
<iire, qu'il fe diffout dans l'eau bouillante , que fa
diffolution rougit la teinture de tournefol, & que
la'fubftance elle-même, en s'unifiant aux alcalis,
en neutralife la caufticité j d’ailleurs, il fe comporte
au feu absolument comme l'acide urique.
Il réfulte donc déjà de cette première connoif-
fance, que l'autruche, qui ne fe nourrit que de
végétaux, fournit une urine qui contient de l’acide
urique comme celle des animaux carnivores, &
particulièrement celle de l’homme, avec laquelle
elle a , comme nous le verrons plus bas , la plus
grande analogie : ce fait eft d'autant plus curieux,
que les autres claffes d'animaux herbivores n'ont
fourni jufqu'ici aucun veftige de cette fubftance.
Paffons maintenant à la partie liquide féparée des
excrémens, du mucus & de l'acide urique.
D’abord, pour avoir un aperçu des fubftances
contenues dans cette urine, nous l'avons foumife ;
à quelques épreuves par les réaêtifs:
i° . Elle a une couleur rougeâtre qui afîngu-
lièrement augmenté d’intenfité par l’expofition à
l'air; .
2e. Elle rougit fortement la teinture de tournefol
j
3°. L'infufion de noix de galle y forme un précipité
floconneux jaunâtre, ce qui annonce la pré-
fence d’une matière*animale;
4q. L’acide muriatique oxigéné la reni laiteufe ,
effet qui s’ accorde avec celui de la noix_de galle j
j° . L ’ammoniaque y forme un dépôt floconneux
& coloré ;
6°. La potaffe càuftique, en prodmfantlemême
effet dans cette urine, en dégage de plus de l’ammoniaque
j ^ ^
7° . L’oXalate d’ammoniaque y produit un précipité
qui a toutes les propriétés de l’oxalate de
chaux 5
Le nitrate d’argent, en donnant à cette urine
un précipité infoluble dans l’acide nitrique, démontre
l’exiftence d’un muriate ;
9°. Le nitrate de barite a prouvé, par un précipité
infoluble dans l’acide muriatique, que cette
urine contient un fulfate ;
io°. Enfin, l’eau de chaux, formant encore dans
la portion d‘urine déjà précipitée pari ammoniaque,
un dépôt floconne ux affez abondant, nous en avons
conclu qu’il y a de l’acide phofpkorique dans l’urine
d’autruche.
Après ces premiers effais, par lefquels nous
avons reconnu dans cette urine la préfence d’unë
fubftance animale, de l’acide phofphorique, des
fulfates de chaux & de potaffe, du muriate d’ammoniaque
& du phofphate de chaux, nous avons
fait évaporer avec précaution la liqueur qui nous
reftoit, & nous avons traité par l’alcool le réfidu
qu’elle a fourni.
Par ce moyen nous avons féparé le muriate
d’ammoniaque d’avec les fulfates de chaux & de
potaffe, le mucilage animal & le phofphate addule
de chaux, qui ne font pas folubles dans l’alcool.
Ces derniers ont été traités par l’eau froide pour
diffoudre le fulfate de potaffe ; les fulfate" & phofphate
de chaux font reliés fous forme de "pouffière
blanche; mais comme l’acide libre a rendu diffo-
luble dans l’eau une portion du phofphate de chaux,
on a verfé de l’ammoniaque dans la diffolution pour
précipiter ce fel ; enfuite cette liqueur a été mêlée
avec de l’eau de chaux, pour avoir l’acide phof-
i phorique libre.
Nous avons féparé le phofphate de chaux du fulfate
de la même bafe par l’eau aiguifée .d’acide
muriatique, & nous l’ avons enfuite précipitée par
l’ammoniaque.
Les matières de l'urine d’autruche qui ne font pas
folubles dans l’alcool font donc le fulfate de potafle,
le fulfate de chaux, le phofphate acidulé de chaux
& la matière animale. Les fubftances diffoutes par
l’alcool lui ont communiqué une couleur rouge-
brune affez intenfe : l’alcool évaporé a laiffé une
liqueur brune épaiffe, au fond de laquelle il y avoit
une petite quantité d’huile noire. L’eau mêlée à
cette liqueur la rrouble, & en féparé une plus
grande quantité d’huile qui prend l’afpeét & la corn
finance de la poix noire en fe raffemblant.
