
eft. d’autres qui changent à chaque génération. La
culture influe beaucoup fur la production des unes
& des autres j c’eft ainfi que , dans un jardin dont
terre eft bien engraifiee & bien préparée , on
voit chaque année reparoître les mêmes variétés
dans les légumes , dans les fleurs : ces changeo
n s feront plus ou moins durables, plus ou moins
intéreffans, félon la partie de la plante qu’ils affectent.
M. Adanfon remarque que telle famille
ne varie que dans fes racines , telle autre dans fes
feuilles > d’ autres dans leur grandeur, leur couleur,
kur duvet, tandis que d’autres changent plus facilement
par leurs parties fexuelles & par leurs
fruits.
»Ces changemens, auxquels les plantes font
ainfi difpofées, & qui tiennent a leur nature, font
flus faciles a obtenir & plus durables, furtout fi
’on hic attention au nombre, à la force, à la durée
des caufes qui fe réunilfent pour les produire.
C ’eft ainfi que l’on voit la culture opérer, fur les
graines femées dans différens jardins, dans différens
climats , à différentes expofitions, des changemens
qui permettent à-peine au botanifte exercé
de les rappeler à la planté fauvage dont elles émanent
, tandis que le jardinier ne peut fe perfuader
qu’elles foient le produit deS graines d’une variété
diftinguée dans un autre jardin. La plupart de nos
fruits offrent des variétés affez ftables : quelques-
unes même parmi les prunes, les pêches, les abricots,
&c. fe perpétuent par le noyau , prefque
fans aucun changement j au moins ne fouffrent-
elles pas d’altération confiante par la bouture &
par la greffe. Ce dernier art, qui confifte à faire
en forte que les aubiers de deux arbres fe touchent
exaClement, & que les vaiflfeaux renfermés entre
les écorces & les aubiers puiffent s’aboucher &
établir une communication entre les deux fèves,
a fingufièrement- perfectionné les fruits âpres de
la campagne. La branche adoptive, que l'on nomme
greffe3 & que le cultivateur fubftitue aux branches
véritables, s’affimile les fucs qu’elle reçoit de la
tigé du fauvageon , - & finit par donner des fruits
fembiables à ceux de l’arbre dont elle a été détachée
5 mais on préfnme que, par la femence, ils
reviendroient à la première efpèce. Il feroit inté-
reffant de s’affurer, en femant à plufieurs reprifes
les graines de ces fruits -, de ce que peut l’art, &
de ce qui n’eftdû qu’à lai nature. On ne peut dire
fi les graines de pommes-d’api donnent conftam-
menc des apis , ou fi elles donnent indifféremment
desreinettes, des apis 3 dcsfenouülettes; &c.
Comme la différence n’exilte pas feulement dans
les fruits, mais encore dans le bois, dansl’écorcé,
dans le bouton, dans les feuiiles~& les fleurs, dans
le tems de la floraifon & celui de la maturité,
dans le tempérament, enfin dans toutes, les parties,
il eft permis de douter fi la greffe peut opérer
de tels changemens ; mais ce n’eft qu’un doute
*m’ii.feroit bierr important de lever en femant à
plufieurs reptiles les graines de ces différens fruits.
Ces expériences intérelfent non-feulement la phy-
fique des plantes, mais elles pourroient peut-être
nous procurer des variétés encore plus intéref-
fantes que celles que nous poffédons.
» Il faut bien diftinguér dans les plantes les variétés
de ces fortes de monftruofités, de ces changemens
accidentels, de ces déformations qui font
occafionnées, ou par la préfence.des champignons
parafites, ou par la piqûre des infe&es. Lorfque
ceux-çi attaquent les étamines ou le piftil du
faule, les écailles du chaton fe prolongent en
feuilles, & forment ce que l’on nomme la rofe du
faule. Lorfque le fapi.n eft prêt à développer fes
cônes à fleurs femelles, les écailles rouges deviennent
vertes, pointues, & fe changent en. feuilles ,
dont la bafe eft bien plus large que celle dès autres
feuilles de l’arbre, & imite les cônes du hêtre.
C ’eft aux infeétes que l’on doit attribuer ce fruit à
trois pointes que l’on obferye fur le genévrier 5 c’eft
aux mêmes caufes qu'il faut rapporter les baies du
peuplier, les longs follicules pourprés du piftaçhier-
térébinthë, les tubérofités, de l’épervière des murailles,
du lierre terreftrè > les gales du chêne, &c.
