
J’examinerai d’abord la matière qui s'étoit dif-
foute dans l’eau , & enfuite la matière floconneufe
jaune.
16. La diffolution aqueufe(i ƒ) 3 réparée de fori
excès d’acide & de la matière peu foluble par
plufieurs évaporations & diffoliitions fucceffives,
étoit d’un jaune-brun ; elle avoit une faveur acide ,
amère & aftringente ; elle précipitoit la-gélatine
en flocons jaunes j elle contenoit un peu d’acide
fulfurique, qui étoit fer.lible à la barite. Il eft
vrai qu’il y avoit un précipité floconneux, formé
par la fubftance aftringente j mais celui-ci étoit
foluble dans l’acide nitrique. (Je crois que cet
acide fulfurique provenoit d’une portion de réfidu
charbonneux qui avoit été Complètement détruire
par l’acide nitrique ; car fur quatre expériences
que j’ai laites, j’ai eu deux réfultats qui ne m’ont-
préfenté aucune trace d’acide fulluriquejde précipité
formé par la barite étoit foluble en totalité
dans l’acide nitrique. )
Pour féparer l’acide fulfurique qui avoit été
mis à nu, je fis bouillir le liquide aftringent qui
le contenoit avec du carbonate de barite ( i) ; je
fis enfuite évaporer à ficcité* & je repris par l'eau.
11 relia du fulfate de barite mêlé à un peu de
combinaifon de matière aftringente & de barite.
La diffolution aqueufe contenoit la matière aftringente
pure, ou au moins privée d’acide fulfurique
} je la fis évaporer à ficcité, & je diftillai le
réfidu dans une petite cornue de verre adaptée à
un ballon; il pafia, i° . un liquide jaune, ayant
une faveur acide & amère; je penfe que c’ étoit
de l’ acide nitrique; 2°. de l’acide fulfureux que
l’on reconnut à fon odeur & à la combinaifon
qu’il forma avec l’oxide de cuivre; 30. du gaz
hydrogène fulfuré >4°. du foufre provenant de la
décompofition de l’acide fulfureux & de l’hydrogène
fulfuré; y°. un liquide huileux brunf, épais,
mêlé d’acide prulfique & d’ammoniaque; 6°. de
petits criflaux en aiguilles, que je n’ai pu déterminer
à caufe de leur petite quantité; 70. un
charbon très-bourfouflé, contenant dé l’ammoniaque
, fenfible à l’odorat & au tube imprégné
d’acide nitrique foible (2). Ce charbon contenoit
un peu -de foufre; car, brûlé avec le nitrate de
potaffe , il donna du fulfate avec du nitrate de
barite.
11 fuit de ces faits que la matière aftringente ,
foluble dans l’eau produite par la réaction de l’acide
nitrique fur le réfidu charbonneux , étoit formée
d'acide nitrique, d’acide fulfurique & de matière
charbonneufe,
17. Je paffe maintenant à l’examen de la ma-,
tière jaune , peu foluble dans l’eau. Je la fis bouil(
1) L e liquide digéré pendant vingt-quatre heures fur la
litharge perdit également fon acide fulfurique , mais le carbonate
qe barite m’a paru être-préférable à celle-ci.
('■ *) 3e penfe q.ue cexte ammôniaqut fut formée lorfque'le
charbon encore chaud eut le coma ft de l ’air.
lir avec de l’eau, jufqu’à ce que les lavages ne
précipitaflent plus fenfible.menc la barite en fulfate.
Cette matière ainfi lavée étoit jaune-orangé; elle
avoit une faveur aci ie & amère; elle étoit légèrement
acide au papier de tournefol : chauffée
dans un tube de verre, elle fofoit vivement en
dégageant une odeur aromatique un peu fulfu-
reufe; bouillie dans l’eau pendant plufieurs heures,
thé répandoit une odeur de mufe affez forte ; &
quand on diftil.oit cette eau, on obtenoit un liquide
imprégné de la même odeur. L’eau qui avoit
bouilli fer cette fubftance étoit jaune & très-légè-
remtnt acide au papier de tournefol ; èlle formoit
avec l’eau de barite des flocons jaunis, entièrement
folubles dans l’acide nitrique. Quoique cette
fubftance eût bouilli avec beaucoup d’eau, elle
feignoit toujours celle-ci en jaune. Ainfi lavée ,
elle fut foumife à l’aétion de .la chaleur dans la
boule de verre ; elle fufa, & on obtint, entr’autres
produits, de la vapeur nitreufe, du gaz nitreux
& un charbon qui avoit une odeur lülfureufe.
