
propos lymphe , la liqueur qui fe fépare du fang
caillé lorfqu'on ne Ta point agité : c'eft la partie
la plus ténue & la plus légère du liquide contenu
entre les mailles du caillot, & exprimé de fes
aréoles par le rapprochement & Tattra&ion des
molécules du cruor. Lé ferum eft d'une couleur
jaune-verdâtre, d’une faveur falée & fade, d'une
conliftance aflez vifqueufe pour coller légèrement
la peau lorfqu'on le frotte entre les doigts.,Sa
proportion elt très-variable & ne peut pas être
fixée ; cependant plufieurs phyfiologiftes ont ef-
fayé de déterminer fa quantité : Hamberge.r you-
k>it qu’elle fît le tiers du poids du fang; Shwencke,
qu’elle en fît au contraire les deux tiers; Drelin-
çourt & Boyle l'admettoient pour la moitié >
Quefnay pour les trois quarts ; Vieuffens d.onnoit
à la partie rouge 0.61, & au ferum 0.38 > Hom-
berg indiquoit cinq parties pour le ferum & trois
pour la matière rouge. Suivant Robinfon il eft
beaucoup plus abondant chez les jeunes animaux :
le cruor ou partie rouge folide augmente avec
l'âge, & il vient un tems où la proportion du
ferum defcend jufqu'au tiers de la fubflance rouge.
On dit encore que le fang contient plus de ferum
après le repas, qu'à jeun il a beaucoup plus de
matière folide. Lowet & Haller attribuoient cet
effet au chyle verfé par la digeftion. Mufchen-
broeck, Martine, Shwencke, Jurin. annoncent
que la pefanteur fpécifique du ferum eft à celle de
l'eau, comme 1017eft à icoo. ...
19. Le ferum expofé au feu fe coagule ou fe
durcit, & devientopaque & folide comme du blanc
d'oeuf cuit. Cette propriété eft un des caractères
qui le diftinguent éminemment : on l’attribue à
une matière particulière bien caraétérifée par ce
phénomène, & qu’op nomme albumine, parce
que c’ eft elle qui exifte dans le blanc d'oeuf nommé
albumen. Quand on le chauffe doucement dans
Ton état de cuiflon ou de coagulation, la fubftance
coagulée & folide.devient dure , caffante , demi-
tranfparente comme de la corne. Traitée parle feu
à la cornue, elle donne de l'ammoniaque, du car-,
bonate d'ammoniaque, de l'huile fétide, du gaz
hydrogène fulfuré, & un charbon dans lequel ort
trouve du muriate, du phofphate & du carbonate
de foude ; aufïi la liqueur féreufe du fang eft-elle
fufceptible de verdir la couleur des violettes , . &
cela lui eft encore commun avec le bla.nc d’oeuf
le plus frais. D’après ces expériences, quelque
(impies qu'elles foient, on regarde le ferum du
fang comme une combinaifon d’une matière albu-
mineufe avec la foude ; combinaifon dans laquelle
l'alcali,, uni à l’albumine, conferve fes propriétés
comme il le fait dans le favon.
20. Le ferum du fang verdit le firop de violettes
& brunit la teinture de curcuma ; il manifefte
conftamment les propriétés akalines. Expofé au
feu , il fe concrète à la température de 75 degrés
du thermomètre centigrade. Ce phénomène , ob-~
fetvé pour la première fois par HarVey, l’immortel
auteur de la découverte de la circulation du fangi
eft un des plus importans que préfente cette fubftance
animale : tout le monde le connoît dans le
blanc d’oe uf j mais il diffère fenfiblement dans
le ferum du fang, parce que ce liquide , moins
épa^is que le blanc d 'oe u f, ne. prend ni la même
folidite ni le même blanc opaque dans fa concrétion.
Quoiqu’il forme une mafte, elle eft toujours
tremblante : on la trouve remplie de bulles &
manifeftement formée de deux fubftances différentes
quand elle eft refroidie après fa coagulation.
Sa couleur eft d'un gris de perle ; elle conferve une
demi-tranfparence : on y remarque une portion
plus molle, moins opaque., fou vent interpofée
entre les molécules & dans le milieu de la mafte
grife plus opaque, quelquefois raffemblée à la
furface, furtout quand elle a été coagulée lentement
& par un feu ménagé. Lorfque cette portion
ne fo montre pas ainlï, ce qui a lieu dans le cas où
le ferum eft trop liquide & trop aqueux , la partie
qui ne fe fige pas, évaporée & mife à refroidir ,
fe prend en une véritable gelée. On nomme albumine
, d'après fon analogie avec le blanc d’oeuf, la
portion coagulable par le feu, & devenant opaque
& indifloluble. On appelle gélatine la matière plus
tranfparente, qui fe fige furtout par le refroidif-
fement, qui eft diffoluble dans l'eau. Les chimiftes
n'avoient pas connu l'exiftence de la gélatine dans
le ferum du fang : je l'y ai découverte en 1790.
