féparée des graiffes & du fuif, auxquelles elle étoit
unie avant leur faponification; & l'alcali, en s'unifiant
à ces corps gras, ne paroît pas agir fur la
gélatine qu'ils pouvoient contenir *. ainfi , la méthode
générale que nous avons indiquée pour la
préparation des favons , fourniffant le moyen de
féparer la gélatine des graiffes qui en contiennent,
offre un moyen de perfection de plus dans la fabrication
de ces favons particuliers.
§. E. Du favon fait avec le beurre rance & la foude
du commerce.
On peut encore faire du favon bien confiftant,
en employant du beurre j mais comme ce corps
gras eu , de même que la graiffe, de première
nécefiité pour la préparation de nos alimens, on
ne doit point fonger à l'employer à la confection
du que dans le cas où l’on 3uroit du beurre
tellement rance, qu'il ne feroit plus poflible de le
manger.
Pour procéder à un effii du favon avec du beurre
falé qui étoît dans ce dernier état, nous l’avons
fait bouillir avec de l'eau pour le deffaler; nous
l’avons tenu enfuite fur le feu pour le priver d humidité
: alors nous en avons pris trois livres, que
nous avons traitées avec des leflives préparées,
comme nous l'avons indiqué; nous avons obfervé -
que ce corps gras fe faponifioit très-bien ; il eft
même un de ceux qui, quand il eft réduit à l'état
de favon, peut être abreuvé d’une affez grande
quantité d’eau, & donner néanmoins du favon
q u i, étant froid , ne laiffe pas d'avoir une con-
liftance folide. Celui que nous avons obtenu de
trois livres de beurre rance deffaié, pefoit, au
fortir de la mife, onze livres; il étoit très-blanc,
mais il confervoit encore un peu de l’odeur de I
beurre rance : expofé à l’air pendant deux mois,
il ne pefoit plus que fept livres ; il perdra encore \
beaucoup étant confervé dans un endroit fec. Ce
favon eft, de même que celui de . fuif ou de
graiffe, très-propre pour les favonnages domef-
tiques.
§. F. Du favon fait avec l'huile de cheval & la foude
du commerce rendue cauftique.
On prépare, dans les voiries des environs de
Paris, une graiffe animale fluide, que l'on nomme
huile de chevalj cette huile, feule ou mélangée
à d'autres huiles, fert à brûler. Bullion ( i) annonça
en 1789 (voye? le cahier du Journal de Phyfique du
mois de mars de cette année), qu'il avoit préparé
du bon favon d’un mélange de vingt-cinq livres
d’huile de cheval & de vingt-cinq livres d'huile
(1) Cet artifte s’étoit auflï occupé de la décompolïtion du
muriate de foude ; il eft mort fans faire connoître le réfuirat
de fes travaux, "dans lefejucis il avoir eu-quelques fuccès.
d'oeillet, unies à froid avecvingt-cinqlivresde lef-
live concentrée des favonniers. 11 n'eft point à notre
connoiffunce que quelqu’ un ait cherché à en faire
du favon fans la mélanger 5 il entroit dans la férié
de nos expériences d'examiner comment elle fe
comportoit dans le travail de la faponification;
nous avons donc traité trois livres de cette huile
non mélangée avec des leflives de foude, en fui-
vant la manipulation ci-deffus indiquée , & nous
avons obfervé qu’elle fe faponifioit pour le moins
aufli bien que les autres graiffes animales. Le
Javon que ces trois livres d’huile de cheval nous
ont fourni, pefoit, au fortir delà mife,fept livres;
il étoit blanc & affez confiftant : ayant été expofé
à l’air pendant deux mois, il ne pefoit plus que
cinq livres. Ce favon n’a point d'odeur défa-
gréable ; il a acquis une grande folidité & il fa-
vonne très-bien.
Ne feroit-il pas poflîble qu'il y eût, à la fuite
des armées, des équarriffeurs qui foigneroient les
peaux des chevaux, & qui s'occuperoient en même
tems de tirer parti de la graiffe de ces animaux?