Quoique je n’aie opéré que fur deux décigrammes,
jë crois devoir regarder cette fubftancé comme
étant compofée d’acide nitrique, d’une petite
quantité d’acide fulfurique & d’une matière charbonneufe
plus hydrogénée que celle que forme
le réfidu charbonneux (1).
18. La production artificielle d’une matière qui
répand l'odeur du mufe avoit déjà été remarquée
par Geoffroy en 1726 (2), & .par Margrafl en
1758 (3). Le premier l’avoit obfervée en mêlant
des acides fulfurique & nitrique avec de l’huile
blanche de pétrole ; le.fecond, en mêlant de l’huile
rectifiée de fucicin avec l’acide nitrique. J’ai eu
moi-même plufieurs fois l’occafion de faire la
même obférvation fur la fubftance d’apparence ré-
fineufe qui refte après l ’inflammation de l’huile
de térébenthine par les acides fulfurique & nitrique.
Il paroît que, dans toutes ces circonftancesy
il fe forme des combinaifons d’acide nitrique,
& quelquefois d’acide fulfurique & de matière
huiieufe.
19, Les réfultats de l’aCtion de l’acide nitrique
fur le réfidu charbonneux offrent des faits inté-
reffans que>je dois préfenter.
i°. Ils prouvent que le réfidu charbonneux, qui
contient de l’acide fulfurique, ne fe fépare pas de Gelui-ci lorfqu’il fe combine à l’acide nitrique,
abftraCtion faite de la petite quantité qui eft mife
à nu, & que, fi l’on fe bornoit à l’indication de la
barite pour s’affurer de l’abfence de l’acide fulfurique,
on le méconnoîtroit, parce que le précipité
dans lequel on le foupçonneroit, feroit foluble
dans l’acide nitrique.
Ci) Ay ant laifîc par hafard une certaine quantité de cette
fubftance expofée aux rayons du fo leil, j’ai obfervé, au bout
d’ un m o is , qu’elle s’étoit recouverte de petits criftaux blancs;
(2) Mémoires de L’Académie des Sciences.
(3) Opufcules, rom. I I .
2°. Ils confirment ce que j’ai annoncé dansmoh 4
précédent Mémoire, fur la combinaifon de l’acide
fulfurique avec la matière tannante du charbon
de terre, laquelle forme avec la barite un com-
pofé foluble dans l’acide nitrique.
30. Ils font voir que, par la réaétion de l’acide
nitrique fur une fubftance charbonneufe retenant
beaucoup d’hydrogène, une portion d’hydrogène
& de caibone peut fe combiner avec l’acide nitrique
& former un compofé qui fufe par la chaleur,
qui eft peu foluble dans l ’eau, Sc qui pré-
fehtê quelques-unes despropriétés des réfînes; que
par conféquent on s’e lf peut-être trop preflé de
regarder les charbons de terre qui préfentoient un
produit analogue, lorfqu’on les traitoit par l’aci Je
nitrique, comme étant formés d’une réfine fem-
blable à celle des végétaux frais & de fubftance
charbonneufe. Cette opinion peut être vraie,
mais les : faits fur lefquels on a voulu l 'appuyer ne
font pas fuffifans pour l’approuver .
4°. Us démontrent que, fi la manière dont le
réfidu charbonneux fe conduit avec l’acide nitrique
établit, quelque rapport entrç ce compofé
& le charbon de terre, les faits’ que,nous, avons
expofés plus haut ne permettent pas, au moins
pour le moment aétuel, de les regarder comme
ayant une origine identique, ainfi qu’on pourroit
•le préfumer. En effet, lorfque l’acide fulfurique agit
fur le camphre, & ce qui arrive avec celui-ci doit
avoir lieu avec les autres fubftances végétales, il
fe combine à la fubftance charbonneufe qu’il a
mife à nu : par conféquent, fi les charbons de terre
avoient été,formés de cette manière, on devroic
y, trouver de l’ acide fulfurique; or,fi l'on fe rappelle
que M, Prouft, ayant foupçonné la combi-j
naifon du foufre avec le charbon dans les charbons
de terre, n’a pu obtenir un foupçon d’acide fuifu-
reux de et s dernières dépouilles de fulfure de fer,
on conviendra que l’hypothèfe de la formation des
houilles par l’acide killurique n'eft pas admiffible.