La liqueur féparée de cette huile confervoit en-
j core une légère couleur rouge j elle étoit très-
j acide, mais n’etoitpas précipitée par l’eau de chaux,
ce qui prouve que cette propriété n’eft pas due à
de l’acide phofphorique. La potaffe & le nitrate
d’argent nous ayant démontré, la première, l'ammoniaque,
& le fécond l’acide muriatique, nous
en avons conclu l’exiftence du muriate dans la liqueur
dont il s’agît f cè que la faveur indiquoit
d’ailleurs fuffifamment.
Quant à l’acide contenu dans la liqueur même;
nous penfons, quoique nous ne l ’ayons pas ifolé,
que c ’ c f t de l'acide acétique, lequel étoit combiné
: a l’huile & provenoit peut être, ainlî que l’huile
i elle-même, <ie la décompofition de l’ urée ; décom-
pofition qui peut avoir été opérée en partie avant
que Vurine nous eût été remife, & en partie aufii
par l’effet des nombreufes opérations auxquelles
t nous avons fournis cette liqu ■ ;ur an i in a le : il feroit
poflible cependant que cette huile eût une autre
origine , & qu’elle fût toute formée dans Xurine*
En examinant les depots qui fe forment fuccefr
fi vernent, pendant l’évaporation de Y urine d’autruche,
on trouve que celui qui a lieu au commencement
eft compofé dé fulfate & de phofphate
de chaux ; le premier eft plus abondant que le fer
cond ; que le deuxième depot, qui fe forme par le
refroidiffement de la liqueur con entrée, eft un
mélange de fulfate de chaux & de potafle, & d’un
peu de phofphate de chaux ; que le troifième dépôt
eft encore formé des memes fubftances que le
fécond, mais il contient du muriate d'ammoniaque
& plus de fulfate de potaffe. En fuppofanc qu'on eût évaporé l* urine àficcité,!
comme nous l'avons fait plus haut, on pourroit
féparer le muriate d’ammoniaque & la matière j
colorante par l’alcool, le fulfate de potaffe par une :
petite quantité d’eau chaude, le fulfate de chaux
avec beaucoup d’eau bouillante, & le phofphate
de chaux rëfteroit; mais comme celui-ci contient
un excès d’acide phofphorique, une partie fe diffout
dans l’eau qu’on emploie pour enlever le
fulfate de potaffe , d’où on pourroit le’ précipiter
par l ’eau de chaux.
L'on peut auffi féparer le fulfate de chaux du
phofphate en diffolvant le mélange dans l’acide j
nitrique ^ & en précipitant par l’ammoniaque la j
diffolution fuffifamment étendue d'eau. Les fel s î
que fournit Yurine d'autruche par des criftallifa- 1
tions fuccellives font toujours colorés, & on peut f
les obtenir blancs en détruifant par le feu la fubf* J
tance animale qui en. eft la caufe : cependant la J
plus grande partie de cette fubftance coloranre refte en combinaifon avec le muriate d’ammo- j
niaque & l’acide acéteux, fe diffolvant enfemble, j foi t dans l'eau, foit dans l'alcool : fa difiblution î
dans l’eau eft précipitée par les acides minéraux î
fous la forme d’une huile g rafle & comme bitu-
mineufe. Cette huile colore en rofe les papiers &
les linges. V
Vurine d’autruche eft donc compofée î
i°. D'acide urique ;
2°. De fulfate de potaffe^
3°. De fulfate de chaux;
4°. De muriate d’ammoniaque j
y°. D'une matière animale ;
6°. D’une fubftance huileufe.
L’acide urique & les Tels font en proportion
plus grande dans Yurine d’autruche que dans les
urines humaines : l’acide urique en fait au% moins la
foixantième partie j le fulfate de potaffe environ la
cent cinquantième ; le fulfate de chaux la trois centième
; le fel ammoniac y eft auffi très-abondant.
