
leur poids à peu près ; on les a lavés , comme on
fait la pâte de farine, avec un filet d’eau, dont il
a fallu foixante litres pour les décolorer. Le linge
du nouet contenant la fleur a été teint en beau
rouge : cette eau a pafTs difficilement par le filtre,
& y a lai (Té près de dix-fept grammes de fleur di-
vifée & de fable noir. Chauffée à quarante-cinq
degrés de chaleur, elle a dépofé des flocons lé-
-gers & abondans, qui, recueillis & féchés, pe-
foient vingt - fept grammes & demi, & rtflèm-
bloient à de l’albumine coagulée d’un vert-la le.
Evaporée jufqu’à ficcité , I’eaû de lavage du car-
thame a laifle cent quarante-quatre grammes & un
tiers d’un extrait épais, jaune, intenfe & acerbe,
dont la diffolution aqueufe a offert les caractères
l'uivans. Les acides y ont fait un précipité foluble
dans les alcalis : ceux-ci en ont foncé la couleur en
éclairciflant la liqueur. L’alun l’a précipité en vingt-
quatre heures; le fulfate de cuivre en a donné un
olivâtre ; l’acéttae de plomb en a donné un fort
abondant, & a décoloré la liqueur; le borax &
l’ammoniaque n’y ont formé aucun précipité. Le
muriate d’étain l’a précipité en jaune-fale , & la
liqueur eft reftée orangée. Le tournefol eft rougi
par l’eau de lavage du carthame ; l’eau de chaux
la trouble légèrement; la noix de galle y forme
un précipité abondant ; le nitrate d’argent n’en
donne qu’un léger. Un dixième-d’acide muriatique
oxigéné la décolore entièrement. La gélatine
n’y produit aucun changement ; elle s’aigrit en
répandant une odeur alliacée fétide , & en dé-
pofant des flocons blanchâtres.
L’ extrait obtenu par l’évaporation à ficcité de
ce lavage a perdu vingt-trois grammes par l’alcool
chaud : celui-ci, évaporé , a laifle une matière
que l ’eau a prefqu’entièrement di flou te , une ef-
pèee d’extraéfco-réfineux également foluble dans
l’eau & dans l’alcool. La petite portion non dif-
foute par l’eau étoit une réfine brune, très-inflammable
, & brûlant avec une odeur aromatique.
Le carthame épuifé par l ’eau, & réduit a deux
cent quatre-vingts grammes, a été macéré pendant
fix jours dans deux litres d’alcool. Vingt-cinq degrés
de chaleur lui ont donné une couleur rouge
de brique légère, dont la nuance a diminué fenfl-
blement, & eft devenue orangée par la filtration
à travers le papier Jofçph : cette teinture précipi-
toit abondamment par l’ eau. Évaporée», elle le prit
. en mafle grenue, & de la confiftance de la cire
par le refroidiffefnent. Une leffive de potaflè la ré-
duifit en la diffolvant à un véritable état fav.c-
neux : l ’acide muriatique l'a décompofée, & en a
.féparé une matière cireufe du poids de quatre
grammes & demi. Ainfi l’alcool enlève au carthame
trois fubftances différentes : une refîne,
une: forte de cire, & la matière colorante rouge
en très-pétite quantité.
' Après avoir traité la fleur feche du carthame
fuceeffivement par l'eau & par l’alcool, M. Dufour
• l ’a traitée en trpifîème lieu par une.leffive de car-;
bonate de potaffe à froid, & en la laifîant en macération
pendant vingt-quatre heures. L’acide fu!-
furique a précipité une fécule rouge a (fez bejle de
cette leffive ; mais le fuc de citron n’ en a féparé
qu’une fécule rouge-brune , femblable à la couleur
du colcothar. Tous les eflfais qu’il a faits fur
ce traitement ont prouvé à M. Dufour, que U
chaleur de l’ébullition altère la couleur du carthame;
que l’alcool ne la diflolvoit que très-peu,
& que le vrai moyen pour l’obtenir belle & riche
conlîftoit à l’enlever à froid, par un carbonate alcalin
, au carthame bien lavé dans l’eau, à la précipiter
fur une toile de coton par l’acide du citron,
à l’enlever de nouveau à ce tiflu par une leflive
froide de carbonate alcalin , & à la féparer ’en
fécule par h fuc de citron. Il eftime la quantité
de cette matière rouge dans le carthame à un demi
pourcent.
