
au à conferver le beurre; on ajuftera au fond de ce
vaiffeau un morceau de bois blanc , au milieu duquel
on incruftera uhô efpèce decrapaudine en
fer} on aura un moufl'oir ou gros bâton, armé par
le bas d’un pivot qui entrera dans la crapaudine;
ce bâton fera tràverfé fur fa longueur, de dif-
tance en diftance, de petites baguettes rondes,
d’un demi-pouce moins longues que le diamètre
du vaiffeau , pour que le mouffoir puiffe y tourner
librement. L'on adaptera à l’autre extrémité du
mouffoir, également à fon centre, une autre crapaudine
, fur laquelle vienne aboutir une vis , introduite
, à hauteur convenable, dans une traverie
de bois folide. Cette vis terminée en pointe entrera
dans la crapaudine, tiendra le mouffoir vertical
en mobile, & , au moyen d’une efpèce d'archet
monté d une corde, qui fera deux ou trois
tours fur le mouffoir, celui-ci pourra être mis en
mouvement alternatif de droite & de gauche.
On préparera des lellîvts avec de la foude & de
la chaux, & on pourra y procéder d'après la méthode
que nous avons déjà indiquée.
Les leflives étant prêtes, on mettra dans le vaiffeau
une cerra.ne quantité d’huile d'oiive , fix livres
3 par exemple; on verfera fur ces fix livres,
trois livres ou une pinte & demie de leflîve à huit
degrés; on agitera le mélange pendant un quart
d'he ure au moins, en fuite on y ajoutera une pinte
& demie de leffive à dix-huit degrés, & on agitera
pendant une heure & plus ; enfin, après ce tems,
l’on verfera fur la matière trois autres livres de
leffive à dix-huit degrés , & on agitera jufqu’à ce
que l’on ait une pâte de bonne confiftance; on,
la.laiffera alors , pendant deux ou trois heures, fe
repofer, avant que de la retirer du vaiffeau; on
la pétrira ou malaxera enfuite dans un autre vafe
évafé, avec une fpatule ou mieux un pilon en bois ,
après quoi on la diftribuera dans des miles ordinaires
pour lui donner la forme d ufage. Au bout
de quelques jours , 1 e favon aura acquis allez de
confiftance pour pouvoir être retiré des mifes. On
le laiffera fecher fur des p la n c h e s q u a t r e ou
cinq décades après , il aura la confiftance requife
pour être employé.
Si i’on prend des huiles de graines, telles que
celles de navette ou de colza, & c ., l’on emploiera
de la leffive à vingt degrés. Ce dernier favon exigera
aufti fix décades u moins pour fecher & pour
acquérir une bonne confiftance ; il diminuera plus
en poids que celui d'huile d’olive.
Si l’on veut travailler en grand, on pourra , au
.moyen d'une mécanique, multiplier les pots ou
vaifleaux, agiter les mouffoirs par I’aétion d’ un ’
balancier, qui peut en mettre en mouvement t-lie
.-quantité qu’on jugera à propos. Sur chacun de çe.s
moulloirs ieroient roulées deux cordes en fens opt-
j>ofe; l une des extrémités de ces cordes feroit
attachée an mouffoir, l’autre au balancier. Un ou
deux ouvriers mettroient la machine en mouve-
S A V
On peut voir une femblable mécanique , rue du
Théâtre français, n°. iy ; elle a été faite par le
citoyen Defquinemare pour le citoyen Malherbe,
qui prépare des ƒavons à froid. Cet artifte s‘eft fait
un vrai plaifir ue nous communiquer fa méthode
particulière d’y procéder.
On prépare aufti des fv oh s à froid , en unifiant
à deux parties d’huile une partie de leflîve' concentrée.
Dans cette fécondé méthode , on écono-
mife peu fur le combuftible, parce qu’il faut concentrer
les leflives fur le feu Ainfi, quand on
brûle du bois pour cuire le favon, ou qu’on en
brûle pour évaporer féparémënt la leflîve , la
même dépenfe exifte toujours; de manière qu’ il
n’y a point d’économie à faire du favon froid en
employant des leflives concentrées.
