de ses grandes pectorales. En supposant donc qu’il n’y ait pas eu
d’autre dorsale, comme il est vraisemblable d apres cette empreinte,
c’est entre les deux genres Brochet et Mormyre qu’il faut choisir. Si
l’on avoit la tête, le choix seroit bien aisé; mais même sans elle| on
peut remarquer que les Brochets ont tous le corps allongé, et que les
Mormyres l’ont raccourci ; les Brochets ont les os du bassin larges,
et souvent augmentés d’un appendice latéral ; les Mormyres les ont
grêles comme on les voit ici. Du reste les deux genres ont la queue
fourchue. S’il falloit donc se prononcer, je trouverais plus de vraisemblance
en faveur du genre des Mormyres. O r , le genre des Brochets
a bien quelques espèces d’eau douce , mais cèlui des Mormyres
habite tout entier dans le fleuve du N il, où il se trouve pêle-mêle avec
des Tortues trionyx, des Crocodiles , et des poissons acanthoptérygiens
thorachiques, le long de rivages ombragés de palmiers , et il seroit
sans doute assez piquant de le retrouver à Montmartre dans une
réunion tout-à-fait analogue (r).
On pourrait cependant opposer, quant au caractère tiré des nageoires
anale et dorsale, le nouveau genre des poecilies, séparé par
Bloch des Cobites ; c’est un genre d’eau douce de la Caroline, à forme
allongée, dont le corps se termine par une nageoire entière , et qui
n’auroit pas beaucoup de rapports avec notre fossile, si Bloch n y
avoit placé un autre poisson aussi d’eau douce, de Surinam, a corps
comprimé et à nageoire caudale fourchue ; c’est son Poecïlia vivipara,
représenté dans son Système, pl. 86, fig. 2, et qui ressemblerait
assez à notre fossile si ses nageoires anales et dorsales avoient plus de
( ,) J’ai dû la possibilité de connoître l’ostéologie des Mormyres aux belles collections
faites en Égypte par mon savant confrère M. Geoffroy ; le Uormyrus çjrprinoides, et sine espèce
nouvelle que M. Geoffroi appelle Labiatus, ont les nageoires ainsi placées vis-à-vis l’une
de l’autre. Dans le M. canume, et le M. herse, la dorsale s’étend sur presque toute la.longueur
du dos ; du reste l’on se tromperoit beaucoup en refusant avec Linnæus un opercule des branchies
à ces poissons, et en ne leur accordant qu’un rayon branchial ; ils ont tous un opercule
et plusieurs rayons. Voyez mon régné animal, t. I I , p. 189, et la grande description de
l’Égypte.
OSSEMENS ET SQUELETTES DE POISSONS,
rayons et si son corps étoit un peu plus allongé. C est d ailleurs un
très-petit poisson (1),
11 reste.donc du doute entre des poissons du Nil, et d’autres dont
le congénère n’a encore été trouvé qu’à Surinam; mais dans tous les
cas, notre fossile seroit d’un genre: d’eau douce dont les espèces habitent
aujourd'hui des pays chauds, et des pays, où il se trouve aussi
des Crocodiles et des Palmiers, et où les Trionyx ne manquent probablement
pas ; car le Trionyx de Caroline et de Géorgie habite aussi
la Floride. M. de Laçépède rapporte que le chevalier de Widerspach
a cru l’avoir trouvé sur les bords de l’Oyapock (2) ; ! dans la Guyane,
et c’est aussi de la Guyane qu’est venu le jeune individu décrit par
M. Blumenbaçh (3), et gravé dans l’ouvrage de M. Schneider (4) ,
sous le nom de Testudo membranacea.
Notre quatrième poisson, qui est plus mutilé que tous les précé-
dens, me paraît cependant pouvoir être reconnu pour une Truite ;
mais je l’ai jugé par d’autres moyens que les précédens, car il n’y reste
ni nageoires ni aucun autre caractère extérieur. C’est dans le cabinet
de M. de Drée que je l’ai observé.
Il s’est moulé et eu partie attaché sur un morceau de glaise adhérant
au plâtre, fig. n . Ses yeux y ont laissé leur empreinte en a , et
une pellicule qui paroît avoir été une de leurs membranes ; sa physionomie
m’ayant frappé comme rappelant celle de la Truite, j en
fis la comparaison et je reconnus 1°, l’empreinte b de la plus grande
partie de la mâchoiip inférieure, avec une dent encore en place ;
2°. l’os analogue à l’os carré, auquel cette mâchoire s’articule c y
3°. l’os palatin du même côté d, qui vient rejoindre l’os carré; 4°- des
( 1) On peut consulter utilementsur les Poecilies, les Lebias, les Cyprinodons et lès autres petits
poissons de cette famille , le mémoire de M. Valencienne, sur les poissons fluviatiles de
l'Amérique équinoxiale, inséré dans le deuxième volume des' observations zoologiques de
M. de Humboldt.
(2) Lacep., Hist. des Quadr. ovip. , art. de la Tortue molle.
(3) Man. d’Hist. Nat. , V I I Ie. édit., p. 238.
(4) Hist. des Tortues, en allemand, pl. I.
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