il confîdère enfuite cette couleur fous le rapport
de la fabrication du rouge végétal. Les fa-
bricans la débitent fous deux formes : i°. en liqueur
ou en-gouttes , délayée dans un peu dg fuc
de citron : elle fe pourrit & fe décolore en quelques
jours ; elle fert fous cette forme aux teinturiers
en foie, aux imprimeurs fur toile, aux fleu-
riftes & aux fabricans de rouge pour la peau ;
i° . en taffes ou affrètes.Pour l’obtenir, on étend
avec une brofle de poils de blaireau le rQuge.en
liqueur fur des vafes plats ; on y met plufieurs
couches fucceffives.Le contaCfc de l ’air les couvre
d’un jaune ou d’ une fleur orangée qu’on nomme
le doré3 & qu’on enlève en les paflant rapidement
dans l’eau froide. La couleur, moins altérable fous
cette fécondé forme, voyage au loin, dans les
départemens 8c dans les pays étrangers. L’alcool
la diflbut très-bien à froid : trois ou quatre gouttes
fuffifent pour colorer d’ un beau rofè cent grammes
d’alcool. Cette teinture dépofe fa couleur
fur les étoffes qu’on y plonge. M. Dufour conclut^
de fon examen du carthame, que cette fleur fè-
che contient, fur cinq cents grammes, à très-
peu près :
Humidité--------- . . . ---------- - 31 gram.
Pouffière 8c débris.............................. I7
Albumine jaune-verte....................... 28
Extrait jaune 8c fai in......................... ..
ExtraCto-réfineux jaune & falin............ 21
Réfine............................................... y-.- 11 ** C i r e . . . . . . . . . ..................................
Fécule' rouge...................... 2 ^
Corps ligneux.................... 249
Alumine 8c magnéfie......................... 2 i
Oxide rouge de f e r .......................... 1
Sabie...................... 7
4B7 gram.
Quant à la manière de fabriquer le rouge végétaly
voici ce qui paroît conftituer l’efpèce d’art qjai
Ü
a pour objet cette fabrication, d après les anal y fe s j
dont je viens de donner les détails.
1®. Il faut choifir le carthame de la meilleure
qualité : celui du Levant, & après celui-là le
carthame de la Thuringe , eft reconnu comme
le meilleur. On l ’enferme dans un fac, & on le
lave à l’eau courante jufqu’à ce qu’il rende l’eau
légèrement rofe. .
i°. On le met infufer dans une diffolution de
fo u s -carbonate de fonde, faite avec deux onces de
ce fcl par livre d’eau.
30. Au bout de vingt-quatre heures on décante la
liqueur : on preffe légèrement le marc; on le lave
enfuite avec un peu d’eau, 8c, après avoir réuni ces
différentes liqueurs, on les filtre. On y met tremper
de la ouate de coton, 8c alors on y verfe du jus de
citron filtré ou du vinaigre diftillé, jufqu’ à ce que
la liqueur foit entièrement décolorée.
• On a foin, pendant qu’on mêle l’ acide dans la
liqueur, de promener le coton dans les différentes
parties de cette liqueur, pour qu’il puifle-recevoir
toute la matière colorante.
4°. On lave enfuite ce coton, dont la couleur
eft fauve, dans pliifieurs eaux aiguifées d’un peu
d’acide acéteux ; par-là il fe décharge de fa couleur
jaune, & il devient du plus beau rofe.
5°. On remet ce coton dans une diffolution de
fous-carbonate defoude, moitié plus foible que la
première ; il fe décolore, & la liqueur prend une
couleur, rouge tirant fur le brun.
^6°. On met dans cette liqueur, après en avoir
.retiré le coton en le lavant & l’exprimant, de la
craie de Briançon en poudre très.-fine, & on y
ajoute, comme la première fois, du jus de citron
ou du vinaigre diftiilé : on agite continuellement
pour que la terre puiffe faifir les molécules colorantes
à méfure qu’elles quittent l’alcali.
ou moins riche en variant les rapports entre le
carthame 8c la craie de Briançon.
ROUILLE. Le mot rouillé ( rubrica, ruberigo ) eft
employé pour' déftgner l’efpèce de croûte pulvérulente
7 0. On laifle dépofer cette terre , qui a pris une;
très-belle couleur rofe : on tire la liqueur à clair ;
on lave à plufieurs reprifeS avec de l’eau froide ,
8c on met la terre deflecher fur des affiètes dans;;
-une étuve.