Nous avons defiré conrioître comment plufieurs
des huiles que nous avions employées dans les
expériences précédentes, fe conduiroienten les
unifiant à Iadofede deux parties d’huilé, fur une de
leffive concentrée ; les réfultats ont été •
i°. Qu’une livre d’huile d’olive & huit onces de
leflîve concentrée ont donné du favon qui, après
quelques jours , a pris une confiftance ferme ;
i°* Qu’une livre d’nuile de colza & huit on-
cts de leflîve ont donné un favon ferme & confif-
tant, de couleur jaune ;
3°. Qu’une livre d’huile de poiffon & huit onces
de leflîve ont donné \it\ favon affez confiftant,
de couleur grife & légèrement jaune, lequel con-
fervoit l’odeur d'huile de poiffon ;
4°. Qu’une livre d’ouile de faine & huit onces
de leflîve ont donné un favon ferme, mais moins
que les précédens;
) Que celui, enfin, obtenu d’une livre d’huile
d’oeillet & de huit onces de leffive, étoit encore
moins confiftant que les premiers.
• 11 paroît » en général, que la maffe des inconvé-
niens attachés à la fabrication en grand des fivons
à froid , eft plus confiderr-ble que celle des avantages.
Ces inconvéniens font: i°. que l’on conforme
un peu plus de leflîve dans la fabrication à
froid , que dans celle par h cuite ; i°. que l’on ne
ptut conlommer la totalité des leflives toibles que
l’on a ,néceffairiment lorfque l’on veut épuifir
parfaitement la fonde ; 30. que les favons à froid
font prefque toujours grenus; 40. enfin , qu’ il faut
garder au féchoir très-long-tems ce favon, avant
de pourvoir U mettre en vente ; de forte que , fi
l’on vouloit fabriquer très en grand des favons à
froid, il Croit nécefiaire démultiplier les kchoirs,
pour recevoir le favon de chique jour-,; & comme
plus de deux mois, il faudroit, pour une pareille
fabrique, une plus grande quantité de fonds en
avance, que pour une fabrique ordinaire; aufti
voit-on ceux qui ont éievé des fabriques., dans
l’intention de faire des favon$X froid fi décider
pai la fuite à continuer leur fabrication par la
S A V
Des favons mous & en pâte.
Les favons mous ou en pâte font ceux que l’orf
prépare en faponifiant, par la potaffe cauftique,
les huiles de. chenevis, de colza, de navette & de
lin. En Hollande on fe fert auffi d’huile de poiffon;
mais dans nos fabriques de France, on s’eft
fait un devoir de ne point en employer , afin de
conferver à nos favons mous la fupérioricé fur
ceux faits par les Hollandais. On compte ordinairement
fur cent vingt-cinq livres de potaffe pour
deux cents livres dJhui!e. Les leflives fi; préparent
en ajoutant environ cent livres de chaux fur
cent vingt-cinq livres de potaffe. On en-fait le mélange
en fuivant les précautions que nous avons
indiquées lorfque nous avons parlé de la préparation
des leflives avec la foude. On procède aufti à
en couler la leflîve à peu près de la même manière.
La conftruétion des chaudières ne diffère pomt
de celles qui fervent à cuire les favons folides : on
en conduit de même la’ cuite ; mais, fur la fin, on
ett attentif à ne point laifler grumeler le favon : il
faut que la totalité des leflives qu’on y emploie y
refte combinée ; l’on doit furtout éviter de faire
ufage de foude ou de fel marin, l’une & l’autre
coritribueroient à donner à ce favon une forte de
folidité qui nuiroit à fa perfe&ion. On juge lesyà-
vons mous bien faits lorfqu’étant froids, ils font
parfaitement unis, d’une confiftance molle , pâ-
teufe & gluante.