Enfin, la prolification de la camomille eft produite
par une mouche ichneumone. Mais tous ces chan-
chemens tiennent à^l’individu, & ne peuvent fe
tranfmettre comme les variétés. Il en eft de même
des maladies des plantes, qui font fouvent l’effet
des intempéries de l’air, des excès de chaleur &
de froid, du vice de la tranfpi ration, de l’épaiffif-
fement de la fève., de l’obftrudfion des vàiffeaux
qui eaufent des gonflemens extraordinaires, des
dépôts de gommé & de réfine , une forte de pléthore,
&c. » ;
Après avoir expofé les principaux phénomènes
des variétés dans les plantes, les caufes les plus
ordinaires qui les produifent, celles qui peuvent
les faire difpâroître ,-leslobfervations de Linné,
de Durande & d’autres-auteurs ,- il refteroit; à
examiner fi réellement ces variétés ; peuvent >fe
convertir en de nouvelles .efpèces en fe repro-
duifant à la longue conftamment les mêmes!. Cette
queftion difficile, mais importante pour la détermination
des efpèces, ne peut guère .laiflTer .de
doute fur l’exiftence d’efpèces de nouvelle création,
produites par des variétés perpétuées d’abord
par la culture, & auxquelles celle-ïCi a donné
des caraélèrés qui à la fin font devenus permaneus.
Dans tel terrain, fous tel climat qu’on les cultive,
elles fe montreront avec leursnou veaux cara&ères ,
& fi ceux-ci finiffent par difpâroître, il leur faudra
peut-être pour cela un tems auffi long que celui
qu’elles ont mis à les acquérir. 11 s’établira peut-
être des nuances, comme il arrive pour un grand
nombre d’efpèces, qui rendront la nouvelle &
l’ ancienne prefque méconnoilfables, & tel eft en
général l’effet des variétés mêmes dans la nature
fauvage, mettant à part la culture, qu’elles rapprochent
tellement deux efpèces vorfines., qu’il
devient difficile de les bien caraétérifer, & font
quelquefois douter fi ce que nous appelons;
dàps notre langage fcientifique & d’après nos, fyf-
tèrnes, éxifte réellement dans la nature’, qui a
créé des individus, friais chacun avec ùh caractère
particulier & riiftinétif, quoiqu’ils en offrent un
très-grand nombre de communs, par lefquels ils fe ;
rapprochent. Tous ceux qui offrent les m,êraes
formes dans leurs parties effentielles, dans leurs
tiges., leurç. feuilles, leurs fleurs & leurs fruits,
nous'les avons réunis en leur donnant le nom
à3efpèce j & nous avons réuni dans un même genre
toutes les efpèces qui, différéntes par quelques-
unes de leurs parties, fe reflfembloient par celles
de la fructification. Cette diftnbution , fi importante
pour l’étude , fi heureufe pour claflfer avec
ordre, dans notre efprit, les productions de la
nature, n’eft-elle pas plutôt une invention humaine,
qu'un ordre établi par la nature ? A-t-on
pu jufqu’alors établir, d’une manière prëcife, les
bornés d’un genre, d’une efpèce? Si elles étaient
bien déterminées -, auroit-on des doutes auffi fré-
quens fur la place que doit occuper telle.pu .telle
plante dans nos diftributions méthodiques ? Héfi-
terions-nous à prononcer fur l’efpèce ou la variété
? Sans doute celui qui n’a obfervé qu’un
certain nombre de plantes , celui qui établit un
genre fur un petit nombre d’efpèces aflfez bien,
tranchées, n’a aucun doute fur ce genre & fur ces
efpèces 5 mais il arrive, comme il eft arrivé de
nos jours pour les genres établis par Linné, que,,
par fuite d’obfervatiohs, ces efpèces deviennent
beaucoup plus nombreufes j qu’il s’en trouve d’intermédiaires
qui affoibliffent le caractère e{Tende!
