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de bonne terre fubftantielle de trois pouces d’é-
paifleur , qui aura été établi au fond d'une
caifle ; ce fond aura été précédemment percé de
plufieurs trous pour l’écoulement des eaux. Les
touffes des plantes , rangées le plus économiquement
poflible pour la place, au fond delà
caifle, feront couvertes de l’épaifleur de quatre
doigts de moufle frauhe , qui y fera afllijettie par
des traverfes de bois clouées aux côtés latéraux
de la caifle, de manière qu’aucun mouvement ne
puiffe déranger les plantes. L’ intervalle qui doit
fe trouver entre les plantes & le couvercle de la
caifle, doit être de fix pouces environ, afin que
les plantes venant à pouffer, trouvent de quoi
s’élever. Le couvercle doit s’ouvrir & fe fermer
à volonté.
Les foins qu’exigent ces plantes pendant la tra-
verfée, font d’humeéter légèrement la furface
de la moufle lorque les racines ne pouffent point
encore en dehors, de les arrofer un peu plus fréquemment
lorfqu’elles commencent à pouffer,
d’ouvrir les caiflls & de les tranfporter à l'air
libre toutes les fois que le tems fera doux, fur-
tout les nuits j de les fermer foigneufement lorf-
qu’il fera froid, ou qu’ il tombera des pluies abondantes
qui hume&eroient trop la terre ; enfin,
de garantir lès jeunes plantes du ravage des fou-
ris, des rats & des animaux domeftiques pendant
le trajet.~
Les envois de cette nature ont l'avantage de
pouvoir être préparés long-tems avant le départ
des vaiffeaux, & de donner à celui qui les fait,
les moyens de profiter des occafions imprévues.
Ils reuffifient mieux, ayant été difpofés un mois
avant leur départ, parce que les racines n’ayant
été dérangées par aucun mouvement depuis leur
tranfplantation , & la terre s’étant confolidée en-
tr’elles, ne forme qu’une maffe qui ne peut être
défunie par le roulis du vaiffeau pendant la traversée.^
Les arbres & arbuftes exigent plus de foins
pour être envoyés en Europe, & y parvenir en
bon état. Il n'eft que deux faifons pour faire ces
envois avec fruit; favoir : le printems & l’automne,
tems où ces végétaux font prefque dans l'inaétion,
principalement dans les pays froids. L’automne
convient mieux pour les envois d’arbres ruftiques,
ui ne craignent pas les gelées de quatre à cinq
egrés; les plus délicats réufliffent mieux étant
envoyés au printems.
i° . Il faut choifir de jeunes fujets bien fains &
vigoureux, dont les tiges aient à peu près la grof-
feur du pouce par le bas, & branchus dès leurs
racines, s’il eft poflible » les déplanter avec foin ,
fans caffer ni froifler leurs racines,
i ° . Les planter~le plus près poflible les unes
des autres dans des caiffes percées dans le fond
de plufieurs trous pour l'écoulement des eaux.
Pour faire cette opération avec fuçcès , voici
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les moyens qu’on doit employer. La caifle, d’un
bois folide, fera placée de ^niveau fur des tal-
feaux qui éleveront le.fond de la caifle de quelques
pouces au deffus du fol , dans un lieu à
1 air libre, mais abrité ' entièrement du foleil.
Dans le fond de la caifle & fur les trous qui auront
été pratiqués , on placera quelques coquilles
ou menues pierrailles pour empêcher la
fortie de la terre, &f faciliter celle des eauxj
après cela on fera un lie de terre meuble &
fubflantielle de deux à trois pouces de haut, dans
toute la largeur de la caifle j enfuite , fi les arbres
& arbuftes qu’on fe propofe d’envoyer, font à
racines nues, on les difpofera les uns contre les
autres, en plaçant ceux qui en font le moins pourvus
, entre les autres, & le plus près qu’il fera
poflible pour économifer la place ; enfin, avec de
la terre paffée au crible & bien lèche pour qu elle
s’infinue dans tous les vides des racines ; on enterrera
les arbres jufqu’au collet, ayant foin, a
mefure qu’on la verfera dans la caifle, de la taffer,
foit en battant la caifle contre terre , foit en fe
fervant d’un plantoir pour la fouler entre les racines
, & faire en forte qu’elle n’y laiffe aucun
vide. Cette opération faite, on arrofera les califes
à plufieurs reprifes, jufqu’à ce que 1 eau perce
par les trous d’en bas, & on rabattra les jeunes
arbres à fept ou huit pouces au deffus de la terre,
plus ou moins, félon que le couvercle de la caifle
aura d’élévation au deffus du niveau de la terre
dans laquelle feront plantés les arbres. Le couvercle
fera un bifeau porté fur des gonds, afin
qu’il puiffe s’ouvrir & fe fermer à volonté.