Uurine d'autruche conferve fon acidité jufqu'à
la fin d’une évaporation bien ménagée : ce qui
n’arrive pas aux urines humaines, parce que probablement
la matière animale que les premières
contiennent ne fe change pas auffi facilement en
ammoniaque , ou qu’elles n’en contiennent pas
fuffifamment pour neutralifer l’acide phofphorique.
L’on voit par les reiuitats qui précèdent, que
Yurine d’autruche eft., à l’ urée près, parfaitement
femblable à celle de l’homme, au moins quant à
la nature des principes; mais elle en diffère par
les proportions deces mêmes principes : nous nous
fommesaffurés que l’acide urique particulièrement
y eft incomparablement plus abondant que dans
Yurine humaine. Le rélu’tat le plus remarquable &
le plus intérefiant dé ce travail eft d'avoir trouvé
dans Yurine d’un animal qui ne fe nourrit que de
végétaux , de l'acide urique , de l’acide phofphorique,
& c . , matières qui ne fe retrouvent pas
dans les autres claffes des animaux herbivores; jjaais celles-ci contiennent de l'acide benzoïque
qui manque dans Yurine des oifeaux ; ce qui -oit
nous apprendre à ne pas tirer de nos r fuirais particuliers
des corollaires trop généraux,
La découverte de l’acide uiique dans Yurine
d’auuuche nous a conduits à rechercher cette
fubUance dans les excrémens des autres genres
d oifeaux, efpérant que , dans c cas, l’analogie
ne feroit pas tron pcule , nous avons eu la fatif-
fadVion de la voir le ré ali fer.
Là fiente des poules contient une quantité notable
de cet acide; c’eft lui qui forme l'enduit
brlan,c qui recouvre ces excrémens : pour l’en féparer
& l’obtenir pur, il lulfit do les lai fier macérer
pendant quelques minutes dans une légère
diffolution de potaffe, 6c de mêler enfuite la liqueur
filtrée avec de l'acide muriatique, Ii fe
forme un précipité blanc, qui prend une forme
criftalline & une légère couleur jaune. Ce précipité
jouit de touces les propriétés de l’acide urique.
La fiente de tourterelle nous a fourni auffi, en
fuivant le même procédé , une quantité affez confié
rable de cet acide. La fiente des oifeaux carnivores,
& particulièrement celle des vautours & des
aigles, fort de leur cloaque, liquide comme de l’eau
& blanche comme du lait ; elle ne contient qu’une
quantité infiniment-petite de matière iolide qui a
une couleur noire.
Ces excrémens liquides, que l’on doit regarder
comme de véritables urines, biffent précipiter,
par le repos, une matière blanche & pulvérulente
comme de la craie, qui n’eft autre chofe que de
l’acide urique. La liqueur qui fumage ce dépôt eft
peu colorée, acide, & donne par l’eau de chaux
un précipité qui a toute l’apparence d’un phofphate
calcaire.
La potaffe caüftique y développe une forte
odeur d’ammoniaque.
La raifon qui nous a fait penfer que les excrémens
liquides des oifeaux carnivores n’eft que de
Yurine qui fe raffemble pendant quelque temps
dans leur cloaque, c’eft que ces animaux en rendent
fouvent trois à quatre onces à la fois fans
mélange d’excrémens folides : de-là il fuit que l’acide
urique que l’on trouve même dans les excrémens
folides, appartient à Yurine. Il feroit poffible
que la coquille de l’oeuf, qui, comme on fait, fe
forme dans le cloaque des oifeaux, contînt de l’acide
urique ,mdé au carbonate de chaux, qui fait
la principale partie de la coquille.
L’acide urique , contenu dans la fiente des oifeaux
aquatiques, reffemble par ces propriétés
phyfiques, telles que la couleur, la forme, à l’acide
urique du gouano, efpèce de terreau que
M. de Humboidt a rapporté de fes voyages ; tous
les deux donnent à leur diffolution dans l’eau &
les alcalis, une couleur brune; ils précipitent les
diffolutions de plomb, d’argent & de mercur© fous les mêmes formes & les mêmes couleurs*