On verra bientôt à quoi eft due la coagulation dê
l’albumine féreufe j il eft nécefïaire de bien ob-
ferver ici, que fa concrétion par la chaleur la laiffe
toujours vifqueufe, collante, tenace, & non caffante,
lifte & fèche dans fa caftfure, comme on
le voit dans,le blanc d’oeuf durci au feu.
21. Si on traite le ferum du fang par la diftil-
lation au bain-marie, il donne une très^-grande
quantité d'eau légèrement odorante, en tout fem-
blable à celle qu'on obtient du fang , & putref-
cible comme elle. Le ferum, coagulé & deflféché
dans cette opération , eft caftant, dur , prefqua
tranfparent, & d’une couleur jaune, orangée pu
brune. Pouflfé au feu & diftifté dans une cornue ,
il fournit de l'eau & de l’huile fétide, du carbonate
d’ammoniaque concret & en partie diffous
dans l’eau, un peu de pruffiate d’ammoniaque, de
gaz hydrogène carburé, fulfuré, & du gaz acide
carbonique 5 il refte un charbon très-volumineux ,
léger, difficile à incinérer , qui contient avec le
carbone, des muriates de foude & de potalfe, du
phofphate de chaux & du carbonate de foude. O.n
n'y trouve point d’oxides métalliques. En chauffant
Lentement le ferum coagulé dans une cornue on en
fépare quelquefois du foufre, comme M. Deyeux
en a obtenu du blanc d'oeuf. Une lame d'argent
qu'on y plonge, en le faifant coaguler au feu ,
fe noircit. M. Prouft croit que le foufre contenu
dans le ferum du fang y eft uni à l'ammoniaque à
l'état d’hydrofulfure.
,22. Expofé à l’air, le ferum du fang en abforbe
l’oxigène
l'oxigène & y exhale du carbone , qui convertit
une partie du gaz oxigène atmofphérique en gaz
a,cide carbonique. A mefureque ce liquide abforbe
l'oxigène atmofphérique, il devient plus concref-
cible , plus folidifiable par le feu 5 il fe trouble
fouvent, & dépofe des flocons déjà concrètes (pon-
tanément. C ’ett ainfi que le blanc d’oe u f, gardé à
l'air, fe cuit plus vite que le fr;/is ; que le ferum du
fang des animaux qui refpirent, eft plus concrefcible
que celui des animaux qui refpirent peu. J’en ai
conclu que la concrefcibi ité , la nature plaftique j
de cette humeur, provenoient de la fixation ou de j
la combinaifon intime de l’oxigène : on en verra j
bientôt d'antres preuves. C ’eft à la propriété d'ab- j
forber l'air qu'eft due celle de mouffer par I agita- !
tion dont jouit le ferum. Une longue exposition à j
l’air favorife la décompolïtion fpontanée de cette \
humeur, & accélère fa putréfaction ; elle exhale j
alors une odeur très-fétide, brunit , devient am- j
moniacale , & laiffe à la fin une efpèce de réfidu |
foncé long-tems fétide , précédé par un putrilage
mou ou entièrement fondu qui exhale une grande
puanteur. La fepticité de cette liqueur va fi rapidement
, que Bucquet n'a pas pu déterminer fi elle
paffoit à l'état acide avant de prendre le caractère
d’ammoniaque. On la garantit de la putréfaction
par tous les moyens indiqués dans un des articles
précédens.
23. Le ferum du fang s’ unit facilement à l'eau
& dans routes les proportions. L'eau aérée le
trouble légèrement & en concrète une petite portion.