’ ■«•• 20,, J’ai voulu déterminer la quantité d’acide
fulfurique contenue dans cent parties de réfidu
charbonneux. Ppur cela, j’ai fait fondre du nitrate
de potaffe dans un creufet de platine, & j’ai
projeté le réfidfl par petites portions. Quoique
j'aie pris toutes les précautions néceflairespour ne
rien perdre, cependant j ’ai toujours vu qu’il s’éle-
voit hors du creufet une portion de matière qui
échappoit à la cômbuftion & qui étoit emportée
par les.gaz, qui fe dégageoient avec impétuofité;
j’avertis donc que je ne regarde pas comme exaéle. 1 * 2 3
la quantité d’ acide fulfurique que je vais donner.
Dans une expérience, j’ai obtenu un précipité de .
fulfate de barite repréfentant cinq parties d’ acide
fulfurique, & dans une autre, un précipité repré?
Tentant .fix parties. Une chofe que je ne dois pas
pafler fous filence,cJeft que j’ai trouvé des tracts
de chaux & d’oxide de fer dans le camphre qui a
lèrvi à mes expériences, & qui avoit été fublimé
deux fois.
§. III. Examen des lavages.
21. Les lavages du réfidu charbonneux furent
-diviTés, comme je l’ ai dit (3), en premiers & fej
conds lavages : les premiers ne differoient des
‘ autres que parce qu’ils contenoient un grand excès
d'acide fulfurique. Pour que cet excès ne décom-
! pofàt pas la matière végétale qui étoit en d if l’o lu r
tion, je ne fis concentrer le liquide qu'au quart de
■ ■ fon volume primitif; dans cet état il paroiffoic
vert par réflexion , & jaune-: ougeâtre par réfrac-
, tion. ( Ce phénomène eft analogue à celui de l’in-
fufion du bois néphrétique, avec cette différence
que celle-ci paroît bleue par ïéfLxion. ) Ii précipitoit
la gélatine : il étoit évident, d’après cela ,
qu’il contenoit la fubftance tannante de Hatchett.
Pour féparer cette dernière de l’ acide fulfurique
qui y étoit mêlé, je faturai par l’eeu de barite; le
fulfate précipita, & la combinaifon de barite &
de matière aftringente refta dans la liqueur : celle-
ci étoit d'un beau rofe; lorfqu’on y verfoit de
l’acide muriatique pour faturer la barite, elle re-
couvroit la propriété de réfléchir le vert & de
laiffer paffer le rofe ; ainfi faturée, elle précipitoit
la gélatine; la combinaifon de fubftance aftringente
& de barite defféchée, & .enfuite chauffée
dans un tube de verre, fe convertiffoit en fulfure.
22. Les féconds lavages contenoient un atome
d’acide fulfurique. Pour le féparer, j’y verfai quelques
gouttes de la combinaifon dont je viens de
parler ( de fubftance aftringente & de barite), &
je filtrai; le liquide filtré pouvoit être confidéré
comme une diffolution de fubftance aftringente
pure; il étoit acide; il préfentoic les mêmes af-
peéts de lumière que les premiers lavages concentrés;
il précipitoit la gélatine: évaporé à fie-;
cité, il laiffoit une matière qui, étant foumife à
l’aélion de la chaleur, dégageoit du gaz hydrogène
fulfuré & de l’acide fulfureux; la fubftance aftringente
avait éprouvé quelque changement par
cette évaporation; ca r, traitée par l’eau, elle
donnoit une diffolution qui ne réfléchiffoic plus
la couleur verte, & qui précipitoit la barite en
flocons bruns. Ce précipité fe diffolvoit dans l’acide
nitrique & fe convertiffoit en fulfure par la
calcination.
23. Je regarde la fubftance aftringente comme
étant formée d’acide fulfurique & d’une matière
que je ne çonnois pas : il eft, vrai que je n’ai pu
en féparer dire&ement l’acide fulfurique; mais,
comme l’on ne peut y démontrer ni l'hydrogène
fulfuré, ni l’acide fulfureux , & que , d’un autre
côté, elle rougit le tournefol & contient de l’oxi-
gène & du foufre, la première opinion me paroît
la plus admiflible dans l'état aéluel de la fcience.
§. IV. Réfumé des faits expofés dans ce Mémoire.
24. Lorfqu’on diftille de l’acide fulfurique fur
; du camphre, on obtient, i° . une huile volatile