§. G. Du favon fait avec l'huile de col^a & la lejjive
de foude du commerce rendue cauftique.
L'huile de colza n'eft pas généralement employée
p3r les fabricans de favon folide; mais ceux qui
préparent des favons mous s'en fervent avec avantage.
Les divers effais que nous avons faits avec
cette huile nous ont fait connoître qu'après les
huiles d’olive & d'amande, elle eft, des huiles
végétales, celle qui donne le favon le plus folide-.
Nous avons obtenu de trois livres d’huile de colza,
traitées avec des leflives de foude ( en obfervant
la manipulation ci-deffus indiquée ) , une brique
de favon qui, au fortir de la mife,pefoit cinq livres.
Ce favon étoit d'un gris-jaunâtre ; il étoit affez
ferme^ mais bien moins que celui fourni en plus
grande proportion par une égale quantité d'huile
d’olive: il ne peut donc pas foutenir une addition
d'eau aufli confidérable. Le favon d’huile de colza
conferve aufli l’odeurparticulière àcette huile ; expofé
à l'air pendant trois mois, il a perdu une livre
& un quart de fon poids; de forte qu’il ne pefoit
plus que trois livres douze onces. Il étoit alors
affez folide, mais il n'a point acquis la féchereffe
du favon d'huile d’olive gardé dans le même endroit.
Ce favon favonne très-bien.
S. H. Du favon fait avec V huile de navette & la foude
du commerce rendue cauftique.
L'huile de navette fe conduit, dans la fabrica^
tion du favon, de la même manière que l'huile de
colza; elle eft de même employée par les fabricans
de favons mous. Nous avons obtenu de
trois livres de cette huile pure, traitées avec
de pareilles leflives que nous avons employées
pour les huiles précédentes, une brique de favori.
qui, au fortir de la mife , pefoit cinq livres dix
onces. Ce favon étoit d’un gris-jaune , & après
avoir été expofé pendant près de trois mois à
l’air, il ne pefoit plus que quatre livres & demie ;
il étoit alors bien confiftant, mais non aufli fec
que I e favon d’huile d’olive. Ce favon conferve un
peu de l'odeur particulière à l huile de navette;
& comme il favonne très-bien, les fabricans de
favon ne devroient point négliger d'en préparer.
Ce qui la leur fait rejeter, c’eft parce que cette
huile ne leur permet pas de faire trois ou quatre
livres de favon par livre d’huile. La proportion la
plus forte à laquelle ils peuvent parvenir avec
l ’huile de Colza ou de navette, pour avoir du fa von
de vente, eft au plus d’une livre & demie par
livre d’huile; mais que cette conlidération ne les
arrête point; qu’ils fe contentent d’un bénéfice
honnête, qu’ils foignent la préparation de ces favons,
qu’ils les perfectionnent, & alors ils travailleront
pour l’intérêt général & pour le leur en
particulier, & ils bifferont pour des befoins également
urgens le fuif, que quelques fabricans de
Paris & des environs emploient, depuis quelque
tems, à la fabrication du favon.
§. I. Du favon fait avec l'huile de faine & la foude
du commerce rendue cauftique.
Ce n’eft que depuis quelques années que l’on
récolte la faine pour en retirer l’huile. Il n’ eft pas
à notre connoiffance que les fabricans de favons
folides ou mouraient encore tenté fonnfage. Les
diverfes expériences auxquelles nous l’avons fou-
mife ne nous laiffent point entrevoir que l’on
puiffe l’employer feule avec avantage dans la fabrication
des favons folides ; mais elle pourra
l’être pour les favons mous ou en pâte. Cette
huile d’ailleurs, n’ayant pas de faveur défagréable,
peut fervir à la préparation des alimens. Nous en
avons traité trois livres en fuivant la méthode ci-
deffus décrite. Dans le commencement de l’opération,
cette huile nausparoiffoit fe faponifieravec
facilité; mais lorfqu’ elle a été fuftifamfnent fatu-
rée d’alcali, & que ce favon a été achevé, nous
n’en n’avons pas été aufli fatisfaits que nous l’attendions.
