
Sang chaud. On a donné ce nom, en phyfio-
logie & en zoologie, au liquide fanguin contenu
dans les artères & les veines des animaux qui ,
ayant une double circulation & des poumons dans
lefquels le fang eÜ expofé à l'air, contrarient dans
ces deux fondions, liées par leurs organes & leur
mécanifme, une chaleur confiante , prefque tou-
jours fupérieure à celle du milieu qu’ils habitent,
tandis que, dans les animaux dont l’ organifation
eft différente, & où la circulation & la refpiration
ne fe corre(pondent pas comme dans l’homme, les
mammifères & les oifeaux, le fang eft d’une température
tout au plus égale ou même inférieure à
celle de l’ air ou de l’eau dans lefquels ils vivent.
{ y ° y £i les articles Sang & San G froid.)
Sang veineux. On a déjà d it, à l’article
Sang a r té r ie l , que le fang contenu dans les
veines diffère de celui qui diftend les artères par
fa nature. Le premier afpeft fait voir que le fang
veineux eft d’une couleur violette-foncée, qui pa-
xoit même à travers la peau , tandis que le fang
artériel eft d’un rouge-vif & éclatant ; que le premier
préfente un liquide comme onéhieux 8c gras,
tandis que le fécond offre une liqueur écumeufe
& légère,plutôt favoneufe qu’huileufe. On a prétendu
que le fang veineux n’étoit pas auffi chaud
que le fang artériel ; mais cela n’ eft pas confirmé
par l’ expérience. Ge qu’on fait le mieux fur la nature
comparée du premier de ces liquides au fécond
, c’eft que le fang veineux, moins oxigéné,
plus hydrogéné & plus carboné que le fang artériel
, a une capacité plus grande pour le calorique
que le fang artériel. Ces propriétés dépendent de
l’état du fang au moment cù il entre dans les veines
, après avoir arrofé les divers organes. A me-
fure que le fang artériel parcourt les différentes régions
du corps a il y dépofe du calorique, il perd
peu à peu une portion de l’oxigène qu'il a puifé
dans les poumons, & il perd ainfî* en quelque
forte, une partie des qualités vitales qu’il avoit
acquifespar la refpiration ; auflî revient-il au coeur
.parles cavités droites, foit pour fe renouveler par
fon union avec le chyle, que le mouvement & la
preffion rendent plus intime dans fon trajet à travers
le poumon, foit pour contrarier, par la refpiration
& à l’aide du double effet de la perre
d’ une portion excédante de carbone & d’hydrogène
, & de l’abforption du calorique & de l’oxigène,
les qualités qui le rendent propre aux fonctions
qu’ il doit remplir comme fang artériel.
( Voye% les mots A lR , OxigÉne, RESPIRATION,
Sang , &c. )
SANDRAGON. On nomme ainfî, en matière
médicale, en hiftoire naturelle & dans les arts,
une efpèce de rélîne, rouge-foncée lorfqu’eîle eft
én mafle, d’un rouge-vif quand elle eft en pou-*
dre. Ce fuç n’a ni odeur ni faveur feniïble. II y
t a a de trois fortes de forme dans les boutiques :
le fandragon en ro féaux > le fan dragon en maffes,
& 1Q faudragon en pains orbicuîaires & aplatis. Ce
dernier eft un mélangé de diverfes gommes colorées
avec un peu de véritable fandragon ou avec
une teinture de bois de Bréfil. On le reconnoît
parce qu’il eft foluble dans l’eau, & parce qu’il
fe bourfoufte au feu fans s’enflammer, comme
le fait une vraie réfine.
Le fandragon vient de quatre arbres différons : le
draco arbor de^Cluhus ou drac&na draco de Linné,
qui croît aux îles Canaries, d’où il découle en larmes
pendant les grandes chaleurs.
Le fécond arbre eft une efpèce à’arundo rotang
des Indiens, le pterocarpus draco de Linné. Les
fruits, expofés a la chaleur, laiffent couler des
gouttes de leur furface : on les fait enfuite bouillir
dans 1 eau jufqu’à ce qu’ils foient cuits ; on
évapore la décoélion à ficcicé, & l’on a le fan-
dragon en maflfe.
