A n X
Frimaire.
-végétation et que rafraîchissent les vapeurs
descendues des montagnes ; enfin ces sommets
altiers qui se perdent dans les limites de l’at-
mosphère, comme les écueils semés sur l’Océan j
en un mot, tous les lieux que j’avais parcourus,
m’avaient présenté des faits dignes d’être recueillis,
et propres à devenir les matériaux
d’un système probable sur l’origine des îles
Volcaniques.
T e l est l ’effet que produisent sur le voyageur
sensible, les grandes scènes que la nature lui
offre dans les montagnes, qu’il oublie le reste
des mortels dont il est séparé par les précipices
qu’il a franchis. Son imagination s’exalte, elle
n ’a bientôt plus rien de terrestre j fatiguée des
bornes étroites qui la limitent habituellement,
elle plane sur l’univers, embrasse la nature ,
croit en saisir l ’ensemble, se livre à des conceptions
hardies qu’effacent des conceptions
plus hardies encore. Il ne reste de facultés que
pour enfanter des idées j il n ’en reste plus pour
les classer et les retenir.
Pendant le reste du jour où je visitai le piton
des N eig es, je fus dans une position d’esprit
dont je ne pouvais me rendre raison. Agité
de mille pensers divers, retenu par une force
secrète , j ’éprouvais une tristesse amère à
m’arracher de ces lieux ou j ’etais tente de me ^
croire d’une nature supérieure. Fri_
Je ne pus trouver dans notre caverne le maire'
sommeil que j ’espérais devoir rendre la paix
à mes sens j au contraire, quand le calme d’une
nuit profonde vint plonger la nature dans le
repos et m’ôter la vue de tout ce qui pouvait
m’être un motif de distraction, je ressentis une
sorte de fièvre d’imagination ; j ’éprouvai comme
une tempête d’esprit en me retraçant les sites
qui m’avaient tant intéressé ; et lorsque je
cherchais à me rappeler les idées qui m’avaient
assailli durant mon voyage, je n’y trouvais plus
de liaison : èlles étaient comme les tableaux
d ’un songe tantôt flatteur, tantôt p én ib le ,
qu’éclaire une lumière fugitive, et qu’obscurcissent
dés vapeurs incertaines.
Il en est de nos pensées dans leur tumulte,
comme dés flots dans leur courroux 5 leur agitation
a un terme , et le repos qui succède à
leur trouble, précipite tout ce qui a un certain
poids* Lorsque je commençai à goûter cette
paix d’ésprit que la majesté des sites et la fièvre
nerveuse continuelle dans ces régions avaient
troublée, je reconnus qu’au milieu de ces idées
qui s’étaient succédées dans mon esprit avec
Une telle rapidité, qu’à peine je pouvais en
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