
falpêtrées. Ces cuviers font percés à leur partie
inférieure pour faciliter l'écoulement de la lef-
nve , & afin de l'arrêter à volonté, on y adapte
un robinet en bois. On difpoie plufieurs cuviers
fur la même ligne, & on ménage au-deflus des
tuyaux qui y apportent de l'eau pure : cette dif-
pofition rend la travail du leffivage bien plus
aifé : l'on pratique encore au-deffous, St fur le
devant des cuviers, un canal qui reçoit la leflïve
a mefure qu'elle coule , & d'où , à volonté , elle
eft_ conduite dans tel ou tel réfervoir, fuivant
qu'il eft dediné à recevoir la première, la fécondé
ou troifième leflïve.
Dans les grandes fabriques, les bugadières font
conltruttes à chaux St à ciment, avec des briques
de plat, ayant chacune à peu près cinq pieds en
carre, St environ quatre pieds St demi de hauteur.
A leur partie inférieure font des robinets en bois,
que l'on ouvre fuivant la nature de la leffive que
- l'on coule ; & pour la recevoir, l'on pratique en
terre , au-deflous des cuviers, un réfervoir , le-
quel eft divifé, afin de conferver féparément les
differentes leffives.
Des chaudières.
Les chaudières que l'on établit dans les favon-
Beries font d'une conftruétion particulière • les
fonds feulement font en métal, St elles font’ terminées
en briques, avec un enduit en ciment
L on ménagé à ces fonds , qui font ordinairement
en cuivre ou en tôle de Suède, 8t d'une
forme courbe, des bords ou anfes , qui font renversés
en dehors & aplatis comme les bords d'un
chapeau, de manière que lorfque ces fonds font
pôles furies fourneaux, les bords ou anfes portent
d un bon demi-pied fur les murs des briques qui
font le fourneau, & ces bords font enfuite recouverts
par des briques qui forment le ceintre
& le complément de la chaudière. Par cette dif-
polition , les anfes des fonds font noyées dans la
maçonnerie i & la chaudière, dont la partie fupé-
neure eft en briques , fe trouve parfaitement fonde.
Comme, d'après ce genre de conftruaion les
chaudières ne peuvent être chauffées que par le
tond, quelques perfonnes ont penfé que fi elles
etoient totalement en cuivre, l'on pourrait difpo-
. ourneau de manière à ce que la chaleur
circulât tout autour de la chaudière , ce qui
produirait une grande économie dans le combustible
5 mais n'y a-t-il pas des confidérations p l u s
fortes qui ont déterminé les favonniers à donner
la préférence au genre de chaudières qu'ils ont
adopté ? C eft du moins ce que nous penfons,
a après les reflexions fuivantes :
Premièrement, lorfqu'on tient fur le feu des
" r .°a des 8raiffes dans des baffines de cuivre
ces fubftances attaquent Je cuivre de la baffiné
dans les parties qui fe trouvent en contaâ avec
f air, c eft-a-dire, vers les bords de la baffine, &
U portion de vert-de-gris qui fe forme, ne laiflb
pas que d'être confidérablfe. Ainfi, lorfque !’on
fait au favon dans des baffins qui font en totalité
en cuivre, l'on ne peut éviter le vert-de-gris,
furcouc fi l’on emploie des huiles rances, & c.-
& ce vert-de-gris , qui refte dans le favon , lui
donne une teinte plus ou moins forte, qui ne
plaît point à ceux qui le confommenr. Cet inconvénient
n a pas lieu lorfque la partie fupërieure
-de la chaudière eft en briques.
Deuxièmement, fi le feu circuloit tout autour
de la chaudière où Ion fabrique le favori, il
pourroit bien arriver que l'on donneroit quelquefois
un degré de chaleur trop fore fur la fin de
I operation, c eft-a-dire, lorfque le favon eft cuit s
car alors il adhère facilement à la chaudière 3 mais
cec inconvénient ne peut avoir lieu dans celle
dont i ln y a que le fond qui reçoive immédiatement
la chaleur , parce que dans cette partie il fe
trouve prefque toujours un peu de leflïve, qui
fert comme de bain-marie au favon qui la fumage.