Le favon que trois livres d’huile de faine
ont fourni pefoit, au fortir de la mife, cinq livres
; il étoit d’un gris-fale Sc confervoit l’odéur
d’huile de faine. Expofé à l’air pendant deux çnois,
il ne pefoit plus enfuite que quatre livres dik onces
; & alors, quoiqu’affez ferme pour être manié,
il étoit néanmoins gras, pâteuX/& gluant. Ce favon
jaunit à l’air.
Pour rendre cette huile propre à la confection
des favons folides, nous penfons qu’ il faudroit lui
affocier une autre huile ou graiffe, qui donne un
favon parfaitement fec, telle que 1’ 'huile d’olive,
ou bien des fuifs, ou toute autre graiffe animale.
§. K. Du favon fait avec l'huile d! oeillet ou de pavot,
& la foude du commerce rendue cauftique.
L’huile d’oeillet ou de pavot ne nous a pas paru
propre à être employée feule à la fabrication des
favons folides. Les fabricans de favons mous la
comprennent au nombre des huiles dont ils fe fervent.
Cette huile, étant infipide & fans odeur défagréable,
eft devenue d’un ufage journalier pour la
préparation de nos alimens, fr la confommation
qui s’en fait pour cet objet à Paris ne laiffe pas
d’être confidérable; les peintres remploient; elle
eft aufli du nombre des nuiles dont on fe fert pour
brûler. Trois livres de cette huile ayant été Saponifiées
par la méthode ci-deffus indiquée, avec des
leflives de foude du commerce rendues cauftiques,
nousavons obtenuune brique de favonqui,au fortir
de la mife, pefoit cinq livres fix onces. Ce favonne
fupporte point l’addition d’eau; il eft d’un blanc-
fale, & jaunit à l’air; il eft d’une conlîftance
moyenne, pâteux ou plutôt gluant. Expofé à l’air
pendant deux mois, il n’a perdu que quatre onces
de fon poids, & lorfqu’il n’eft point dans un endroit
fec, il devient mou à fa furface. Cette huile,
qui eft avantageufement employée pour les favons
mous, ne pourroit l’être pour les favons folides,
qu’autant qu’on l’uniroit à des graiffes animales ou
à de l’huile d’olive.
§. L. Du favon fait avec l'huile de chenevis & la
foude du commerce rendue cauftique.
L’huile de chenevis eft une des huiles les plus
eftimées dans la fabrication des favons mous, mais
elle ne' peut convenir pour les favons folides. C ette
huile fert aufli à brûler. Nous en avons faponifié
trois livres, en employant des leflives de foude
du commerce rendues cauftiques, & nous avons
obtenu du favon d’une couleur verte. Ce favon,
au fortir de la mife, pefoit cinq livres; il étoic
peu confiftant, & la plus légère addition d’eau le
rendoit en pâte. Ayant confervé ce favon dans un
endroit fec pendant deux mois, il a perdu huic
onces de fon poids ; il eft devenu un peu plus ferme,
mais pas allez pour fervir à favonner à la main.
Ce favon perd extérieurement fa couleur verte; il
blanchit 8c prend enfuite une couleur brune.
§. M. Du favon fait avec l'huile de noix & lu foude
du commerce rendue cauftique.
L’huile de noix n’eft point employée, ni dans la
fabrication des favons mous, ni dans celle des
favons folides ; elle pourroit cependant l’être pour
les favons mous, fi fon prix n’excédoit point celui
des huiles que les fabricans de favons mous font
dans l’ ufage d’employer. Lorfque la préparation
j de l’huile de noix a été foignee, elle eft alors
I bonne à manger ; cette huile eft aufli recherchée
par les peintres, parce qu’elle eft'peu ou point