On reprend enfuite cette terre colorée, & on la
broie fur une table de marbre ou de verre avec
des molettes de même matière, en y ajoutant deux
. ou trois gouttes d'huile d’amandes douces par
once, pour lui donner de l’onttueux & la faculté
de s’attacher plus facilement & plus folidement à!
la peau.
: . 8®. On peut précipiter la matière, colorante'du
carthame à l’état de pureté, & la mêler enfuite ,
, au moyen de la porphyrifation, avec la terre préparée
: on y ajoute, lorfque la çombitïaifon eft
faite, quelques gouttes d’huile d'amandes douces.
- i 9°. On petit auffi faire un rouge.liquide avec la
. matière colorante.1 du carthame précipitée ifolé-
, ment, en la-dé^yant dans..un'pèu d’eau mêîéèrd’un
quart ou d'un çinquiè(ne d’alcool, pour préferver
la couleur d'unedécomppfition fporitaftée;’:
:: ; ;; io°. On pçut faire les ro.ugïs.d’une couleur plus
, grenue , rude ou raboteufe, plus ou
moins épaiffe, qui fe ferme à la fur fa ce de plufieurs
métaux expofés à l’air, 8c fuvtout à l’air humide,
dans les lieux bas. O11 fait que cette croûte a fur-
tout lieu fur le fer, le cuivre & le plomb; que
l’étain y eft beaucoup moins fujet ; que l'argent,
l’or & le platine n’en offrent jamais même l'apparence,
ou qu’il ne s’en préfente quelques traces
fur les uftenfilès faits avec Je premier de ces mé*
taux, que dans les points cù il y a beaucoup de
foudure, 8c par coméqtient du plomb, de l’étain
& du cuivre. On fait de plus que la rouille eft un
véritable oxide du métal ou elle fe rencontre ,
qu’elle1 eft due à une combuftion lente de ce métal,
& que prefque toujours on la trouve à l'état
de caibonate métallique, parce que l'oxide abforbe
lentement l’acide carbonique de l’atmofphère. La
rouille de plomb eft grife ou blanche ; celle de fer
eft rouge ou brune, & celle de cuivre eft verte.
( Voyez, pour l'hiftoire particulière de chacun de
ces compofés, l’article du métal auquel il appartient.
) Il faut noter ici qu’il fe forme plus vite &
plus abondamment de la rouille fur les métaux qui
en font fufceptibles, dans le cas où deux métaux
différens font fuperpofés & mouillés, & que cet
effet eft dû à l’a&ion éle&rique que ces métaux
exercent l’un fur l’autre. Le zinc eft rouillé en quelques
minutes lorfqu’il eft placé fur un vafe d’argent
ou de cuivre, & recouvert d'eau : celle-ci
eft, dans ce cas, décompofée par le courant électrique,
& fournit l’oxigène au métal oxide.
ROUISSAGE. On nomme ainfi l’opération par
laquelle on fait macérer les tiges du chanvre dans
l’eau des marres, de s étangs, des ru i fléaux, des petites
rivières, & même dans les terrés molles & humides,
jufqu’ àxe que i’écorce & les couches corticales
fe détachent facilement du corps ligneux par
la preffion &: le frottement, de manière que les
premières donnent aifément la filaffe, & le tecofri
la chenevotte. Cette opération, très-commune &
; très-utile:dans les campagnes, a quelquefois de
grands inconvéniens pour la fanté de leurs habitâns.
Le féjour des plantes dans l’eau , furtout dans celle
qui eft ftagnante, 8c la putréfa&ion qu’elles éprouvent,
donnent naiffance à des exhalaifons malfai-
fantes auxquelles les médecins ont attribué la
produdion de plufieurs maladies fébriles, & fur-
tout de l’efpèce de fièvre putride qu’on nomme
pérnïciçufe:3 parce qu’elle l’eli en effet très-fou vent.
Sous, ce rapport , & furtout fous celui de la con-
no.iffance de ce. qui fe paffe.dans le rouijfage, & de
:1a recherche d’un procédé plus Ample; & moins
dangereux pour l’opérer, les chimiftes & les phy-
i ftci'ens oht étudié c&l art;avec aflez de foin depuis