Ces deux confidérations peuvent bien avoir
déterminé les favonniers en faveur de la chaudière
dont ils font ufage.
Les favonniers pratiquent encore au fond de
leurs chaudières un tuyau de deux pouces & demi
de diamètre , dont ils fe fervent pour leparer les
leffives épuifées qui fe réunifient au fond de la
chaudière, au-deflous du favon : ils nomment ce
tuyau Yépine. Si Ton avoit à cuire du favon dans
une chaudière qui ne feroit point pourvue d'une
epine, alors l'on féparèroit les liqueurs épuifées
a Ja faveur d'un fiphon fait en fer-blanc ou en
tôle.
Des mifes,
Lês mifes font les vaiffeaux dans lefquels on
coule du favon lorfqu'il eft cuit. Ces mifes (e conf-
truifenc de diverfes manières, fuivant les loca-
Iués & félon l'idée du fabricant. Les mifes les plus
ordinaires font de grandes & fortes caiffes faites
de planches ajuftees dans des membrures afluiéties
par des clefs de bois. Ces caiffes font placées fur
de fortes plates-formes, de manière que la leffive
qui s en écoulé puiffe être recueillie dans un ré-
jervo,r. Il y a de ces mifes qui peuvent recevoir
jlifqu a deux milliers de favon. Quelques favon-
mers préfèrent des mifes plus petites; ils en multiplient
alors le nombre. La planche du devant des
mifes eft a couliffe, de manière à pouvoir être
retirée à volonté.
Les mifes peuvent aufft fe faire d'une ou plufieurs
dalles de pierre, creufées fuivant l'épaiffeur
que 1 on veut donner à la brique de favon, & le
devant de ces mifes eft de meme fermé par una
planche a couliffe qui s'y adapte à la faveur d'une
rainure qui y eft ménagée pour la recevoir.
II y a auffi des fabriques où, les mifes font dif-
polees immédiatement fur le fol de l'atelier. L'an
place horizontalement de petites dalles, que l’on
rapproche & affujettit au ciment ; on les encaiffe
enfuire par quatre planches, que l'on foutient par
de petits pieux. La planche de devant eft de même
à couliffe, afin d'avoir la facilité de retirer le
favon.
En général, les mifes doivent être placées dans
l'atelier où l'on cuit le favon ; & fi fon étendue
ne le permettoit pas, il faudroit faire en forte de
ne les en éloigner que le moins poflïbie.
Il faut aufli, avant de couler le favon dans les
mifes, avoir l'attention de mettre chaque fois,
âu fond de chacune d'elles, une petite couche
de chaux en poudre , que l'on applanit parfaitement
à la faveur d'une batte. Cette précaution eft
néceflaire pour que le favon n'adhière point aux
mifes, & pour qu'on puiffe l'en retirer avec
facilité.
Des divers u f enfiles nèceffiaires dans Vatelier du
favonnier.
L'atelier du favonnier doit être pourvu de
quelques uftenfiles néceffaires à leurs travaux ,
tels que des aréomètres pour déterminer le
degré de force des leffives, des rouables ou redevables
pour remuer le favon, des truelles, des
pelles, des maffes de fer pour caffer la foude ,
des mortiers de fer , des règles pour tracer la
divifion du favon, des couteaux très-minces pour
couper le favon ,* enfin, divers autres inftrumens
oue l'artifte ingénieux faura difpofer pour rendre
ion travail plus fimple & plus facile.
On concevra de même que, dans une fabrique
bien ordonnée, on doit y ménager un local bien
aéré, que l'on difpofera pour y apporter les briques
de favon que l'on fort des miles, & qui ont
befoin de refter quelque tems à l'air pour acquérir
de la folidité.
