Sur les causes qui ont enfoui les os d’Eléphans.
( Addition au résumé du premier chapitre , page 204. )
M. Jean André Deluc , fils et neveu de deux des hommes qui
ont rendu le plus de services à la Géologie, a fait insérer dans la
Bibliothèque universelle de Genève, février 1822, pag. 118, des
considérations intéressantes sur le gisement des os fossdes d’élé-
phans, et sur les catastrophes qui les ont enfouis.
Bien que la dissémination de ces os soit générale dans toute l’Europe
et dans tout le nord de l’Asie, M. Deluc ne pense pas que les
éléphans occupassent en même temps tous ces pays , ni que 1 irruption
de la mer qui les fit périr fût générale, unique , et momentanée ,
car autrement, dit-il, on ne sauroit s’expliquer les coquilles et les
autres corps marins qui se sont fixés sur eux, ni les couches de sable ,
de marne, etc., dans lesquelles ils ont été enterrés ; phénomènes qui
indiquent un long séjour de la mer. Il suppose donc que ces pays
étoient partagés en îles d’étendues variées, sujettes à des révolutions
qui les fesoient passer alternativement sous les eaux de la mer pour
un temps plus ou moins long. Les os que 1 on trouve epars sont ceux
des animaux qui étoient morts naturellement sur ces îles. Lorsqu’ils
sont en grands amas , c’est que les eaux en s elevant avoient obligé
ces animaux à ce concentrer dans les lieux élevés, où ils périrent,
ou hien qu’arrivant avec impétuosité elles avoient entraîne les os
épars vers les lieux bas. Ils ont été alors diversement transportés,
roulés, recouverts de couches variées ou mêlés avec des animaux
marins. Un affaissement plus général ayant fourni aux eaux de la
mer un lit nouveau et plus profond, elle abandonna une grande
partie de l’ancien, et les îles qui étoient restées se trouvèrent réunies
en un seul continent, qui est celui où nous trouvons maintenant les
ossemens fossiles.
Ainsi, selon l’auteur, les os n’ont pas tous été enfouis en meme
temps. Ceux sur lesquels il s’est fixé des corps marins, ou qui en sont
accompagnés, seront au nombre des plus anciennement recouverts
au contraire, ceux qui ont conservé tout ou partie de leurs chairs auront
été les victimes de la dernière de ces révolutions. Peut-être même
l’Éléphant de M. Adams n’a-t-il jamais été submergé, et n’a-t-il péri
que par le changement subit du climat, résultat de ces révolutions.
Ces hypothèses qui, de l’aveu de l’auteur, sont un développement
des vues de son oncle, ne me paraissent avoir rien de contraire aux
idées générales que j’ai exprimées, soit dans mon chapitre des Elé-
phans, page 201 et suivantes de mon premier volume, soit.dans le
résumé de ma première partie, page 223 et suiv. de mon second
volume, soit surtout aux pages LXIII et LXIV demon Discours
préliminaire.
Néanmoins je ne pense pas qu’il y ait de preuves d’un changement
de climat. Les Éléphans et les Rhinocéros de Sibérie étoient couverts
de poils épais et pouvoient supporter lé froid aussi bien que les Ours
et les Argaîis; et les forêts dont ce pays est couvert à des latitudes
fort élevées leur fournissoient une nourriture plus que suffisante.
Sur le grand Mastodonte et son existence dans l ’ancien continent.
( Addition à la page a i i du premier volume. )
Malgré le témoignage de Pallas, et la dent remise à Buffon par
M. de Vergennes, comme venue de la petite Tartarie, je doutais
encore que le grand Mastodonte, si abondant en Amérique ,. eût
laissé de ses dépouilles en Europe.
Je ne puis guère conserver cette incertitude depuis que M. l’abbé
Borson, professeur de minéralogie à Turin, m’a adressé le modèle
en plâtre d’une dent trouvée dans le territoire d’A s t i, au même lieu
où l’on a découvert plusieurs dents de Mastodontes à dents étroites.
Sa couronne est longue de 0,18, et large de 0,09.
On y voit quatre crêtes transversales divisées chacune en deux
collines, dont la seconde, un peu usée, présente déjà des commen-
cemens de lozange. Cependant ces crêtes m’ont paru un peu plus
obliques que dans les dents ordinaires d’Amériqne. Seroit-ce encore
une nouvelle espèce ?