Le lendemain 3o n'offrit riea <k très intéressant. Nous trouvâmes 1. lac
Bathen torta.-ux con.me le lac Joseph: le nivellement du sol de lEgJ-ptc
non-s on donnera quelque jour 1. eoupe, et nous éclaircira l'histouc tcnebreuse
de ses irrigations tant anciennes que modernes; avant cette operat
i o n tous les raisonnement s seroient téméraires, et les assert ions illusoires.
Nous vînmes coucher a Tata, grand village, habité par les Copthes, et un
chef arabe, -ini avoit rejoint Mourat-bey, laissant à notre disposition une
belle maison, et des matelas sur lesquels nous passâmes une mut delicieuse
nous pouvions si rarement dormir avec quelque eommodite!
Le lendemain, ."nivose, nous traversâmes des champs de po.s et de
feves déjà en grains, et d'orge en fleur.
A midi, nous arrivâmes à Mynyeh, grande et jolie ville, ou .1 y avoU
a u t r e f o i s un temple à Anubis. Je n'y trouvai point de rumes, ma.s de
belles colonnes de granit dans la grande mosquée, colonnes bien fuselees,
avec un astragale très fin: faisoient-elles partie du temple d'Anub.s? je
n e sais; mais elles étoienl sûrement d'un temps postérieur a celles des
temples de la haute antiquité égypt-»"«^
voyage.
Les Mamelouks étoient partis de la ville de Mynych, et avo.cnt manque
d ' ê t r e surpris par notre cavalerie qui y arriva quelques heures après; ils
avoicnt été obligés d'abandonner cinq bâtiments armés de dix pieces de
c a n o n , et d'un >nortier à bombe; ils en avoient enterré deux autres: plusieurs
déserteurs grecs qui les montoieot vinrent nous joindre.
Mynych étoit la plus jolie petite ville que nous eussions encore vue;
d'assez belles rues, de bonnes maisons, fort bien situées, et le N.l coulant
dans un large et riant bassin. J'en ils un dessin ( 3, planche ).
Ue Mynyeb à Come-èl-Caser, où nous couchâmes, la campagne est plus
a b o n d a n t e ' e t plus riche que toutes celles que nous avions parcourues, et
les villages si nombreux et si rapprochés, qu'au milieu de la plaine j'en
comptai vingt-quatre autour de moi; ils n'étoient point attristés par des
monticules de décombres, mais tellement plantés d'arbres si touffus, ,,ue
l-„n croyoit voir les tableaux que les voyageurs nous ont transmis des
h a b i t a t i o n s des isles de la mer Pacifique.
Le lendemain, k onze heures, nous nous trouvâmes entre Antmoé et
Hermopolis. Je n'etois pas très curieux de visiter Antinoé; j'avois va des
m o n u m e n t s du siecle d'Adrien, et ce qu'il avoit bâti en Egypte ne pouvo.t
r i e n avoir de piquant ni de nouveau pour moi, mais je brûlo.s d'aller a
Hermopolis, où je savois qu'il y avoit un portique célébré; aussi quelle
f u t ma satisfaction lorsque Desaix me dit: Nous allons prendre trois ecnls
hommes de cavalerie, et nous courrons à Achmounin, pendant que l'inf
a n t e r i e se rendra à Melaui.
E n approchant de l'éminence sur laquelle est bâti le port ique, je le vis
sè dessiner sur l'horizon, et déployer des formes gigantesques: nous traversâmes
le canal d'Abou-Assi, et bientôt après, à tra^•ers d.-s montagnes
de débris, nous atteig-nîmes à ce beau monument, reste de la plus haute
a n t i q u i t é .
J e soupirois de bonheur: c'étoit, pour ainsi dire, le premier produit de
toutes les avances que j'avois faites; c'étoit le premier fruit de mes travaux;
e n exceptant les pyramides, c'étoit le premier monument qui fût pour
moi un type de l'antique architectuie égyptienn.-, les prcuiieres pierres
qui eussent conservé leur premiere destination, tpn, sans mélange et altér
a t i o n , m'attendissent là depuis cp.atre mille ans pour me donner une idée
immense des arts et de leur perfection dans cette contrée. Un paysan
q u ' o n sortiroit des chaumières de son hameau, et que l'on uiettroit toiU
d ' a b o r d devant un pareil édifice, croiroit qu'il y a un grand intervalle
e n t r e lui et les êtres qui l'ont construit: sans avoir aucune idée de l'are
h i t c c t i i r e , il diroit: Ceci est la mai.sou d'un dieu; un homme .l'oseroit
l ' h a b i t e r . Sont-ce les Egyptiens qui ont inventé et perfectionné un si grand
e t si bel art? c'est sur quoi il est difficile de prononcer: mais ce dont je
n e pus douter dès le premier instant cpie j 'apperçus cet édifice, c'est que
les Grei-s n'avoient rien inventé et rien fait d'un plus grand caraetere. La
p r e m i e r e idée qui vint troubler ma jouissance, c'est que j'allois quitter ce
g r a n d objet, c'est que mes uioments étoient comptés, et (|ue le dessin
que j'allois taire ne pourroit rendre la sensation que j'éprouvois: il falloit
d u temps et un grand talent; je manquois de l'un et de l'autre; ma.s si
j e n'osois mettre la main à l'oeuvre, je n'osois m'éloigner sans em,„.rter
avec moi un dessin qtielconquc, et je ne me mis à l'ouvrage qu'en désirant
bien sincèrement qu'un autre plus heureux que moi pC.t faire un jour ce
que j'allois ébaucher ( W i , pla'iehc 33 ).
Si quelquefois le dessin donne un grand aspect aux petites choses, .1
r a p e t i s s e toujours les grandes; les chapiteaux, qui paroissent pesants, les
bases ramincies, qui sont bizarres dans le dessin, ont par leur masse .,uel.,ue
chose d'imposant qui arrête la critique: ici on n'ose adopter m rej-aer;
mais ce qu'il faut admirer, c'est la beaut é des lignes principales, la perfection
' ^ i l