Les caiffes ainfi garnies, ces arbriffeaux pourront
refter plufieurs mois dans la même pofition
avant d’être embarqués : ils n’exigeront d’autre
culture que d’être arrofés de tems en tems , fui-
vant le befoin des arbres. Lorfqu’on fe difpofera
à les envoyer en Europe, la veille de leur départ
on pourra couvrir la furface de la terre de differentes
femences prifes dans les efpèces d’arbres
dont les graines ont* befoin d’être Cernées auflitôt
qu’elles font recueillies, telles que les différentes
efpèces de café , de thé, de manglier, de laurier,
de canellier, de mufeadier, de giroflier , de
myrte, &c. On les recouvrira de terre de l’épaif-
feur d’un pouce, & on étendra par-deffus un lit
de moufle qu’on affujettira par un grillage fem-
blable à celui décrit plus haut à l’article des plantes
vivaces.
Si les arbuftes, au lieu d’être à racines nues,
font en motte, c’eft-à-dire, garnis de terre autour
de leurs racines, la réuflite en fera plus fûre.
Alors on rapprochera ces mottes les unes des
autres dans la caifle, & , pour regagner la perte
de la place qu’elles occafionneront par leur volume
, on pourra planter, entre chacune d’elles,
des boutures d’arbres qui fe propagent de çette
manière, tels que les palétuviers , les figuiers &
autres arbres fpongieux, D’ailleurs 9 on pourroit
femer j
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femer, comme dans les autres, des graines, & les
arranger, pour le refte, de la même manière.
On conçoit affez que ces envois, étant en pleine
végétation, exigent plus de foins pendant la tra-
verfée , & que par conféquent il faut les garantir
plus foigneulement du froid, de l ’extrême chaleur,
de la féchereffe, de la trop grande humidité,
& furtoutleur donner de l’air toutes les fois
que cela fera poflible , afin que les pouffes ne s’étiolent
point. Il conviendra aufli de les tailler fou-
vent, de couper les branches des individus trop
vigoureux qui pourroient nuire aux autres; enfin,
de vifiter les caiffes prefque tous les jours, afin de
remédier à une multitude d’accidens qui peuvent
arriver.
Les plantes fucculentes, connues fous la dénomination
de plantes grajfes, telles que les raquettes,
les cierges, les aloés, les euphorbes, les pourpiers
ligneux, les ficoides, &c. ne pourront s’envoyer
en nature de la même manière que les arbriffeaux
: il ne faut pas les mêler avec eux, parce
qu’elles exigent une autre culture : on en fera des
caiffes féparées : la terre où elles feront plantées
près les unes des autres, doit être d’une natuie
très-compaéte. Six à huit pouces d’épaifftur au
fond d’une caifle fufliront pour les recevoir. Au
lieu de moufle, on mettra fur la terre une couche
de paille longue, affujettie fortement par un grillage
de bois ; & lorfque ces plantes auront été
placées dans les caiffes, on les arrofera affez abondamment
pour confolider la terre autour des racines
; enfuite on attendra l’occafion de les embarquer
, & pendant la traverfée on leur donnera
de l’air le plus fouvent que l’on pourra: on les
garantira furtout de l’humidité & du froid.