L'eau bouillie n’opère p$s le même effet &
refte tranfparenteJ Quand on diffout du ferum dans
dix ou douze parties d'eau , la liqueur qui en ré-
fulte imite le laie, fuivant l'obfervation de Bucquet
: elle eft blanche Sc laiteufe; elle fe raréfie &
monte furie feu comme lu i; elle donne par l’évaporation
, des pellicules membraniformes ; elle eft
coagulable parles acides, &c. &c. Le ferum con-
fiftant. & vifqueux a la propriété de folidifièr deux
ou trois parties d’eau; car, malgré cette addition,
i! fe concrète par la chaleur, & l’eau ne s’en fépare
pas ; ce qui eft du à l'adhérence qu’elle contracte
avec lui. En délayant cette humeur avec
cinq à fix parties d’eau , &■ en la faifant chauffer
jufqu’à l'ébullition de manière à concréter toute
la partie albumineufe, le liquide qu’on en fépare ,
évaporé convenablement , donne enfuite par le
refroidiffement une gelée qui fe fige. C ’eft ainfi
eue j’ai découvert là gélatine dans le ferum du
f ang-
24. Les oxides métalliques ne s’uniffent p'dnt
au ferum en général j mais ceux qui lailîent faefe
lêment dégager leur oxigène, & qui n'y adhèrent
que foibkmenr, tels particuliérement que l'oxide
de mercure rouge, triturés quelque tems avec le
firum , repaflèpt à l'état métallique ou s'en rapprochent
plus ou moins. On voit en même tems
l'albumine féreufe s'épaiftir, devenir opaque & fe ;
coaguler plus ou moins fortement. Cette expé-J
Chimie. Tome VI.
rience, que j'ai décrite en : 790 , prouve que l’oxi-
gène favorife la concrétion de l'aloumine, & que,
comme je l’ai déjà annoncé plus ha i t , la propriété
plaftique eft due à la fixation de ce principe ; de
forte que l'albumine cuite eft un véritable oxide.
Quand les oxides métalliques font très-oxigénés
& très-peu adhérens à l'oxigène, ils portent leur
aétion jufqu’à brûler & charbonner le ferum. C'eft
par là qu'on explique l'effet cathérétique ou même
cauftique despoifons métalliques. Il faut cependant
remarquer que cet effet dès oxides de mercure ,
leur défoxidation par l'albumine féreufe, a un
terme; qu’elle ne s'étend que jufqu'au poim de
les faire pafler à l'état d'oxide noir, & qu’ainft
l’on conçoit pourquoi du mercure coulant trituré
avec le ferum s'éteint ou s'oxide au noir. On voit,
dans ces deux expériences comparées, une nouvelle
preuve de l’atrraéUon différente des diverfes
portions de l'oxigène pour le même métal. La
première portion eft enlevée par le mercure à I’al-,
bumine, & la féconde par l'albumine à l’oxide de
mercure.
i f . Tous les acides coagulent le ferum , en ’féV
parent l’albumine èn flocons plus ou moins denfes,
& d'un gris blanc d’autànt plus folide , que les
acides font plus concentrés. Tous , après avoir
produit,cette coagulation, reftent dans la liqueur
furnageante en partie faturés de foude qu’ils ont
enlevée au ferum- Quelques Chimiftes ont; cru »
d'après cet effet, que la foude étoit combinée avec
l’albumine comme dans une forte de favon, & que
c'étoit elle qui la renloit diffoluble dans l'eau.
Rouelle le jeune la regardoit cependant comme
prefqu'entiérement à nu. Bucquet foutenoit au
contraire qu'elle ÿ étoit intimement combinée, &
que les acides mêmes n’enlevoient qu'une partie
de la foude du ferum ; il en citoit pour preuve
que le coagulum, formé dans cette liqueur par
des acides en grand excès, contenoit encore du
carbonate de foude après fa combuftion & fon incinération
: ce fait mérite cependant confirmation.;
On empêche la coagulation du ferum par les zcldas,
eu le mêlant, avant d'y ajouter ceux-ci, une cer-'‘
taine quantité de diffolution d'un carbonate alca->
lin. L’effervefcence que l'acide ajouté produit
çnlevant le calorique pour fondre en gaz l ’acide
carbonique, ne permet plus que le mélange s'échauffe,
& défend conféquemment l'albumine de
la coagulation qu’elle éprouve fans cette aidfe
tion.
26. Outre cet effet général des acides fur le
ferum , chacun d'eux en a de particuliers. Le fql-î
furiqué concentré le brunit & le charbonne; cëluî
qui eft étendu d'eau le coagule feulem3nt & le
conferve. Le nitrique dégage de cette humeur
coagulée par le feu, du gaz azote, du gaz acide
carbonique, du gaz acide piufiique , &ren convertit
le refte'en acide oxalique &£ en graîffe jaune.
L'acîde-murianqué fumint donne une couleur violette
au ferum ouïe coagule: par uo long conta#.