Le troifîème arbre qui fournit du fandragon
croît dans l’île de Java ; il eft nommé angfana
ou angfara par les Javanais. On affure que l’entrelacement
des fibres imite, fur tes fruits de cet
arbre, la figure d’un dragon.
La quatrième efpece d’arbre d’où l’on obtient
cette réfine eft le fanguinis arbor de Hernandez,
& nommé e^qua-kuitl par les Américains.
Le fandragon fe diffout très-bien dans l’alcool,
auquel il donne une belle couleur rouge. L’eau
précipite cette diffoltition en petits globules rouges
qui troublent la liqueur; cependant elle conserve
une petite portion de réfine avec une légère
teinte rouge.
fèfine eft employée comme aftringent à
l’intérieur & à l’extérieur : elle entre dans plusieurs
emplâtres contre les hernies & les fra&ures; elle
fert plus rarement dans les arts.
SANGUIFICATION : mot fynonyme de Thé-
matofe des Grecs , qui fert, en phyfiologie, à
défigner la fondion par laquelle fe forme le fang
dans les animaux vivans. Cette fon&ion a donné
naiffance à beaucoup de théories erronées chez
les Anciens & même chez les Modernes ; ce n’eft
qu’à l'époque où l’on a mieux connu la nature, la
compofition & la décompofîtion de l’air, & en
général celle des divers fluides élaftiques comme
la véritable .théorie de la combuftion , qu’on a pu
commencer à concevoir ce qui fe paffe dans la
formation du fang. On eft cependant encore loin
de bien connoître cette importante opération de
l économie animale , qui tient aux phénomènes
les plus abftraits, & qui eft en même tems la clef
de beaucoup d’autres de ces phénomènes.
Le fang provient manifeftement du chyle produit
de la digeftion des alimens,8d qui eft deftiné
a entretenir & a renouveler ce liquide , avec
lequel il commence à fe mêler dans des veines
affez voifines des cavités droites du coeur ; mais
il y a affez de différence entre ces deux liquides,
pour rferfuader qu’il fe paffe de grands changeo
n s lorfque le chyle fe convertit en fang Sans
doute que, pour bien connoître cette converfion,
il fau'iroit une analyfe exafte & comparée de ces
deux liqueurs ; mais fi la chimie elt déjà allez
avancée dans l'analyfe du fang , elle 1 eft très-peu
dans celle du chyle. On s’eft contenté de^ confi-
dérer le chyle comme une forte de lait, a caufe
de fa couleur blanche-opaque, & on a été jufqu’à
décrire les propriétés variables des parties cafeufe,
butyreufe & féreufe de certe liqueur, ainfi'que
l’a tait Aftruc dans fa Pathologie, qui eft bien plutôt
le roman que l’hiftoire des maladies élémentaires.
Quand on vient à rechercher fur quels faits eft
fondée cette manière de confidérer le chyle , un
reconnoît bientôt qu’il n’y en a aucun de bien
avéré; qu’aucun auteur n'a travaillé à une analyfe
de cette liqueur, trop peu abondante pour
avoir permis autre chofe que quelques efiais peu
propres à éclairer fur fa nature, & que ce qu’on
a dit à cet égard n'eft qu’une de ces affertions vagues
& hafardées qu’on fe permet trop fouvent
dans les ouvrages de théorie. On ne peut donc
pas établir la doctrine de la fanguification fur une
prétendue analogie de nature entre le fang Sc le
chyle : on ne peut pas regarder l’hématofe comme
une fimple converfion faite du chyle prétendu laiteux
en fang, dont la partie cafeufe du premier
conftitueroit la fibrine du fécond , & le petit-
lait la partie féreufe ; encore manqueroic-il au
lait chyleux , dans cette théorie , de quoi faire la
partie colorante du fang, dont il faudroit bien
regarder la formation comme une compofirion
nouvelle & totale. Il eft beaucoup plus vrai &
beaucoup plus_d’accor J avec les connoiffances ac-
quifes de confidérer l’hématofe comme une com-
binaifon entière, comme un changement de nature
& de compofition , dont l’effet s’exerce fur
le liquide chyleux: celui-ci doit contenir, en effet,
les principes néceffaires à la formation du fang ;
mais ces principes ri’y foqt pas d’une nature aufli
fem.blable à celle du fang qu’on l’avoit d’abord
imaginé ; ils font difpofés , en effet, à devenir
ceux du fang , mais ils ne font pas encore d’une
nature femblable : il.faut, pour qu’ils le deviennent
, qu’ils éprouvent un changement intérieur,
un autre mode de compofition ; de forte que ,
pour bien connoître ce que c’eft que la fangui'
fication ou l’hématofe , en quoi elle confifte , il
faut déterminer en quoi confifte ce changement
intérieur. Mais, pour arriver à ce réfultat , il
faudroit auparavant bien connoître la nature
comparée du chyle & du fang, leur analogie &
leur différence; j’ai déjà fait remarquer qu’on
avoit feulement quelques notions un peu exadles
fur le lang , & qu’on n’en avoit aucune fur le
chyle.. Ce n’eft donc pas par la comparaifon des
deux liquides , trop peu connus , qu’on peut déterminer
le genre de changement que l’un des
deux éprouve pour devenir l’autre, ou, pour arrivée
à ce réfultat, il faudroit commencer par analyfer
le chyle dans les circonftances variées qu’il pré-
fente , & ce travail n’eft pas même entrepris.