des premières ; viennent enfuite les variétés
qui s’établiflfent à leur. tour entre les intermédiaires,
tellement que les deux efpèces primitives
& bien réparées fe trouvent très-rapprochéés, &
qu’on arrive de l’une à l’autre par des nuances à
peine fenfibles. Comment alors prononcer fur le
véritable caractère de l’efpèce? Qu’avons-nous
fait d’abord pour l’établir ? Nous avons comparé
deux , trois efpèces enfemble ; il nous a été facile
d’en faifir les différences : dès-lors nous avons prononcé
fur leur caractère fpécifique , comme fi la
nature elle-même l’âvoft tracé. Arrivent d’autres efpèces
du même genre, qui nous étoient inconnuesr
une partie des caractères effentrels des premières
leur font communs ; ils ceffent dès-lors d'être ex-
clufifs ; il faut en chercher, en établir d’autres,
qui quelquefois font détruits.à leür tour par de
nouvelles découvertes. La plupart des auteurs qui
. ont éèrit depuis Linné,. & qui ont rapporté les
efpèces nouvellement découvertes à celles qu’il
avoit caradtèrifées, ont fenti la néceffité de changer
la plupart de fes phrafes fpécifiques,qui étoient
fort bonnes pour la diftinétion des plantes qu’il
décrivoic, mais qui ceffoient de l’être à mefiire
que les genres fe peuploient de nouvelles efpèces.
Je fuis donc très-porté à croire, d’aprèrees ob-
fervations, que l’établiffemenc des genres & des
efpèces , très-avantageux pour la feiençe, eft plutôt
une belle invention de l’efprit humain, qu’une
diftinCHon rigoureufe établie par la nature.
VARIOLAlRE. Varielarià. Les variolaires ,
d’après Builiard, forment un genre qui re'nferme
dés plantes coriaces & comme ligneufes, tantôt
compoféesde plufieur^s loges réunies fous la forme
d’un petit bouton , tantôt à une feule loge ; elles
ne viennent jamais que fur les écorces des arbres
morts ou languiffans, s’ÿ implantent plus ou moins
profondément, & y reftent enchâffées comme dans
le chaton d’une bague. Leurs femences, mêlées à
un fuc glaireux, occupent l’intérieur de leurs petites
loges.
« II y a les plus grands rapports entre les vario-
laires & certaines efpèces à!hypoxylons Bull.; mais
fi les variolaires ont une pouffière fécondante, on
ne l’apperçoit point. De plus, jamais elles ne recouvrent
les déchirures faites à l’écorce „comme
les efpèces des hypoxylons avec lefquelles elles
ont le plus de reffemblànce. »
Les hypoxylons du même auteur , & d’après lui,
font coriaces , fouvent même prefque ligneux.
Dans; Jetir jeuneffe ils paroifïènt c'ôfnmê faupou-
drés d’une pouffière fécondante, ordinairement
très-vifible > ils'ont leurs . femences nombreufes
mêlées à un fuc glaireux , & renfermées dans de
petites loges. La plupart des efpèces de ce genre
baillent fur du bois dépouillé.de for» écorce; celles
qui viennent fur les écorces recouvrent pour l’or-
dinaire3lès déchirures quelles ont faites àJfetit
épiderme, dans le fieu de leur infertion. Quelques
hypoxylons font à une feule loge ; la plupart font
formés d’un grand nombre; de loges réunies fous-
la forme d’une croûte : il y a auffi quelques efpèces
qui, de l’intérieur de leurs loges, ptoduifenc
des fiiamèns plus ou moins aiongés.
« Il ne faut pas confondre avec fes clavaires les
hypoxylons -, dont les loges font furmontées de
filets. Il n’eft aucune clavaire qui ait pour bafe une
loge ou un volva coriace. D’ailleurs, tes clavaires
font toutes fort groffes, & ont leur furfaee entièrement
garnie de loges. »
Les clavaires de Builiard font d’une forme alon-
gée & ordinairement cylindriques; elles font fouvent
taillées en mafîue, s’élèvent dans,une direction
verticale, & donnent leurs femences de tous
|es points de leur furfaee. Parmi les efpèces, les
unes font (impies, les autres rameufes : il y en a
qui font coriaces ; d’autres font charnues & fragiles
; quelques-unes ont leur Commet comme fau-
poudré d’une pouffière fécondante, tandis que
leurs femences, mêlées à un fuc glaireux, font
renfermées dans de petites loges, dont toute-leue
J