
mon précédent Mémoire fous le nom de matière
d’apparence Jiuileufe.........elle étoit rouge-orangée,
fluide à une température de 15 deg. ; mais elle
s’épaifivffdit à l’air ; elle avoit une faveur acide,
aftringente & amère 5 elle précipitoit .abondamment
la gélatine, & s’atcachoit fortement aux
fubftances animales qu’elle teignoit en couleur de
fafran j elle étoit plus foluble 'dans l’eau chaude
que dans l’eau froide; elle étoit dilToute par la
p o ta (Te : cette combinaifon dépofoit au bout de
plufieurs jours une petite quantité de matière détonante
; l ’acide nitrique concentré, l’alcool, la
diffol voien t facilement ; je l’ai analyfée de la manière
fui vante.
Analyfe.
4. (a) J’en ai pris quarante parties que j’avois
delféchées dans une capfule à une douce chaleur;
je les ai fait bouffir dans l’eau diftidée; j’ai ajouté
à trois reprifes trente parties de carbonate de
plomb. Il y a eu efferveieence : après une heure
d’ébullition, j’ai filtré la liqueur.
(£) Il eft refié fur le papier une matière pulvérulente
de couleur biftre, laquelle ayant été traitée
à chaud par l’eau aiguifée d’acide fulfurique,
a donné du fulfate de plomb, une liqueur contenant
de.la réfine & une petite quantité des deux
amers.
? (c) La liqueur (a) filtrée a été décompoféè
par l’acide fulfurique. Le fulfate de plomb feparé,
la liqueur a été concentrée. Il s’eft dépofé un peu
fié matière huileufe qui avoit échappé à l’aétion
du caibonate de plomb , ou qui s’étoit régénérée
pendant l’évaporation. Le liquide féparé de la
matière huileufe, concéntré de nouveau , à laide
une matière épaiffe très-amère & afiringente, qui
precipitoit la gélatine. On a partagé cette matière
en deux portions, nos. 1 & 2.
(d) La portion n°. 1 fut mêlée à la potaffe ; elle
fe prit prefqu’en maffe; on l’étendit d’eau froide
& on filtra. Il refta fur le papier une pouffière
d’un jaune-foncé non criftallifable, qui étoit détonante,
mais moins que la combinaifon d’amer
au maximum & de potaffe. La diflolution aqueufe
de cette pouffière rougifloit le fulfate de fer au^
maximum, précfpitoit la gélatine, quand préalablement
on avoit Taturé l’alcali d’acide. Cette
pouffière jaune étoit une combinaifon de potafle,
d’amer au minimum & d’amer au maximum ; car
l ’ayant décompoféè par l’acide muriatique, j’ai
obtenu par l ’évaporation fpontanée, i° . des crif-
taux d’amer au minimum. , retenant un peu d’amer
au maximum; 20. une eau-mère qui, ayant été
fat urée par la potafle, donna de la matière.détonante
en petites aiguillés jaunes, en tout fem-
blable à celle qu’on forme avec l’amer au maximum.
La liqueur d’où la poudre jaune détonante ]
s’étoit jféparée, contenoic de la- réfine ; plus, une
petite quantité d’amer au minimum.
( e) La portion nQ. ' 2 fut traitée par l’acide
hicrique concentré. Il fe forma quelques petits
globules d’afpeét huileux. On fit bouillir, puis
évaporer à ficcité 5 on diffol vit dans l’eau & on
fatura par la potaffe.. On obtint criftallifée la
combinaifon de l’amer au maximum avec la potaffe.
L’eau-mère évaporée donna de nouvel lés
aiguilles détonantes,, d’un jaune plus foncé que
les premières, parce qu’elles retenoient un peu
de réfine.