Ainfî, l'étude de la fanguification doit être faite
fur le fang lui-même ou fur les phénomènes que
préfente ce liquide depuis le moment où il fe
mêle avec le chyle qu’il reçoit près du coeur,
jufqu’à celui o ù ,. forti des vaifl’eaux pulmonaires ,
il a repris, dans ce circuit de la refpiration, tous
les cara&ères du fang neuf & propre à remplir
toutes les fonétions auxquelles il eft deftiné.
On ne peut douter, d’après les expériences
exactes des Modernes & les faits nombreux que
la phyfiologie & la médecine ont fournis aux ob-
fervateurs, que le fang ne perde, pendant la circulation
générale, les caractères & les propriétés
qui le rendent néceffaire à la vie , & qu’il ne reprenne
ces caractères par le chyle qu’ il reçoit &
par les effets qu’il éprouve dans les poumons. En
effet, fi une caufe quelconque s’oppofe à fon paf-
fage à travers les poumons, le fang, confervant
les changemens qu’il a foufferts dans la circulâtiori
générale, & ne réparant pas les pertes qu'il a
faites , rtfte veineux & ne peut pas fervir à la viej
auflî la mort fuit dé plus ou moins près l’obftacle
qui empêche le fang de traverfer les poumons;
N’eft il pas évident par-là que le fang, parvenu
aux veines, n’a plus , en quelque forte , les v é ritables
propriétés ou la vraie nature du fang,;
& que pour reprendre cette nature , il faut qu’il
acquière de nouvelles propriétés en paffant à travers
les vaifieaux pulmonaires ? Or , ces nouvelles’
propriétés ne peuvent; dépendre que des deuxphe-
nomènes qu’on reconnoît dans Ja fanguification,
fâvoir, l’addition du chyle & les altérations qui
dépendent de l’air. Le chyle rend au fang la plus
grande partie de la fubftance qu’il a perdue où
dépofée dans les organes qu’il a parcourus &?
nourris. 11 eft bien évident que la matière du’
chyle, quelle qu’elle foit, eft affez analogue à celle'
du fang, pour être difpofée à prendre la nature
de.celui-ci. D’abord, la compofition du chyle commence
à éprouver un changement par fon mé-*
lange avec le fang, en ce que la première liqueur,
fenfiblement plus oxigénée , trouve dans la fécondé
une matière furchargée de carbone, d’hy--
drogène & d’azote ; & celle-ci, en même tems,
fe convertit en une (ubftance nouvelle , où la proportion
des trois derniers principes indiqués varie
tout à coup de ce qu’elle étoit d’abord dans l’une
& l’autre bqueur ifolée : il en réfuite un tout homogène,
different de fes deux premiers compo-
fans # & qui n’eft ni le produit immédiat ou chyleux
de la digeftion, ni le fang veineux ou ancien;
ce nouveau corps devient bientôt du véritable
fang, qui prend, par la circulation pulmonaire,
& à l ’aide du contaét de l’air, les propriétés déterminées
du fang artériel par le mécanifme que
noüs développerons tout-à-l’heure.
Oa voit que, dans cette opinion, le fang vei-»-
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