dromadaires, et de cinquante hommes,
avec lesquels nous nous rendimes à Demenhour, et, suivant le canal
d'Alexandrie, après avoir traversé la province de Garbie, nous arrivâmes
à Birket, où nous passanies la nuit. Le lendemain, nous vînmes déjeûner
à la fontaine de Béda, et dîner à Alexandrie.
A mon arrivée, le premier objet qui frappa ma vue fut l'équipement de
deux de nos frégates; elles étoient à l'entrée du port neuf, et déjà sur
une seule ancre : je ne voyois plus de vaisseaux anglais en croisiere, et je
commençai à croire aux prodiges: les généraux Lanes, Mural, Marmont,
étoient dans le trouble et dans l'agitation; nous nous entendions sans nou.s
parler; nous ne pouvions nous occuper de rien; nous nous retrouvions à
chaque instant à la même fenêtre, obsei-vant la mer, questionnant le mouvement
du plus petit bateau, lorsqu'à une heure de nuit, le 6 fructidor,
le général Mcnou vint nous dire que Bonaparte nous attendoit en rade.
Une heure après nous étions hors du port: à la pointe du jour, un vent de
nord-e.st nous mit en route; ce même vent dura deux jours, et nous sortit
des hauteurs de la croisiere anglaise. Obligés de masquer notre marche,
nous serrâmes les parages arides de l'ancienne Cyrénaique; contrariés par les
courants qui portent à la côte dans ce golfe encore inconnu et toujours
évité, ce ne fut qu'avec beaucoup de peine que, dans celte saison de calme
. ¡ii.-ll
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