L'on doit encore difpofer des eirïplacemens
pour fervir de dépôt aux huiles, aux foudes &
au favon fabriqué. Toutes ces diftributions enfin
doivent être faites avec intelligence, & fuivant que
le terrain & les bâtimens de la fabrique pourront
le permettre.
De la manière de préparer les leffives.
Avant de procéder à la leflïve de la foude, il
convient de la pulvérifer: on commence donc par
la cafler avec une maffe de fe r , & enfuite on la
pile dans des mortiers de fer j mais, dans les
grandes fabriques , on trouve plus expéditif de
l'écrafer fur une pierre noire & dure , à l'aide
d'une maffe de fer plat.
On ne la réduit point en poudre fine} on fe
contente d’une divifion à peu près égaie à la
groffeur de gros grains de fable , ou a celle de
petites avelines.
11 eft auftï néceflaire de connoïtre la quantité
d'huile que l'on doit faponifier, pour déterminer
les quantités refpeélives de foude & de chaux
que l'on doit mettre en leflïve. Ainfi, lï l'on
compte préparer mille livres de favon, on peut
obferver les proportions fuivantes :
Six cents livres d'huile d’olive.
Cinq cents livres de foude de bonne qualité.
Cent livres de chaux vive.
Ces quantités pourront être multipliées, félon
que l'on voudra préparer une quantité de favon
plus confidérable.
La foude étant pulvérifée comme nous venons
de le dire, il faudra arrofer la chaux avec une petite
quantité d’eau 5 elle ne tardera pas à s'échauffer
û elle eft bonne} elle fe délitera & fe
réduira en poudre. On la paffera alors à travers
un crible, & on la mélangera, à la pelle, avec la
foude j on mettra enfuite ce mélange dans un
cuvier ( ou bugadière ) , au fond duquel on placera
quelques tuileaux pour faciliter l’écoulement
de la leflïve j l'on verfera fur le tour une certaine
quantité d'eau, de manière que le mélange foie
bien imbibé & recouvert de trois ou quatre travers
de doigt > & lorfque l'eau y aura féjourné
quelques heures, on ouvrira le robinet pratiqué
à la partie inférieure du cuvier. On recueillera
avec foin la leflïve qui en découlera} elle lera
âcre & cauftique : on la nomme première leffive.
Un oeuf frais ne doit point s'y enfoncer s mais on
en déterminera bien plus furement le degré de
fo rce , à la faveur d'un aréomètre pour les fels.
Cette première leflïve donne au pèfe-liqueur,
de dix-huit à vingt-cinq degrés : on doit la conferver
dans un vafe féparé.
Lorfque la leflïve ceffera de couler, on fermera
le robinet 5 on verfera fur le mélange une nouvelle
quantité d'eau, & au bout de quelques
heures on ouvrira le robinet} il en découlera
une fécondé leflïve moins forte que la première ,
mais qui donnera encore à l'aréomètre de dix à
quinze degrés : c’eft la fécondé leflïve, que l'on
confervera de même féparément. Dans ce deuxième
coulage, les premières portions de leflïve qui couleront
, feront prefqu’aufli fortes que la première
leflïve : on pourra donc les y réunir.
On verfera encore de nouvelle eau fur le cuvier,
& on extraira une troifième leflïve bien
moins forte que les deux premières, puifqu'elle
ne donne que de quatre à huit degrés à l'aréomètre
: c'eît la troifième leflïve , que l'on mettra
de même dans un vafe féparément.
Enfin , pour épuifer, la foude de la totalité de
la fubftance alcaline, on verfera deffus de nouvelle
eau ^ la foible leflïve qui en découlera,
fera mife à part pour un nouveau travail de
leffivage.
La foude doit fe trouver enfuite parfaitement
épuilée} on la retire du cuvier; on s'en fert, fous
le nom de charrie, pour ftrtilifer k s prairie*
humides,