J’ai conclu de ces expériences, i 9. que la
matière d’apparence huileulè'eft formée de réfine,
d’amer au minimum pour la plus grande partie',
d’amer au maximum, & peut-être d’acide nitrique
, combiné en même temps à ces trois principes,
& contribuant à leur donner de la fluidité;
20. que l’amer au minimum peut fe combiner
avec i’amer au maximum ( 1 ) , & former
une combinaifon détonante avec la potaffe.
y. L’analyfe de la matière d’apparence huileufe
efi fondée fur la différence de folubilicé des amers
& de la réfine, & fur celle de leurs combinaifons
avec l’oxide de plomb. Ainfi, quand on fait bouillir
du carbonate de plomb avec la matière huileufe ,
les amers & une petite quantité de réfine fe combinent
à l’oxide métallique, & forment des combinaifons
folubles dans l’eau : une fois que la plus
grande partie de la réfine efi débarraffée des amers,
elle efi beaucoup moins foluble ; elle doit donc
fe féparer, & ce qui favorife encore cette réparation,
c’eft fa combinaifon avec un peu d’oxide
de plomb. La réfine, par fon affinité pour les
amers, en entraîne une petite quantité avec elb.
Lorfqu’on décompofe .par l’acide lulfurique la
combinaifon foluble des amers avec le plomb,
les deux amers fe combinent enfembîe, de manière
qu'ils forment tous les deux un compofé
peu foluble avec la potaffe ; & quand on vient
à traiter ce compofé par l’acide muriatique , les
amers fe féparent l'un de l’autre dans l’ordre de
leur folubilicé refpeéfcive.
6. Je ne regarde pas la matière d’apparence
huileufe comme étant confiante dans la proportion
de fes principes immédiats : tantôt l’amer au
minimum efi en petite quantité, tantôt il domine
fur les autres ; il en efi de même de l’amer au
maximum & de la réfine. C ’eft pourquoi l’on
obferve des différences dans la couleur, la con-
fiftancç & les autres propriétés décompofées.
7. lime refte à expliquer la raifon pour laquelle
la combinaifon de réfine & des amers précipite
la gélatine beaucoup plus abondamment que l’amer
au maximum. Ce fait me paroît dû à ce que
la réfine & l’amer au minimum, qui ont eux-
mêmes de l'affinité pour les matières animales,
(1) L a combinaifon des deux amers m’a paru fufceptiblc
de prendre !a forme de globules d’apparence huileufe a une
température de 60 deg. j T acide nitrique contribue peut-être
à lui donner cet état,'
mais qui n’en ont pas afiez pour uréclpfter la gélatine.,
en fe combinant avec l’amer au maximum ,
diminuent la .folubilicé de ce dernier J le fixent
en quelque forte & au gmt rirent par-là, fuivaut
toute apparence, la faculté qu’ il a de former un
compofé peu foluble avec la gélatine.
§. II. Subfiance amère tannante, formée avec Vextrait
de fernambouc,
8/ Dans mon premier Mémoire fur le bois de
fernambouc,“ j’ai décrit une fubftance amère, produite
par l’aétion de l’acide nitrique fur l’extrait
de ce bois. J’ai fait voir que cette fubftance ne
criftallilbit pas, qu’elle étoit acide, qu’t lie pré-'
cipitoit la gélatine, qu’elle formoic avec la potaffe
de petits criftaux detonans. Je regardai à
cette époque cette matière comme étant un compofé
d’amer, de tannin artificiel Sc d’acide nitrique.
Je me fondois, l° . fur ce qu’elle fufoit par
la chaleur & formoic des fels detonans avec le s .
bafes falifiables, à la manière de l’amer de Wcl-
ther ; 20. fur ce quelle precipitoit la gélatine à
la manière des tannins décrits par M. Hatchett,
tandis que l’amer de Welther (préparé avec l’indigo
) ne le precipitoit pas ; d’où j ’ai conclu
qu’il falloir deux corps différens, & pour former
des combinaifons détonantes, & pour précipiter
la gélatine ( i) ; 3°. fur ce qu’elle rougifloit le
papier de tournefol, parce que j’avois obtenu, en
traitant l’extrait de fernambouc par l’acide nitrique
, une autre fubftance qui ne le rougifloit pas
d une manière fenfible , qui fufoit par la chaleur
& préeipitoit la gélatine. Je terminai l’expofé de
mon travail en difant que je me propofois de
voir fi la matière tannante de Hatchett étoit un
vrai tannin, fi l’amer de l’indigo ( ou de Welther)
étoit femhlable à celui de fernambouc, & enfin,
fi c’étoit à l’acide nitrique que ces fubftances devraient
leur propriété détonante.