Les favons mous font, ou verts ou noirs. Si on
n’employoit que de l’huile de chenevis, on les
obtiendroit verts fans addition ; mais en faifaqt
ufage d’huile de colza , on a des favons jaunes ;
alors, pour rabattre la couleur en vert, on y
ajoute, pendant la cuite, un peu d’indigo. Si l’on
s'eft fervi d'huile fans couleur, telle que de l’huile
de lin ou d'oeillet, on donne la couleur verte à ce
favon par un fond de jaune & de bleu, favoir, par
l’addition du curcuma pour le jaune , & d’indigo
pour le bleu ; mais comme le plus ordinairement
l’on emploie ces diverfes huiles mélangées, les fa-
bricans font dans l’ ulage d’ajouter , pendant ia
cuite, un mélange de curcuma & d’indigo pour le
bleu , &r lorfqu’ ils veulent avoir des favons vert ■ ;
& quand ils leur font .demandés noirs, ils ies colorent
par l’addition , pendant la cuite , d’un peu
de fulfate de fer & de décoêfjon de noix de galle. 11 y a à l'article de XArt du favonnier, par Du-
hamel-Dumonceau, un Mémoire de Fougeroux
de Blaveaux , fur la manière dont, à Lille, on tait
les favons en pâte ; l’enfemble de la fabrication y
eft parfaitement décrit. Nous renvoyons donc à
ce Mémoire ceux qui voudront faire des établif-
femens en^ce genre.
De la fophifiication des favons.
Une des fophiftications les plus ordinaires eft
d’abreuver le favon d'une grande quantité d'eau.
Cette addition rend le favon plus blanc : on la re-
conooîtra facilement en gardant, pendant quelques
jours, ce favon dans un endroit fec; il perdra,
par l'évaporation , toute l’eau mife en excès ; de
manière qu'en le repefant enfuite, on reconnoîtra
la quantité d’eau qu’on y auroit ajoutée.
Ceux qui fe permettent de pareilles fraudes,
ne trouvent pas à vendre le favon au moment où.
il vient d’êtré fait, & , en le confervant chez eux,
l’eau devroit s’en féparer par l’évaporation ; mais
ils ont trouvé le moyen de parer à cet inconvé-*
nient, en confervant le favon ainfi abreuvé d’eau
dans un© diffolution faturée de fel marin. Ils ont,
à cet effet, de grandes cuves contenant de la diffolution
de muriate de foude, où ils laiffent les
briques de favon nouvellement faites , jufqu’au
moment où ils trouvent l’occafion de le vendre.
On jugera, par l’expérience fuivante , de l’avantage
qu’ils retirent de cette fraude. Nous avons
fait du favon à la manière ordinaire; lorsqu’il a été
cuit, nous y,avons ajouté affez d’eau pour avoir
environ trois livres de favon par livre d'huile;
c’étoit faire du favon abreuvé ; car trois livres
d’huile ne doivent donner que cinq livres de f.y
von marchand ; nous avons pris alors de ce fivott
abreuvé , au moment où nous venions de le retirer
de la mife , deux morceaux parfaitement égaux
du poids de chacun quinze onces ( c'étoit le 17
brumaire ) ; ils avoient une confiftance ordinaire,
pas cependant allez forte pour refifter à la prelfion
du doigt.
L’un de ces morceaux a été mis dans une diffolution
de muriate de foude , de manière à en être
parfaitement recouvert.
L'autre morceau a été placé à l’air libre, dans
un endroit fec.
Ces deux morceaux de favon ayant été repefés
un mois après ( le 2.7 frimaire), celui qui avoir
été oonfervé dans la diffolution du muriate de
foude pefoit feize onces & demie, de manière
qu’au lieu d’avoir perdu , il avoir augmenté en
[ poids d’une once & demie ou de dix au quintal ;
il avoir aulfi acquis beaucoup de fermeté.
L'autre morceau , au contraire, celui que nous
avions confervé à l’air libre, a perdu confîdéra-
blement de fon poids ; il ne pefoit plus que fix on-»
ces & demie ; il avoit conféqüe.mment perdu huit
onces & demie de fon poids, ou environ cin-
quante-fix livres & demie par quintal. Que l’on
compare ces réfultats, & l ’on appréciera la fraude
que font ceux qui confervent des favons trop
abreuvés'd’eau dans une diffolution de fel marin.
Quefnot a imprimé la manière de faire quatre
cents livres de favon. On emploie, pour cette abominable
fophiliication, de l’alun, du fel marin , de
l’amidon, de la chaux, de la foude en poudre, de
l ’huile, du fuif& de l’eau.Toutescesfubftancesfont
unies à cent livres de bon favon, en deux opéra*-
tions différentes ; de manière à taire, à la première
opération, avec cent livres de favon, deux cents
Q *