Voilà à peu près toutes les précautions effen-
tielles qu’on doit prendre pour le tranfporr des
graines & des plantes en nature. L’intelligence
des perfonnes chargées de faire ces envois fup-
pléera à une infinité de petits détails qu’on n’a pu
prévoir. Il refte feulement à remarquer qu’il convient
d’embarquer ces envois fur des vaiffeaux qui
ne traverfent pas des parages glaciales , & dont
l’arrivée en Europe tombe vers la moicié du printems
ou au commencement de l’automne, le moins
qu’on pourra dans le fort de l’é té , & jamais en
hiver, autrement tout feroit perdu.
Comme un grand nombre de plantes exotiques
font employées dans la matière médicale, qu’il eft
fouvent difficile de fe les procurer en bon état, &
qu’il eft toujours important qu’elles foient bien
obfervées & recueillies par des hommes éclairés,
afin de mettre à même de reconnoitre les falfifi-
cations, j’ai cru devoir ici rappeler les précautions
qu’exigent leur récolte & leur defficcation.
Pour recueillir les plantes que l’on veut deffécher,
il faut choifir un jour beau & ferein, attendre
que le foleil ait fait difparoïtre la rofée de la
terre, & qu’il n’y refte plus aucune humidité. Le
moment le plus favorable eft le milieu du jour :
Botanique. Tome VUT
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trop matin ou trop tard, les plantes ne feroient
pas affez fèches.
L’époque où les plantes ont le plus de vigueur,
eft celle de leur floraifon ; mais comme on ne le
fert pas toujours de la plante entière, & que chacune
de fes parties a fouvent des propriétés différentes
, il faut auffi les recueillir à des époques
différentes.
Les racines peuvent être recueillies en toute
faifon lorfqu’elles font charnues ; mais fi, à mefure
que la tige monte, elles deviennent (igneufes,
il faut prévenir fon entier développement, furtout
dans les plantes annuelles.
Les racines vivaces & bifannuelles, reprenant,
après la maturité de leurs graines, de nouveaux
fucs qu’elles ne font .plus contraintes de fournir
aux feuilles & aux fruits, fe trouvent alors mieux
nourries & plus vigoureufes. C ’eft le moment de
les arracher, c’eft-à-dire, quelque tems après la
maturité parfaite de leurs fruits, ou, au plus tard ,
dans l’automne, avant les premières gelées. Il fiuc
choifir les racines faines, entières & bien nourries.
' Les bois fe recueillent auffi en tout tems; mais
il faut que les arbres ne foient ni trop jeunes ni
trop vieux. Les écorces doivent être prifes fur de
jeunes arbres, & dans l’automne, excepté celle
des arbres réfineux, qu’il faut enlever avant que
ces arbres foient en pleine fève. On abandonne
les écorces vieilles & durcies, qui font privées
de fève & de vertu. Quant aux feuilles, il faut
attendre, pour les recueillir, que les fleurs foient
épanouies. On doit cependant en excepter celles
des plantes aromatiques qui n’acquièrent leur efficacité
qu’après la chute de la fleur, &: lorfque les
femences font arrivées à leur parfaite maturité.
Dans les labiées, il faut cueillir la corolle avec le
calice, parce que, dans cette famille, la partie
odorante réfide particuliérement dans le calice.
Les liliacées ont leur odeur fixée tant dans leurs
pétales, que dans la pouffière des étamines. Elle
s’évapore par la defficcation : il eft inutile de les
deffécher. Pour récolter les femences, il faut en
attendre la parfaite maturité, & les conferver dans
leurs capfules.
L’art de deffécher les plantes pour la matière
médicale confifte à les priver de leur humidité, à
les préferver de la fermentation, & à conferver
leur odeur & leurs couleurs. L’on n’y parvient
que par une prompte defficcation, qui exige cependant
quelques précautions dans certaines plantes.
On peut les deffécher au foleil ou dans des
étuves, à l’ombre, au grand air ou dans des jieux
renfermés, félon leurs qualités.
Les plantes inodores ou humides , telles que
les borraginées , les véroniques, &c. exigent une
prompte defficcation. On peut les expofer au foleil
ou à l’air libre, ayant foin feulement de les recouvrir
d’une feuille de papier. Les aromatiques
au contraire ne pourroient fupporter l’aétion du
È e e e e