9. Pour réfoudre ces queflions, je préparai une
certaine quantité d’amers de fernambouc. Je le
combinai à la potaffe ; je fis bouillir cette combinaifon
avec- de l’eau aiguifée d’acide muriatique.
Par l’évaporation j’obtins une matière blanchâtre
, criftallifée confufément ; l’eau - mère ,
d’où celle-ci s’étoit féparée, donna, par la concentration,
de nouveaux criftaux mélangés de pe-r
tits grains d’apparence réfineufe & de couleur
rouffe. Cette expérience m’a conduit à penfer
que fi l ’amer de fernambouc ne peut criftallifer
avant d’avoir été combiné à la potaffe , c’eft qu’il
eft uni à une certaine quantité de matière que
je crois réfineufe ; celle-ci contribue à lui donner
la propriété de précipiter la gélatine plus abon-
(j) S i alors je n’obtins pas de précipité avec l’amer de
W elth er & la gélatine, c’eft que j ’employai des difïblutions
trop étendues, .ou bien que je veffai trop de.gélatine.
! damaient que l’amer de l’indigo. I.i combinaifon
détonante d’amer criftallifé de fernambouc & 1' de potaffe eft beaucoup moins foncée en couleur
que celle formée par l’amer non criftallifé : celui-
ci femble fe rapprocher alors de l’amer de l ’i'n-
■ digo ; mais ces deux corps préfentent cependant
des différences qui ne permettent pas de les confondre
enfeinble.
10. L’amer de fernambouc criftallifé , chauffé
dans la boule de verre décrite plus haut, a
donné , i°. de l’eau ; i°. de l’acide carbonique 5
3°. de l’acide pruffique; 40. un gaz inflammable
brûlant avec une flamme blanche pelante, à la
manière du gaz hydrogène huiieux ; y°. du gaz
nitreux ; 6°. du gaz azote; 7 °. un chai bon très-
| divifé.
Je conc’us que l’amer de fernambouc eft une
combinaifon d’acide nitrique & d’une matière
huileufe ou réfineufe, à ce qu’il paroît ; que cette
combinaifon, en s’uniffant aux bafes falifiables,
forme des fels detonans 5 qu’elle précipite la gélatine
plus abondamment que l’amer de l’indigo,
parce qu’eilë paroît avoir plus de tendance à la
folidîté que ce dernier ; que la pré fin ce d’une
^ certaine quantité de réfine à laquelle elle peut
: être unie , favorife encore cette précipitation.
§. III. Subfidnce tannante formée avec Faloés.
11. En traitant l’aloès à la manière de M. Bra-
cor.not, j’ai obtenu la matière qu’il a appelée acide
aloétique. Cette fubftance acide a une couleur jaune,
une faveur acide, aftringente & amère. Projetée
fur un fer chaud , elle répand une fumée jaune ,
fe charbonne & fufe : chauffée dans la boule de
verre, elle donne, i° . de l’eau; 20. de l’acide
carbonique; 30. de l’acide pruflique; 40. du gaz
nitreux ; y°. un gaz inflammable que je crois être
un mélange de gaz hydrogène huileux & de gaz
oxide de carbone ; 6°. du gaz azote ; 70. du
charbon.
II me femble, d’après cela, que l ’acide aloétique
eft une combinaifon d’acide nitrique analogue
à celles que j ’ai décrites précédemment.
Cette fubftance eft peu foluble dans l’eau, &
quoiqu’elle foit jaune, fa diflolution eft d’un beau
pourpre. Je penfe que l’eau agit dans cette cir-
conftance, en affoibliffant l’a&ion de l’acide
nitrique fur la matière végétale à laquelle il eft
combiné. Cette diflolution pourpre devient jaune
par l'addition des acides nitrique & muriatique,
&c.
Elle colore l’alcool en pourpre. J’en ai fait
bouillir dans de l ’acide nitrique à yodeg. ; jai fait
évaporer à ficcité en diffolvant le réfidu dans
l’eau ; j ’ai obtenu une diflolution rouge dont la
teinte tiroit un peu fur la couleur de feu , parce
qu’ il y reftoit probablement un peu d’acide en
excès : il me femble donc que l’acide nitrique
n’avoit pas changé la nature de cette fubftance.